Les Echos - 18.10.2019

(Grace) #1

24 // ENTREPRISES Vendredi 18 et samedi 19 octobre 2019 Les Echos


mécénat


Martine Robert
@martiRD

Foncière et promoteur immo-
bilier, le Groupe Fiminco est
aussi un mécène de longue date
dans le spectacle vivant, avec en
particulier son soutien aux
actions de sensibilisation
menées par l’Orchestre de Paris
auprès des publics défavorisés.
Mais depuis qu’il a créé sa fon-
dation en janvier 2017, l e
Groupe détenu par Gérald
Azancot a passé la vitesse supé-
rieure et ouvre cette semaine
Komunuma, un pôle culturel
ambitieux à Romainville, au
service des artistes émergents.
Fiminco a investi une friche
industrielle, ancienne usine
pharmaceutique de Roussel-
Uclaf, à l’architecture typique
des années 1940, avec sa haute
cheminée et ses briques oran-
gées qui lui confèrent un petit
air de Tate Modern en banlieue
parisienne.

A deux pas du Paddock
Paris, un village de marques
avec 75 boutiques et une
dizaine de restaurants et cafés,
installé dans d’anciennes écu-
ries postales du XIXe siècle et
réalisé aussi par Fiminco,
Komunuma réunit des espaces
d’exposition, des galeries, des
ateliers d’artistes, et des parte-
naires institutionnels cultu-
rels. « A l’origine, nous voulions
réaliser des résidences d’artistes.
C’est en découvrant ce site que le
projet a été élaboré dans sa glo-
balité », explique Joachim
Pflieger, directeur général de la
Fondation Fiminco.
« Près d’une vingtaine de jeu-
nes artistes internationaux
sélectionnés parmi plus de
500 candidats vont bénéficier
d’un hébergement et d’un espace
de t ravail, mais aussi d’ateliers d e
création : menuiserie, sérigra-
phie, gravure, postproduction
vidéo et son... », p récise Joachim
Pflieger. Les dix premiers
talents arriveront en jan-
vier 2020, les suivants en juin.
Tous pourront exposer leur
travail sous la nef de 14 mètres
de haut de La Chaufferie et
échanger avec les galeries répu-
tées qui ont investi depuis lundi
des espaces de 120 à 900 mètres
carrés (Vincent Sator, In Situ

Fabienne Leclerc, Air de Paris,
Jocelyn Wolff), ainsi qu’avec
l’association Jeune Création,
justement chargée de promou-
voir la création contemporaine
émergente.

Jouer les synergies
Outre l’arrivée de la Parsons
School of Design, qui investira
900 mètres carrés à la rentrée
2020, le FRAC Ile-de-France
(Fonds régional d’art contem-
porain) installera à son tour ses
réserves visitables à l’automne
2020 et constituera un pôle
d’attraction supplémentaire.
Car le FRAC veut donner à voir
autrement sa collection, orga-
niser des actions de médiation
autour des œuvres et des
métiers de la conservation, res-
tauration et diffusion.
« Au total l’achat et la réhabili-
tation de ces constructions sur
11.000 mètres carrés représen-
tent un investissement de 18 mil-
lions d’euros, dont 2.000 mètres
carrés revendus 4,5 millions au
FRAC, qui a obtenu des finance-
ments du ministère de la Culture
et de la région pour cela », pour-
suit Joachim Pflieger. La fonda-
tion, elle, bénéficie d’un budget
de fonctionnement de 1,5 mil-
lion d’euros et d’une équipe de
7 personnes. Soit 15 % des effec-
tifs de cette entreprise, qui réa-
lise 52 millions d’euros de chif-
fre d’affaires.

Pour favoriser l’éclosion de
projets, les synergies entre les
divers acteurs du site seront
maximisées, d’autant qu’en 2021
d’autres locaux pourraient
accueillir des encadreurs,
imprimeurs, artisans d’art ou
galeries étrangères. Fiminco a
également installé sur place sa
filiale audiovisuelle Gingerle-
mon, spécialisée dans la culture.
Ce hub artistique pourra
aussi collaborer avec les nom-
breuses structures culturelles
voisines. Qu’e lles soient publi-
ques comme la Philharmonie,
le Centre national de la danse,
La Villette, la MC 93, les Ate-
liers Médicis Clichy-Montfer-
meil, le Centre national d es arts
plastiques. Ou privées, telle la
galerie Thaddaeus Ropac, Les
Arts C odés, l es a teliers H ermès,
La Manufacture Chanel, et sur-
tout les Magasins généraux : le
centre de création de BETC
organise sur 1.000 mètres car-
rés au sein du bâtiment des
années 1930, au bord du canal
de l’Ourcq, devenu le siège de
l’agence de publicité, des expo-
sitions prospectives et des rési-
dences artistiques, afin, là
encore, de révéler les scènes
prometteuses, en lien avec des
partenaires divers, comme der-
nièrement Tinder.n

Komunuma a installé ses espaces d’exposition
dans un bâtiment du XIXe siècle. Photo Axelle Poisson

ART


Avec Komunuma,
Fiminco ouvre cette semaine
un nouveau lieu majeur
pour l’art dans le Grand Paris.
Sa fondation s’y installe
aux côtés de galeries,
de résidences artistiques,
d’une école de design...

