Le Monde - 08.11.2019

(Sean Pound) #1

0123
VENDREDI 8 NOVEMBRE 2019 international| 5


En Grèce, le crépuscule judiciaire d’Aube dorée


Le parti néonazi, dont le procès touche à sa fin, est accusé par la justice d’être une « organisation criminelle »


athènes ­ correspondance

A


près quatre ans et demi
de procédure, 350 té­
moignages et la compa­
rution de 69 accusés, le procès
du parti néonazi grec Aube dorée
touche à sa fin. Pour la première
fois depuis le début des audien­
ces, le 20 avril 2015, le chef de la
formation, Nikolaos « Nikos »
Michaloliakos, a franchi mer­
credi 6 novembre la porte de la
cour d’assises d’Athènes.
A son apparition, le climat s’est
tendu. Les membres et sympa­
thisants du parti ont chanté en
chœur « Sang, honneur, Aube do­
rée » (référence au « Sang et hon­
neur » scandé par les Jeunesses
hitlériennes). Les militants anti­
fascistes et familles des victimes
leur ont répondu « Assassins! »,
« Faites la peau aux nazis! » Pour­
suivi pour « direction d’une or­

ganisation criminelle » et divers
autres crimes, comme d’avoir
commandité le meurtre du rap­
peur antifasciste Pavlos Fyssas
en 2013, Nikolaos Michaloliakos
encourt jusqu’à vingt ans de pri­
son. Quelque 69 membres du
parti sont accusés d’avoir parti­
cipé à des chasses aux immigrés,
à la tentative d’homicide de qua­
tre pêcheurs égyptiens en 2012 et
à l’attaque, en 2013, de syndicalis­
tes communistes à Perama, ban­
lieue proche du Pirée.
Sans grande surprise, après
être arrivé, mercredi, d’un pas
nonchalant, le dirigeant de
61 ans, admirateur de la dictature
des colonels (1967­1974), s’est dit
« non coupable », et victime d’un
« complot politique ». « De quelle
organisation criminelle parle­
t­on? Nous sommes reconnus
comme un parti politique depuis
vingt­cinq ans! Nous avons des

bureaux, des numéros de télé­
phone, nous faisons des appari­
tions à la télévision, dans les jour­
naux », s’est­il exclamé, suscitant
l’exaspération de l’auditoire.
Apparue dans les années 1980,
Aube dorée n’est alors qu’un
groupuscule, agissant dans le
quartier défavorisé du centre
d’Athènes d’Agios Panteleimo­
nas. Il s’en prend d’abord aux op­
posants de gauche, aux syndica­
listes, puis trouve de nouveaux
boucs émissaires avec les immi­
grés. Ceux­ci commencent à
s’installer dans le quartier aban­
donné par les classes moyennes.

Une quasi-impunité
Services de sécurité pour les
commerçants grecs et les per­
sonnes âgées, soupes populaires
réservées aux Grecs... Le parti ga­
gne en popularité avec la crise
économique qui touche le pays à
partir de 2010. Deux ans plus
tard, Aube dorée obtient près de
7 % des voix aux élections légis­
latives et fait élire dix­huit dépu­
tés au Parlement. Son ascension

est préoccupante, alors que le
pays est placé sous perfusion du
Fonds monétaire international
et des pays de la zone euro.
« Entre 2010 et 2013, les immi­
grés étaient terrorisés et vivaient
dans la peur permanente d’être
agressés. Je recevais jusqu’à une
vingtaine de personnes par jour,
victimes de violence raciste au
centre d’Athènes », se rappelle le
Pakistanais Jawad Aslam, prési­
dent de l’Union des travailleurs
migrants en Grèce et témoin
dans le procès. Selon le réseau de
recensement des violences racis­
tes, 166 agressions contre les im­
migrés et réfugiés ont été enre­
gistrées en 2013, 74 en 2018.
Bénéficiant de contacts privilé­
giés dans la police et dans les
hautes administrations – l’an­
cien commissaire du quartier
d’Agios Panteleimonas est, lui
aussi, sur le banc des accusés –,
Aube dorée jouissait d’une quasi­
impunité jusqu’au meurtre de
Pavlos Fyssas, qui ébranle toute
la société grecque.
Aux dernières élections, le
7 juillet, qui voient la défaite du
premier ministre sortant Alexis
Tsipras (gauche radicale), le parti
néonazi n’arrive pas à dépasser
la barre des 3 % nécessaire pour
entrer au Parlement grec. Des
bureaux du parti ferment dans
plusieurs régions. Des ex­dépu­
tés et des militants claquent la
porte de la formation. « Le procès
a eu de l’importance dans le déli­
tement du parti, mais la bataille a
surtout été gagnée dans la so­
ciété, avec les manifestations ré­

