Les Echos - 11.09.2019

(Kiana) #1

20 // ENTREPRISES Mercredi 11 septembre 2019 Les Echos


Elle tenait la vedette lundi soir au
Salon de Francfort, juste avant
l’ouverture de la grand-messe du
secteur qui ouvrira ses portes j eudi
au public. Toute en rondeurs, de la
taille d’une Golf, l’ID.3 de Volkswa-
gen a été dévoilée en avant-pre-
mière mondiale, au cours d’un
grand show rondement mené.
Pour le géant allemand, la date
restera marquée d’une pierre
blanche : il s’agit de la première
citadine 100 % électrique de la
marque, la première aussi à avoir
été fabriquée sur la plate-forme
MEB, développée par le groupe de
Wolfsburg pour accueillir ses
futurs véhicules électriques.
« Avec l’ID.3, Volkswagen peut com-

bler le retard technologique accu-
mulé dans l’électrique », a indiqué
Ralf Brandstätter, le directeur de
la marque.

Nouveau départ
Vendue moins de 30.000 euros, la
citadine à batteries arrivera sur
les routes allemandes mi-2020,
directement en concurrence avec
la Renault ZOE, la Nissan Leaf,
la Peugeot 208 électrique ou
encore l’Opel Corsa-e. Elle affi-
chera une autonomie comprise
entre 330 et 550 kilomètres, selon
le modèle choisi.
Pour marquer encore davan-
tage l’évènement, le groupe de
Wolfsburg a aussi choisi ce jour
pour afficher son nouveau logo sur
son siège s ocial, avant de le
déployer chez l’ensemble de ses
concessionnaires en Europe, puis
dans le reste du monde.
Objectif : donner au groupe une
image « plus jeune, plus d ynamique
et plus moderne », a commenté

Ralf Brandstätter. Un nouveau
départ, en quelque sorte.
« Ce n’est pas seulement une voi-
ture, c’est le début d’une offensive
électrique », a commenté sur scène
le PDG du constructeur, Herbert
Diess. Le début d’une nouvelle ère
dans laquelle le constructeur à
l’origine du « dieselgate », il y a
quatre ans, aura investi 30 mil-
liards d’euros d’ici à 2023. Pour
tourner la page du scandale (qui
lui a également coûté 30 milliards)
et faire sa mue, il a promis de lan-
cer 70 nouveaux modèles électri-
ques en 2028.

Débuts encourageants
Il s’agit aussi d’é viter les amendes
liées aux émissions de CO 2 , qu’il
devra payer s’il n’atteint pas les
objectifs fixés par l’Union euro-
péenne, dès l’an prochain. Compte
tenu de son retard et des volumes
en jeu, le groupe de Wolfsburg est
celui pour qui la facture serait la
plus salée, sur la base de sa flotte

de 2017 : 1,8 milliard d’euros par
an. Il s’est fixé pour objectif de ven-
dre à lui seul 1 million de voitures
« zéro émission » par an d’ici à
2025, et 15 millions au total sur sa
nouvelle plate-forme. Un véritable
pari, compte tenu de l’appétit
mitigé des Européens pour l’élec-
trique, pour l’instant. A moins
qu’avec ses moyens et sa force de
frappe colossale, il parvienne à
infléchir le marché...
Pour amortir les coûts de sa pla-
te-forme MEB, il a aussi proposé à
d’autres constructeurs de l’utili-
ser : Ford a déjà répondu présent à
l’appel. Les débuts, en tout cas,
sont encourageants : Volkswagen
a déjà reçu 30.000 précommandes
pour la première édition l imitée de
l’ID.3. Encore loin, toutefois, des
niveaux nécessaires à ce que la
petite citadine électrique devienne
aussi emblématique que la Cocci-
nelle ou la Golf, comme l’espèrent
ses dirigeants.
—A. F.

Volkswagen défie Renault, Nissan et Tesla


Le géant allemand a dévoilé
son nouveau logo et la ID 3,
une citadine électrique. Un
événement pour le groupe,
qui doit tourner la page du
« dieselgate » et se position-
ner sur le match du CO 2.

