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VENDREDI 15 NOVEMBRE 2019 france| 11
Un pirate informatique face aux
géants de l’audiovisuel au tribunal
Nicolas T., 22 ans, a partagé illégalement les liens de millions de vidéos
besançon envoyée spéciale
I
l a pauvre allure, le pirate aux
deux millions de vidéos et
aux 259 000 liens de télé
chargement illégaux, dans la
lumière trop crue du tribunal
correctionnel de Besançon de
vant lequel il comparaît pour
« contrefaçon en bande organi
sée » et recel de ce délit. Un matin
d’avril, Nicolas T., 22 ans, a été
interpellé dans un petit village du
Doubs. Un signalement de l’Asso
ciation de lutte contre la piraterie
audiovisuelle (ALPA) avait permis
de l’identifier comme étant l’ad
ministrateur d’un réseau d’une
douzaine de sites d’hébergement
et de téléchargement, dont Speed
vid et Seriefr.eu, haut placés dans
la hiérarchie du piratage vidéo.
Dans la foulée, la police débar
quait à 6 heures du matin aux
domiciles des principaux fournis
seurs de liens sur le site. Du Doubs
à l’Hérault en passant par la Breta
gne, la « bande organisée » était
démantelée, les sociétés de pro
tection des droits d’auteur et les
géants de la production audiovi
suelle dépêchaient leurs avocats.
Mercredi 13 novembre, la prési
dente Sophie Fouché se délecte
en égrenant les noms des parties
civiles : la Sacem, Disney, Para
mount, Warner, 21st Century Fox,
Universal. Face à eux, outre Nico
las T., fils de maçon et étudiant en
master informatique à Besançon,
il y a Léa, fille d’agriculteurs, fraî
chement diplômée d’un BTS im
mobilier, Anthony, gestionnaire
d’un site de jeu, et Thomas, un
informaticien au corps de rugby
man et au visage poupin. A peine
90 ans à eux quatre.
« J’étais très seul en fait... »
Le premier est un garçon solitaire,
qui vit chez son père veuf et passe
depuis l’adolescence le plus clair
de son temps devant son ordina
teur. « Quand on lit le dossier, on
hallucine !, dit la présidente. Vous
ne sortez presque jamais de chez
vous. Et en deux ans, on n’a relevé
qu’une quinzaine de mouvements
sur votre compte bancaire! »
L’enquête a pourtant évalué à
196 000 euros le chiffre d’affaires
tiré de ses activités de piratage,
essentiellement lié aux bénéfices
publicitaires de ses sites, des
popup gérés par deux sociétés is
raélienne et espagnole. Mais l’es
sentiel de ces gains a été réinvesti
pour financer l’achat de serveurs
et d’hébergeurs, et le reste, envi
ron 30 000 euros, transformé en
bitcoins qui ont été saisis, grâce à
sa coopération avec les policiers.
Léa avait l’habitude de téléchar
ger gratuitement ses séries télévi
sées. Sur un des sites de streaming,
elle n’avait pas résisté à la fenêtre
alléchante qui lui promettait de
« make money » (faire de l’argent).
« J’ai cliqué, j’ai regardé, ça a
marché. Je copiaiscollais un lien de
téléchargement sur Speedvid, puis
je le recollais sur Seriefr.eu. Je venais
juste d’avoir mon bac, ça m’occu
pait. Je trouvais que c’était de
l’argent facile. » Avec les deux mille
liens qu’elle a fournis, elle a gagné
près de 4 400 euros, versés en
dollars via Paypal par Nicolas T.
L’activité d’« uploader » a rap
porté 2 000 euros à Thomas pen
dant ses études de BTS informati
que, 3 000 euros à Anthony, qui
trouvait là « un moyen d’arrondir
ses fins de mois » pendant que son
épouse poursuivait ses études de
chirurgie. Les uns et les autres ne
se connaissaient pas. « Pour moi,
ils étaient des ombres informati
ques », dit Nicolas T. Leur retour
au réel a été brutal. A la suspen
sion d’audience, les yeux de Nico
las T. s’embuent derrière ses lu
nettes : « J’aurais jamais pensé me
retrouver là un jour. Personne dans
mon entourage ne savait ce que je
faisais. J’étais très seul en fait... »
Face à cette « bande organisée »
aussi apeurée qu’une volée de
moineaux, la procureure Marga
ret Parietti requiert des peines
modérées : huit mois avec sursis
contre Nicolas T., de trois mois à
2 000 euros d’amende avec sursis
à l’encontre de ses coprévenus.
Mais l’enjeu est moins pénal que
civil. Les géants de la production
audiovisuelle ont fait leurs comp
tes. Dénonçant un « pillage orga
nisé », leurs avocats estiment leur
préjudice à « plusieurs centaines
de milliers d’euros ». Leurs deman
des seront examinées lors d’une
audience ultérieure. L’avocat de
Nicolas T. sollicite leur clémence :
« On a besoin de gens comme lui
dans la société. Par exemple pour
lutter contre la cybercriminalité... »
Délibéré le 15 janvier.
pascale robertdiard
L’enquête
a évalué à
196 000 euros le
chiffre d’affaires
tiré des activités
de piratage
de Nicolas T.