currentes organisées par les mou­
vements antiracistes, les conseils
municipaux de plusieurs villes qui
leur ont interdit l’organisation de
meetings, les chaînes de télévi­
sion qui ont boycotté tous leurs
candidats pendant la campagne
électorale... », estime Thanassis
Kampagiannis, l’un des avocats
de la partie civile.
Pour ce dernier, « la violence or­
ganisée de ce parti, les sections
d’assaut mises en place pour
agresser les immigrés et les oppo­
sants de gauche ont été révélées
aux yeux de tout le monde. Ce
n’est pas la fin de l’extrême droite
mais certainement de ce type de
parti, très hiérarchisé, qui utilise
la violence ».

Portraits d’Hitler
Dans les appartements des diri­
geants perquisitionnés ont été
découverts des portraits d’Hitler,
des drapeaux de la Wehrmacht,
des enregistrements vidéo où les
membres chantaient des hym­
nes nazis ou participaient à des
ratonnades contre les migrants.

« C’est un procès historique non
seulement pour la Grèce mais
aussi pour toute l’Europe, note Fi­
lippa Chatzistavrou, professeure
assistante en sciences politiques
à l’université d’Athènes. Cepen­
dant, le parti est poursuivi en tant
qu’organisation criminelle et non
pour son idéologie, ce qui mal­
heureusement peut laisser penser
qu’un parti au même discours
mais aux pratiques assagies
pourrait réapparaître. »
D’ailleurs, l’eurodéputé Yannis
Lagos, l’ex­bras droit de Nikolaos
Michaloliakos, lui aussi pour­
suivi, devrait annoncer la créa­
tion d’un nouveau parti nationa­
liste le week­end prochain. Une
autre formation, Solution grec­
que, dirigée par Kyriakos Velo­
poulos, a fait élire dix députés
aux dernières élections, tout en
appelant à « déporter les immi­
grés sur des îles désertes ».
Devant le tribunal où se dérou­
lait, mercredi 6 novembre, une
manifestation organisée par les
mouvements antiracistes, Sta­
matis Chatzidimou, un retraité,
dit attendre avec impatience le
verdict du procès, espéré pour le
début 2020, mais s’émeut face
aux « violentes réactions qui sur­
gissent dans plusieurs villages de
Grèce où sont transférés les réfu­
giés depuis les îles ». Une inquié­
tude partagée par Filippa Chat­
zistavrou : « La situation ingéra­
ble dans les îles et l’absence de so­
lidarité européenne constituent
un cocktail explosif, favorable à
l’avancée de l’extrême droite. »
marina rafenberg

Selon le réseau
de recensement des
violences racistes,
166 agressions
contre les immigrés
et réfugiés ont été
enregistrées
en 2013, 74 en 2018

« C’est un procès
historique
pour la Grèce,
mais aussi pour
toute l’Europe »
FILIPPA CHATZISTAVROU
professeure de sciences
politiques à l’université
d’Athènes

Situation « intenable » pour les migrants


La Commission européenne a appelé la Grèce, mercredi 6 no-
vembre, à accélérer le traitement des demandes d’asile, quali-
fiant d’« intenable » la situation dans les camps confrontés à une
forte hausse des arrivées de migrants. Ce traitement prend des
mois, voire des années, selon des participants à une audition
au Parlement européen sur la mise en œuvre de l’accord contro-
versé conclu par l’Union européenne (UE) avec la Turquie,
en 2016, pour le contrôle des flux migratoires. « Nous avons de-
mandé au gouvernement d’avoir de meilleures procédures, une
évaluation des cas individuellement, mais d’avoir un système qui
marche », a déclaré la directrice générale du service migrations et
affaires intérieures de la Commission, Paraskevi Michou. Le di-
recteur de l’Agence des droits fondamentaux de l’UE, Michael
O’Flaherty, a souligné que « 30 000 migrants se trouvaient sur les
îles grecques dans des camps d’une capacité de 5 000 personnes ».

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