Les constructeurs craignent la réaction


des clients sur la voiture électrique


Oliver Zipse, le patron de BMW, au Salon de Francfort, mardi. La firme allemande a mis en place un vaste programme pour absorber
le coût des batteries. Photo Krisztian Bocsi/Bloomberg

Anne Feitz
@afeitz
—Envoyée spéciale à Francfort


Le mur du CO 2 , c’est maintenant.
Même s’ils avaient souhaité l’oublier
le temps du Salon, les constructeurs
automobiles présents à Francfort
cette année n’auraient pas pu y
échapper : Greenpeace s’est chargé
de le leur rappeler en gonflant, à
l’entrée des halls d’exposition, un
gigantesque ballon noir frappé de
l’inscription « CO 2 ».
A croire les industriels, la con-
fiance règne pourtant. Tous, ou pres-
que, ont à nouveau affirmé qu’ils
rempliraient les objectifs fixés par
l’Union européenne pour 2020-
(95 g/km en moyenne). Chez Volk-
swagen, BMW, PSA, Renault, ou
Jaguar Land Rover, pas question de
déroger. « C’est une position éthique
de principe », martèle Carlos Tava-
res, président du directoire de PSA.
Seul Ola Källenius, le nouveau
boss de Daimler ( Mercedes), a admis
que le sujet était chaud. « Les objec-
tifs sont vraiment ambitieux, on ne
peut pas exclure de les rater », a-t-il
avoué, précisant qu’il ne prendrait
« pas de décision financièrement irra-
tionnelle pour les atteindre. Nous
avons les produits, mais on ne peut
pas dicter le choix des clients ».


Choix de société
C’est toute la question, et tous les diri-
geants rencontrés à Francfort l’ont
reconnu sans fard. Lancer dans les
concessions de nouveaux modèles à
batterie ne suffira pas, aussi ruti-
lants soient-ils. « Le succès du véhi-
cule électrique ne viendra pas seule-
ment des produits », admet Herbert
Diess, le PDG du groupe Volkswa-
gen. « A la base c’est le consommateur
qui décidera, sur la base du prix. »


AUTOMOBILE


Julien Dupont-Calbo
@jdupontcalbo

Les passants de la rue de Tolbiac,
du boulevard Diderot ou de l’ave-
nue de Choisy avaient peut-être
remarqué l’an dernier d’étranges
instruments suspendus au-dessus
de leur tête. Il s’agissait du système
de mesure d’émissions à distance
installé par l’ICCT, l’organisme à
l’origine du « dieselgate ».
En vingt-deux jours, à cheval
entre juin et juillet 2018, les perfor-
mances environnementales de
quelque 180.000 véhicules toutes
catégories confondues ont été
scrutées, avec l’aide de la Ville de
Paris et du ministère de l’Intérieur
(qui détient le fichier des immatri-
culations). Les résultats de cette
étude démontrent encore une fois
le décalage entre les émissions
mesurées en laboratoire et sur la
route, comme l’ICCT l’avait illustré
l’année précédente à Londres avec
le même mécanisme de portiques.
Ainsi, les véhicules diesel les
plus récents Euro 6 émettent en
moyenne 4,8 fois plus d’oxydes
d’azote (NOx) que leurs équiva-

lents essence et 6 fois la limite
théorique autorisée de 80 milli-
grammes par kilomètre. Les
mesures rappellent par ailleurs
que les diesels Euro 6 émettent
autant de NOx qu’une (très) vieille
voiture à essence. Sans surprise
non plus, les émissions de NOx des
voitures diesel Euro 6 augmentent
de 30 % quand le thermomètre
dépasse les 30 degrés. « Celles des
véhicules essence n’augmentent pas
en cas de forte chaleur », remarque
cependant Yoann Bernard, l’un
des auteurs de l’étude.