La Fondation Fiminco


inaugure son écosystème


culturel à Romainville


Vincent Collen
@VincentCollen


Les premiers navires propulsés au
gaz naturel liquéfié commencent à
prendre la mer, et Total entend en
profiter. Le pétrolier français, qui
est aussi numéro deux mondial du
GNL, annonce ce vendredi la mise à
l’eau de son premier navire avi-
tailleur, affrété auprès du japonais
Mitsui. Cette station-service flot-
tante pour les bateaux mesure
135 mètres de long. Elle est en cours


ÉNERGIE


Le premier navire
avitailleur de gaz
naturel liquéfié du
pétrolier français est
mis à l’eau ce vendredi.


Le GNL carburant
pour le transport
maritime, moins
polluant que le fioul
lourd, est appelé à
une forte croissance.


Deux ans plus tard, en sus de
Saint-Arnoult, l’entreprise a pro-
cédé à sa sixième installation, à
Egletons (Corrèze) pour dégivrer
une section de route de 120 mètres
en pente. « Nous avons une cinquan-
taine de projets à l’étude, avec des
clients souvent publics ou semi-pu-
blics comme les organismes HLM,
mais aussi des clients privés », indi-
que le directeur technique d’Euro-
via, Ivan Drouadaine.

Fluide transportant
la chaleur
Techniquement, le système com-
mence à se roder. « Nous avons fina-
lisé en juillet 2018 le démonstrateur
de Saint-Arnoult. Un an de fonction-
nement, sur quatre saisons, montre
que le système se recharge en chaleur
rapidement en cas de journée enso-
leillée », poursuit le dirigeant.
Le principe est similaire au sol
chauffant : sous la chaussée, dans
un serpentin de tubes circule un
fluide transportant la chaleur.
Power Road peut l’amener depuis
un réseau de chaleur local pour
déneiger la zone souhaitée, comme
à Egletons, ou capter sur place le
rayonnement solaire sur le bitume
comme à Feurs (Loire). Cette com-

Myriam Chauvot
[email protected]


On peut combattre les îlots de cha-
leur créés par le soleil tapant sur le
bitume, ou en tirer parti. Pour
preuve, la « route chauffante » fait
son chemin. Elle capte la chaleur du
bitume pour la restituer ailleurs ou
plus tard, pour déneiger par exem-
ple. Eurovia, la filiale routière de
Vinci, a lancé la commercialisation
de cette route innovante il y a deux
ans avec la marque Power Road. Un
démonstrateur a été réalisé sur
l’aire de poids lourds du péage de
Saint-Arnoult (Yvelines), sur l’A10,
où 500 mètres carrés de parking
s’autodéneigent et chauffent le bâti-
ment adjacent.


BTP


Power Road, la route
innovante d’Eurovia,
peut capter la chaleur
du soleil sur le bitume
pour l’utiliser ailleurs,
voire plus tard,
et chauffer la route
pour la déneiger.


de construction dans un chantier
naval près de S hanghai et sera livrée
l’an prochain. Total prévoit de la
positionner à Rotterdam mais elle
pourra se déplacer jusqu’à Anvers,
Zeebruge, voire Le Havre.
Cette station-service spéciale
approvisionnera en particulier les
neuf futurs porte-conteneurs
géants de l’armateur marseillais
CMA CGM assurant la liaison entre
l’Europe et l’Asie, à raison de
300.000 tonnes par an. Le premier
d’entre eux, baptisé « Jacques
Saadé » (en mémoire du fondateur
de CMA CGM décédé l’an dernier),
comprendra un réservoir capable
de stocker plus de 18.000 mètres
cubes de GNL, l’équivalent de sept
piscines olympiques. Total prévoit
d’annoncer d’autres contrats de ce
type a u cours des prochaines semai-
nes, qui nécessiteront l a livraison de
plusieurs navires avitailleurs.

