Esprit Yoga — Mai-Juin 2017

(Rick Simeone) #1

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instantanément vers soi, vers le centre, dans cet état
sans pensée qu’il est si difficile d’atteindre dans la mé-
ditation? Sans forcément répondre ni au pourquoi, ni
au comment, nous allons expérimenter au fil des jours
et des moments passés avec les éléphantes, toute une
palette d’émotions, de sensations, de pensées. Chacune
va vivre ce qui va lui permettre de se délester ou de se
remplir, d’ajouter, d’équilibrer, d’harmoniser. « Chaque
éléphant fait vivre des choses différentes » explique So-
phie. Christine Pagnier Guillot, qui accompagne des sé-
jours d’ « Elephant Therapy » au Ganesha Park, résume
l’expérience de la façon suivante : « Vous ne compren-
drez pas les éléphants avec votre mental. Vous n’accé-
derez pas à leur sagesse en vous documentant sur eux.
Lâchez tous vos bouquins, toutes vos croyances et venez
les rencontrer vraiment. Allongez-vous à leur côté et tout
comme eux vivez intensément leur communion avec la
terre et l'eau. Ils apaiseront votre mental, pour que la vie
puisse s’écouler plus intensément en vous ». Et François
de confirmer le bien que les éléphants peuvent faire aux
humains. « C’est bon pour tout le monde d’être avec
les éléphants, mais c’est excellent notamment pour les
personnes malades, les non-voyants, les autistes, les per-
sonnes handicapées ».

rien de tel que l’expérience
Tous les matins, à l’aube, nous rejoignons notre salle de
yoga. C’est une « salle flottante », ouverte aux quatre
vents, installée sur un raft : une bonne manière de travail-
ler notre ancrage, tout en restant connectées à la fluidité
de l’eau! Depuis notre lieu de pratique, nous assistons
au lever du soleil et, avec l’aube, nous apercevons les
éléphants, au loin. La pratique débute toujours par une
longue méditation, suivie d’une séance de hatha yoga.
Après le petit-déjeuner, nous formons un cercle pour
nous rassembler et nous centrer avant de partir retrou-
ver les éléphantes, en silence. Cette rencontre du matin
est toujours un moment très fort. Sous nos pieds, nus,
la terre, rouge-orangé, nous permet de bien sentir nos

racines. « Imaginez vos jambes comme des pattes d’élé-
phant, puissantes, solides, indique Sophie. Installez-vous
dans votre bassin. Reliez-vous à la terre, à la terre-mère
et ouvrez votre cœur pour accueillir les éléphantes ». Les
premiers jours, mon cœur chaloupe dans ma poitrine.
J’ai l’impression qu’il fait le double de son volume habi-
tuel. Je sens mon ancrage instable. Il y a de l’appréhen-
sion, la confiance n’est pas totale. Je profite néanmoins
de chaque journée et de tous les moments, riches et
variés, qui les ponctuent : promenade et baignade dans
le lac, moments partagés avec les autres personnes du
groupe et avec la tribu du Ganesha Park, moment en solo
à ne rien faire, à dormir, à lire, à discuter avec mon amie
Laure qui participe au séjour avec moi.

accueillir la triSteSSe
En milieu de séjour, sans qu’il n’y ait de signe avant-cou-
reur, je ressens une immense et profonde tristesse au
moment où nous partons en balade avec les éléphantes.
Sans aller sur le dos d’aucune éléphante, je m’immerge
dans le lac à leurs côtés. C’est bon d’être dans l’eau.
Tout en sentant mon chagrin encore présent (alors que
j’avais l’espoir de le noyer dans le lac !), je me réjouis
de ce que les autres vivent, chacune avec son éléphante.
Moolé et Sylvie, notamment, ont l’air de beaucoup
s’amuser. De retour sur terre, la tristesse revient. Sur le
chemin du retour, Yani m’accueille sur son dos. Les émo-
tions s’amplifient, colère et tristesse mêlées, jusqu’à ce
que les larmes montent et s’écoulent. Je laisse faire. Et je
me sens parfaitement accompagnée, portée, supportée
par Yani. Je sens son énergie de « mère universelle ».
Elle accueille mon chagrin et semble me dire, « laisse cou-
ler, laisse s’écouler, laisse venir toutes ces émotions, dé-
pose-moi ton chagrin, je l’accueille... ». J’ai l’impression
d’entendre Amma susurrer à mon oreille « ma chérie, ma
chérie, ma chérie... » et je me sens reliée à cet amour in-
conditionnel de la figure maternelle. Au fil du chemin, les
larmes se tarissent. Je contacte très intensément l’éner-
gie de la mère et, par delà, l’énergie de la terre-mère,

pieds dans la terre, yeux clos, coeur
ouvert, nous attendons les éléphants

sophie en tête, nous cheminons (^) yoga du matin sur le raFt
vers les éléphants
séance mandalas pendant le séJour sophie et my linh avec yani anaïs en communication avec une éléphante

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