Les Echos Mercredi 11 septembre 2019 FRANCE// 03
Darmanin confirme un déficit compris
entre 2,1 % et 2,2 % en 2020
BUDGET Le déficit public français devrait se situer « autour de
2,1-2,2 % » l’an prochain, a annoncé mardi le ministre de l’Action
et des Comptes publics, Gérald Darmanin, sur Radio Classique,
confirmant une information parue lundi dans « Les Echos ». Ce
niveau représente une baisse significative par rapport aux 3,1 %
de déficit attendu en 2019, mais s’inscrit au-delà des 2 % initiale-
ment prévus pour 2020, d u fait notamment d es mesures annon-
cées à la suite du mouvement des « gilets jaunes » et au grand
débat national. « On réduit le déficit, on le fait peut-être moins vite
que prévu », mais « on aura gagné plus d’un point » depuis 2016,
où le déficit s’affichait à 3,4 %, a défendu le ministre.
en bref
La politique sans
adversaire identifié
LE FAIT
DU JOUR
POLITIQUE
Cécile
Cornudet
M
ardi matin,
une fuite
sur franceinfo
provoque l’émoi dans
les rangs gouvernementaux.
Le ministère de la Justice
prépare une circulaire
sur la GPA! Il ne s’agit pas
de reconnaître
automatiquement
les enfants nés de GPA
à l’étranger, dément-on
aussitôt, il s’agit juste
d’en expliciter les règles. Oui
mais qu’importe, après des
mois à promettre que la GPA
resterait « un tabou », selon
Nicole Belloubet, le doute
est mis, le débat sur la
bioéthique parasité. L’accroc
est venu de l’administration,
sans que l’exécutif
ne l’anticipe. Qui a dit que
gouverner sans adversaire
était une sinécure?
Depuis l’année dernière,
l’exécutif sait qu’en matière
sociale, il vaut mieux jouer
le jeu syndical (au moins
en partie) pour ne pas se
retrouver seul à canaliser
une crise des « gilets
jaunes ». Pour sa réforme des
retraites, Emmanuel Macron
tente de renouer avec la
CFDT. En matière politique,
il est seul aussi, sans
adversaire, excepté le RN. Le
débat peut, du coup, émerger
d’on ne sait où : de maires
qui bataillent pour protéger
les habitations des pesticides
par exemple. Il peut se nouer
en interne, et obliger
à inventer une nouvelle
chorégraphie politique.
Avec un adversaire politique
classique, socialiste, LR
ou autre, le jeu de rôle est
installé. L’exécutif connaît
ses combats, ses modes
d’action et ses points faibles.
Il peut attaquer, mettre
en faute, déstabiliser.
Vaste choix des armes.
L’adversaire de l’intérieur est
plus délicat à manier. On peut
tenter de le convaincre, on
peut chercher à le désarmer,
mais guère plus. Or, sur la
bioéthique, le vrai danger est
à l’intérieur, a identifié le
gouvernement, une poignée
de députés voulant pousser
le texte plus loin que ce qu’il
estime, lui, acceptable par
l’opinion. Résultat, c’est à eux
qu’a été confiée la
responsabilité de rapporter le
texte, « histoire de les coincer
un peu », dit un poids lourd de
la majorité. Trois ministres,
Agnès Buzyn (Santé),
Nicole Belloubet (Justice),
Frédérique Vidal (Recherche)
ont en outre été missionnées
pour conduire les discussions.
Un trio pour éviter d’offrir
une cible évidente, un trio
de techniciennes pour
dépolitiser les débats. Est-ce
la bonne méthode?
Les débats en commission le
laissent pour l’instant penser,
malgré l’accroc sur la GPA.
Si elle fonctionne, elle fera
en tout cas des petits.
Trois ministres
interviendront lors du débat
risqué sur l’immigration
le 30 septembre prochain :
Christophe Castaner,
Jean-Yves Le Drian
et Agnès Buzyn.
ccornudet@lesechos.fr
Sur la bioéthique comme sur l’immigration,
les vrais dangers politiques se trouvent au sein
de la majorité, estime Emmanuel Macron.
Dessins Kim Roselier pour
« Les Echos »
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SANTÉ
Solveig Godeluck
@Solwii
Le reste à charge des patients fran-
çais e st tombé à son p lus bas histori-
que en 2018, à 7 % de la dépense
totale engagée, contre 7,5 % en 2017
et 7 ,7 % en 2016. Ce score dévoilé par
le rapport annuel sur la consom-
mation de soins et de biens médi-
caux, que publie le ministère de
la Santé mardi, est d’autant plus
remarquable que la France d étenait
déjà le record mondial en la
matière.
La diminution du reste à charge
continue depuis quelques années,
s’est accélérée l’an dernier à la suite
de la généralisation de la complé-
mentaire santé dans les entrepri-
ses, initiée en 2016. Tous les salariés
du privé, et par rebond leur famille,
bénéficient désormais d’une cou-
verture pour leurs frais non pris en
charge par l’assurance-maladie
obligatoire. Ils en ont profité p our s e
faire rembourser des soins dentai-
res et optiques onéreux. La partici-
pation des organismes complé-
mentaires au financement des
dépenses de soins a donc augmenté
de 0,3 point en un an, à 13,4 %.