Nouvelles normes d’émission
Encore balbutiant, le marché du
GNL carburant pour le transport
maritime est appelé à se développer
parce qu’il est beaucoup moins pol-
luant que le fioul lourd, le carburant

standard massivement utilisé
aujourd’hui. Il émet 99 % de souffre
et de particules fines en moins. Le
bilan carbone est également avan-
tageux par rapport au fioul lourd
(20 % de gaz à effet de serre en
moins), même s’il s’agit également
d’une énergie fossile.
De nouvelles normes environne-
mentales édictées par l’Organisa-
tion maritime internationale vont
entrer en vigueur le 1er janvier pro-
chain. Elles contraignent tous les
navires du monde à réduire la
teneur de leurs émissions en soufre
à 0,5 %, bien en-dessous de la limite
de 3,5 % en vigueur actuellement.
Naviguer au GNL n’est pas la seule
solution pour y parvenir. La plus
courante, beaucoup moins coû-
teuse, est d’installer un équipe-
ment qui traite les fumées issues de
la combustion. Des milliers de
navires sont en train d’être adaptés
en ce sens. Les armateurs peuvent
aussi opter pour un fioul moins
riche en soufre ou pour le gazole
marin.
Le GNL nécessite une adapta-
tion coûteuse des navires, ce qui
explique que cette solution con-

cernera essentiellement les nou-
velles flottes et qu’elle restera très
minoritaire, vu la durée de vie des
vaisseaux. Même pour un bateau
neuf, le surcoût est évalué par
CMA CGM entre 15 et 20 %, sans
parler de la nécessité de mettre
en place une nouvelle chaîne
d’approvisionnement.
Total prévoit tout de même q ue le
marché mondial atteindra le mil-
lion de tonnes dès l’an prochain et
10 millions en 2025. Un marché de
niche à l’échelle de l’ensemble des
volumes de GNL consommés, qui
atteindraient 450 millions de ton-
nes à cette date.

Relais de croissance
pour GTT
Ce marché émergent est aussi un
relais de croissance pour GTT, une
petite société française qui com-
mercialise des cuves pour les navi-
res transportant du gaz liquéfié.
GTT a remporté des contrats pour
15 porte-conteneurs carburant au
GNL, dont les neuf de CMA CGM,
un navire de croisière pour la com-
pagnie Le Ponant et trois navires
avitailleurs, dont celui de Total.n

Total lance une station-service


flottante pour les navires au gaz


La route chauffante fait son chemin


coût actuel des énergies fossiles,
estime Eurovia.

Taxiway chauffant
Power Road a signé sa plus grosse
opération à ce stade avec Inolya, un
bailleur social du Calvados : à Fleu-
ry-sur-Orne, 1.420 mètres carrés de
voiries assurent 75 % du chauffage
et de l’eau chaude sanitaire de
61 logements sociaux. La taille des
opérations devrait g randir. Un c lient
envisage ainsi le dispositif pour
assurer de 30 à 50 % du mix énergé-
tique d’un écoquartier de 500 loge-
ments, avec commerces et écoles.
« Le chauffage de bâtiments est
l’usage privilégié par la majorité des
clients. Il représente les deux tiers de
la cinquantaine de projets à l’étude
actuellement », précise Ivan Droua-
daine. Pour un tiers, l’objectif est de
dégivrer une infrastructure afin
d’assurer sa viabilité hivernale. Ce
peut être des routes « mais aussi,
par exemple, l’équipement d’un
taxiway sur une zone aéroportuaire.
Le système de tubes est s uffisamment
protégé, en étant sous la chaussée,
pour être compatible avec des trafics
intenses, aéroportuaires ou autorou-
tiers », indique le directeur techni-
que d’Eurovia.n

Le « Jacques Saadé » est le premier navire d’une commande faite par la CMA CGM de neuf porte-conteneurs géants fonctionnant au GNL.
Ils assureront la liaison entre l’Europe et l’Asie. Photo Total


mune a équipé 750 mètres c arrés de
parking afin de préchauffer l’eau de
la piscine voisine.
La chaleur peut être stockée
dans un puit géothermique, dans
lequel puise une pompe à chaleur
pour chauffer un bâtiment ou la
route en hiver. « La chaleur captée
peut être stockée jusqu’à six mois,
pour être restituée en période hiver-
nale », explique Ivan Drouadaine.
Le stockage, qui « ne nécessite qua-
siment aucune énergie », renchérit
en revanche le coût de l’installa-
tion. L a quasi-gratuité de la chaleur
fournie p ermet un retour sur inves-
tissement en quinze à vingt ans au

« La chaleur
captée peut être
stockée jusqu’à
six mois, pour
être restituée
en période
hivernale. »
IVAN DROUADAINE
Directeur technique d’Eurovia
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