Ouverture d’une
enquête à la suite d’une
plainte contre Pierre Joxe
Une exemployée de l’ancien ministre
socialiste l’accuse de violences sexuelles
L
e parquet de Paris a ouvert
une enquête préliminaire,
mercredi 13 novembre, à la
suite de la plainte d’une femme
contre l’ancien ministre socialiste
Pierre Joxe pour des faits de
harcèlement sexuel et d’agres
sions sexuelles par personne
ayant autorité. Les investigations
ont été confiées à la 3e direction
de la police judiciaire.
Cette plainte, déposée mardi
par une ancienne assistante de
vie de l’épouse de M. Joxe, sur
vient à quelques jours d’une
audience prévue lundi 18 novem
bre, qui doit opposer l’exrespon
sable politique et Alexandra Bes
son. La 17e chambre civile du tri
bunal de Paris doit se prononcer
sur une procédure en diffama
tion initiée par M. Joxe, avocat au
barreau de Paris, 84 ans, après des
écrits de Mme Besson le mettant
en cause. Dans un post de blog
publié à l’automne 2017, la fille
d’Eric Besson, un autre ancien
ministre, l’avait en effet accusé
d’attouchements lors d’une re
présentation à l’Opéra Bastille,
en 2010, ce qu’il avait nié. Les avo
cats de cette dernière veulent
s’appuyer sur la déposition de la
nouvelle plaignante, prénommée
Ritha – elle ne souhaite pas que
son nom soit publié –, pour dé
fendre leur cliente.
Ritha dénonce des « attouche
ments sexuels répétés », entre avril
et juin 2018. Rencontré par Le
Monde, mardi, Pierre Joxe nie
tout comportement déplacé : « Je
ne me suis jamais livré à ce genre
de choses sur personne contre sa
volonté. » Il laisse entendre une
manipulation de la part de la
défense de Mme Besson.
Agée de 40 ans, Ritha a été l’assis
tante de vie de l’épouse de Pierre
Joxe, morte en janvier 2019. De
septembre 2017 à décembre 2018,
cette Haïtienne, arrivée au début
des années 2010 en région pari
sienne, a été employée pour s’oc
cuper de Laurence Fradin, atteinte
d’une maladie dégénérative.
« Il est prêt à tout »
Selon la plainte, un soir
d’avril 2018, M. Joxe l’a invitée « à
venir écouter dans le salon un
concert diffusé sur la chaîne
Mezzo. Immédiatement, il allon
gea sa tête sur les jambes de [Ri
tha] et lui intima “faismoi un
câlin” ». Auraient suivi d’autres
faits répétés et quotidiens. Ritha
affirme qu’il est arrivé à l’ancien
ministre de « passer derrière elle
en frottant tout son corps contre
elle », « de lui caresser les fesses, le
dos, le bas du dos et les épaules »,
ou encore de « tirer ou lever son
débardeur pour regarder sa
poitrine, son ventre ».
Une nuit de juin 2018, la plai
gnante rapporte que Pierre Joxe
est entré sans son autorisation
dans sa chambre et lui a « saisi de
force [le] visage avec sa main pour
l’embrasser de force en usant de sa
taille et de sa corpulence ». Malgré
ses protestations, il aurait réitéré
« ses assauts offensants et ses at
touchements à caractère sexuel »,
poussant finalement Ritha à se
mettre en arrêt de travail, le
2 juillet 2018. « J’étais très, très en
colère par rapport à ce monsieur.
On ne sait pas combien de person
nes, surtout des femmes étrangè
res comme moi, en situation
précaire, il a utilisées. Quand il
veut quelque chose, il l’obtient. Et
s’il ne l’obtient pas, il est prêt à
tout », relatetelle au Monde.
Le 28 juillet 2018, elle dépose
une main courante pour « attou
chements sexuels répétés de la
part du mari de [son] em
ployeuse », sans le nommer. En
décembre, avançant l’hospitalisa
tion de son épouse, M. Joxe noti
fie à Ritha son licenciement.
M. Joxe nie ces accusations
« baroques ». Durant les trois
dernières années de vie de son
épouse, ditil, « plus de dix » fem
mes se sont occupées d’elle,
parfois simultanément, et toutes,
hormis Ritha, le « remercient
encore ». L’ancien ministre évo
que « une espèce de rancœur » de
son ancienne employée, et es
time qu’« elle était jalouse de ses
collègues ». Enfin, il évoque l’hy
pothèse d’une manœuvre de la
défense d’Alexandra Besson : « En
face, s’ils ont manipulé cette fille,
ils seront face à leur conscience. »
Si Ritha a décidé de porter
plainte aujourd’hui, c’est, ditelle,
parce qu’elle ne souhaitait pas le
faire du temps du vivant de la
femme de M. Joxe, avec qui elle dit
avoir tissé des liens étroits.
yann bouchez et simon piel
É D U C AT I O N
Direction d’école :
annonce de premières
mesures
Un mois et demi après le sui
cide d’une directrice d’école
en SeineSaintDenis, le mi
nistère de l’éducation a an
noncé, mercredi 13 novem
bre, de premières mesures.
Une journée supplémentaire
de décharge est accordée aux
directeurs, sur la période de
novembre à décembre, ainsi
qu’un « moratoire » les dis
pensant de certaines démar
ches administratives.
J U S T I C E
Michel Fourniret et son
ex-femme en garde à vue
Le tueur en série Michel
Fourniret et son exfemme
Monique Olivier ont été pla
cés en garde à vue, mardi
12 novembre, soupçonnés
d’être impliqués dans la dis
parition d’une femme de
29 ans, Lydie Logé, en décem
bre 1993, à SaintChristophe
leJajolet (Orne). − (AFP.)
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