Il s’agit cependant d’un épiphé-
nomène. La tendance de fond, c’est
l’augmentation d e la part de la Sécu-
rité s ociale, q ui s’accroît d e 0,2 p oint
semblés lors d’une assemblée géné-
rale à la Bourse du travail de Saint-
Denis mardi, ont voté en faveur de la
poursuite du mouvement.
La CGT a appelé à une manifesta-
tion ce mercredi ; FO et Solidaires,
plus tard dans le mois. Des actions
locales hôpital par hôpital sont pré-
vues le 26 septembre. « On cherche
une stratégie pour élargir le mou-
vement », explique au sortir de
l’assemblée générale Christophe
Prudhomme, porte-parole de
l’Association des médecins urgentis-
tes de France (Amuf). Des médecins
hospitaliers, des hôpitaux locaux et
un collectif de la psychiatrie ont déjà
rejoint la mobilisation. « Les déclara-
tions d’Agnès Buzyn ne répondent pas
à la demande de lits, d’effectifs et de
salaires. Et les 750 millions annoncés
hier ne sont pas des financements
nouveaux, mais des crédits réaffectés,
qui existaient déjà dans le plan Ma
santé 2022 », dénonce le syndica-
liste. A ce stade, le gouvernement
maintient de fait sa trajectoire de
progression des dépenses de santé, à
2,3 % en 2020, contre 2,5 % en 2019.
Réguler le secteur libéral
Il faudrait porter cette progression
à 5 % par an, revendique l’Amuf, et
supprimer la taxe sur les salaires
qui pèse sur les hôpitaux p ublics. Le
syndicat regrette aussi que le plan
Les urgentistes ne veulent pas met-
tre fin à leur grève, qui dure depuis
six mois et qui touche 250 sites,
soit presque la moitié des services
d’urgences publics. Le plan doté de
750 millions d’euros, annoncé lundi
par la ministre de la Santé, Agnès
Buzyn, ne les a pas convaincus. Les
grévistes du collectif Inter-Urgen-
ces et de plusieurs syndicats, ras-
Les mesures de la ministre
de la Santé n’ont pas
convaincu les grévistes
des services d’urgences,
qui réclament une augmen-
tation générale des moyens
consacrés à l’hôpital.
quels il faudrait ajouter 20 euros
d’optique, suivis par les médica-
ments (61 euros), loin devant l’hôpi-
tal (27 euros).
Une croissance contenue
des dépenses
Si la France se distingue par la prise
en charge publique élevée des soins,
elle reste au niveau de l’Allemagne
et un point au-dessus de la
moyenne européenne en termes de
poids des dépenses de santé dans le
PIB (11,3 %).
La croissance des d épenses a net-
tement freiné dans l’Hexagone
après la crise économique de 2008 :
son rythme annuel a été divisé par
deux entre la période 2006-2009 et
2009-2013, suivant une tendance
mondiale. Mais elle est restée
autour de 1,5 % par an en 2013-2017,
alors qu’elle redécollait partout
ailleurs en Europe.
Après une remontée de 2,1 % en
2017, la consommation totale de
soins et de biens médicaux n’a crû
que de 1,5 % en 2018, à 203,5 mil-
liards d’euros. Une modération qui
s’explique par la diminution des
volumes de soins, notamment à
l’hôpital.n
Dépenses de santé : le reste à
charge n’a jamais été aussi faible
ne mette pas fin à la liberté d’instal-
lation des médecins libéraux, afin
d’éviter des passages aux urgences.
Enfin, Christophe Prudhomme
critique vertement la principale
mesure annoncée, celle d’un service
d’accès aux soins cogéré par les
médecins hospitaliers du Samu et
les libéraux : « Chez moi en Seine-
Saint-Denis, on collabore déjà entre la
ville et l’hôpital depuis les années
1980! Ce qu’il faudrait, c’est que les
centres 15 de la régulation médicale
travaillent avec les p ompiers à l’échelle
du département », professe-t-il. Une
vision opposée à celle du syndicat,
Samu Urgences de France (SUdF),
qui a salué cette mesure. —S. G.
Les urgentistes en grève poursuivent le mouvement
en un an, et quasiment de 2,5 points
en dix ans, pour atteindre 78,1 %. Le
vieillissement de la population
entraîne la multiplication des mala-
dies chroniques, qui sont prises en
charge à 100 % par l’A ssurance-ma-
ladie lorsqu’elles entrent dans la
catégorie administrative des
« affections longue durée » (can-
cers, diabète, insuffisance rénale
chronique, etc.).
Depuis 2012, cette tendance à la
baisse du reste à charge des patients
n’est plus contrecarrée par des poli-
tiques de déremboursement
des soins et des médicaments.
Avec la mise en œuvre par étapes
entre 2019 et 2021 d’une offre de
« reste à charge zéro » pour les
prothèses dentaires, auditives
et optiques, elle devrait même
s’accélérer.
Chaque Français « coûte » en
moyenne 3.037 euros par an en
soins, mais ne débourse que
214 e uros. Sur cette d ernière
somme, les soins de ville sont le
poste le plus lourd (86 euros), aux-
lDe plus en plus bas, le débours
des patients est à 7 % de la dépense
totale engagée en 2018.
lLa montée des maladies chroniques
prises en charge à 100 % par l’Assu-
rance-maladie l’explique en partie.
Chaque Français
« coûte » en moyenne
3.037 euros par an
en soins,
mais ne débourse
que 214 euros.