Bilan éloquent
De leur côté, les bus modernes
Euro 6 émettent 59 % de NOx de
moins que les Euro 5 et, dans le cas
des cars Euro 6, la diminution
atteint même 84 %. Le problème,
c’est que le parc roulant de bus et de
cars s’avère vieillissant...
Surtout, le bilan des
3.455 deux-roues examinés est
éloquent. En moyenne, les scoo-
ters et les motos roulant à Paris
diffusent 11 fois plus de monoxy-
des de carbone et 6 fois plus de
NOx qu’une voiture essence. Pour
quasiment autant de NOx et de
particules qu’une voiture diesel.
Avant 2016, les contraintes envi-
ronnementales pesant sur les
deux-roues étaient très lâches.

Mais même les deux-roues datant
de 2016 et après (Euro 4 donc
Crit’A ir 1) émettent trois fois plus
que les voitures essence similai-
res, en matière de NOx et de parti-
cules. S i l’on c ompare avec une voi-
ture diesel récente, le deux-roues
récent rejette deux fois plus de
particules et 25 % de moins de
NOx. « C’est la première fois qu’on
parvient à mesurer les deux-roues
en conditions réelles. C’est impor-
tant, puisque les motos et les scoo-
ters sont appelés à occuper une part
croissante des émissions à l’avenir.
Les deux-roues Euro 4 sont
Crit’Air 1, ils peuvent rouler jus-
qu’en 2030 », explique Yoann Ber-
nard. Les partisans des deux-
roues font valoir que leurs engins
effectuent les trajets plus rapide-
ment et consomment moins.
Ces résultats « confortent » la
Mairie de Paris dans son « opposi-
tion au projet du ministère de l’Eco-
nomie de requalifier les diesels les
plus récents en Crit’Air 1. Il n’y a pas
de diesel propre », souligne sur
Twitter Christophe Najdovski,
l’adjoint à la maire de Paris chargé
de la mobilité, ajoutant que la
législation est « trop laxiste » pour
les deux-roues et qu’il fallait sans
doute revoir les restrictions de cir-
culation pendant les pics de cha-
leur et de pollution à l’ozone.n

Pollution : motos et scooters


au banc des accusés


Une étude de l’ICCT
pointe le rôle des
deux-roues dans
la pollution de la capitale.

Le compte n’y est pas encore.
« Aujourd’hui, la demande vient
essentiellement des citoyens qui veu-
lent faire étalage de leur choix de
société. La question, c’est quand on
aura épuisé cette catégorie de popula-
tion, est-ce que les autres sont capables
de prendre le relais? », interroge Car-
los Tavares. Le surcoût d’une voiture
électrique est encore d’environ
10.000 euros par rapport à son équi-
valent diesel ou à essence.

Les constructeurs en appellent
aux pouvoirs publics pour soutenir
le marché. « Il y a deux problèmes, le
prix et le côté pratique : pour vendre
les voitures électrifiées moins cher, il
faut réduire les capacités des batteries.
Et pour réduire les capacités des batte-
ries, il faut une infrastructure stan-
dardisée, permettant de charger rapi-
dement. Ce qui n’est pas le cas
aujourd’hui », rappelle Ralf Speth,
PDG de Jaguar Land Rover.
« Le gros challenge des véhicules à
batterie, c’est le coût », insiste égale-
ment de son côté Nicolas Peter,
directeur financier de BMW. « Pour
l’absorber, nous a vons mis en place un
programme de performance à tous les
niveaux du groupe : simplification des
gammes, suppressions de certaines
options ou de couleurs... »
Pour ne pas payer d’amende,
d’autres retireront des concessions
les véhicules les plus polluants. Ou,
comme Fiat Chrysler, casseront leur
tirelire pour acheter des crédits CO 2.
Mais pour Herbert Diess, pas de
doute : « La voiture électrique est de
loin la solution la moins chère pour
atteindre les objectifs. »n

lLes constructeurs affirment


quasiment tous qu’ils atteindront


leurs objectifs en matière de CO 2.


lTout en reconnaissant que la


demande pour les véhicules électrifiés


reste une inconnue de taille.


Les constructeurs
en appellent
aux pouvoirs publics
pour soutenir
le marché
de l’électrique.

Sébastien Badault


Directeur Général


France d’Alibaba


Group


Jeudi26septembre

«Les routes de l’innovation et
de la croissance passent par la Chine »

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