Les Echos - 18.10.2019

(Grace) #1

26 // HIGH-TECH & MEDIAS Vendredi 18 et samedi 19 octobre 2019 Les Echos


Arnaud Lagardère obligé de publier
les comptes de son holding

MÉDIAS Le tribunal de commerce de Paris a enjoint mercredi
Arnaud Lagardère, patron du groupe qui porte son nom (Relay,
Europe 1, « Paris Match », « Journal du dimanche »...), à déposer
les comptes annuels de Lagardère Capital & Management, son
holding personnel. L’intéressé doit s’exécuter « dans les huit jours
de la signification de la présente ordonnance ». Le tribunal avait été
saisi p ar le fonds activiste A mber Capital, qui détient 5 % de Lagar-
dère et mène campagne pour en améliorer les performances.

à suivre


Eric Piermont/AFP

Netflix engrange des


abonnés avant la grande


bataille du streaming


l La plate-forme renoue avec la croissance


sur le marché américain, avec 520.000 nouveaux clients


au troisième trimestre.


lLe rythme est toutefois moins dynamique que ce qu’elle


prévoyait, un effet lié à la hausse de prix, mais aussi peut-


être à l’attentisme des consommateurs avant le lancement


des offres de Disney, Apple, Amazon et WarnerMedia.


à la télévision linéaire », note Netflix
dans une volonté d’élargir le débat
au temps passé par les consomma-
teurs sur les écrans. Evoquant de
possibles « vents contraires modestes
à court terme », la plate-forme indi-
que avoir « essayé d’en tenir compte »
dans ses prévisions. Elle table sur
600.000 nouveaux abonnés sur le
marché américain au quatrième tri-
mestre, et 7 millions de comptes
supplémentaires à l’étranger.
Sur l’ensemble de ses marchés,
Netflix a fait signer 6,8 millions de
nouveaux abonnés au troisième tri-
mestre, portant son portefeuille à
158,3 millions de clients (+21,4 % sur
un an). Au total, hausse des prix et
nouveaux abonnés lui ont permis
de hisser son chiffre d’affaires à
14,7 milliards de dollars sur les
neuf premiers mois de l’année, soit
un gain de 26 % sur un an. Le résul-
tat net a, lui aussi, progressé, à
1,28 milliard (+19 %).

Produire en langue
étrangère
La quête de contenus – avec 15 mil-
liards de dollars de budget cette
année – reste la clef du développe-
ment de son portefeuille. Parmi les
locomotives du trimestre écoulé, la
saison 3 de « Stranger Things » a été
visionnée par 64 millions de foyers
durant les quatre premières semai-
nes de diffusion. L’entreprise cali-
fornienne souligne aussi l’enjeu de
produire des contenus en langue
non anglaise, comme elle l ’a f ait avec
« La Casa de Papel » en espagnol
ou « Sintonia » en portugais pour
le marché brésilien. Au dernier tri-
mestre, Netflix prévoit la mise en
ligne de films portés par des têtes
d’affiche comme « The Irishman »
(de Martin Scorsese et avec Robert
De Niro) ou « Marriage Story » (avec
Scarlett Johansson).
Pour résister à la concurrence,
Netflix mise aussi sur les offres grou-
pées, comme il l’a fait en France avec
Canal+, ou sur les offres sur télépho-
nie mobile, comme il l’a testé en Inde.
Il vise une amélioration de sa marge
opérationnelle (espérée à 13 % cette
année) de 3 points l’an prochain.n

Dans le cadre du tradition-
nel CEO Talk, coorganisé mer-
credi par « Livres Hebdo » avec
« Publishers Weekly » ( Etats-Unis),
« Bookdao » (Chine), « Buchre-
port » (Allemagne) et « Publish-
News » (Brésil), Kelly Luegenbiehl,
la vice-présidente de Netflix, char-
gée de la création internationale,
a voulu rassurer les éditeurs de ses
« bonnes intentions ».

« Donner une nouvelle
opportunité aux livres »
D’entrée de jeu, elle a révélé ainsi
trois projets, avec l’adaptation en
turc du best-seller d’Elif Shafak,
« Soufi mon amour », publié
en 2010 en France chez Phébus,
ainsi que la mise en production
de l’adaptation de « Anxious
People » du suédois Fredrik
Backman et celle de « Tyll » de
l’allemand Daniel Kehlmann,
que publiera bientôt Actes Sud.
Mais surtout, Kelly Luegenbiehl
a tenu à mettre les points sur les

rateur de la rencontre, Rüdiger
Wischenbart : « Le développement
de contenus de Netflix représente
trois fois le chiffre d’affaires d’un
groupe éditorial comme Penguin
Random House. »
Mercredi soir, à l’occasion du
cocktail d’ouverture, Vincent
Montagne, président du SNE
(Syndicat national de l’édition), a
rappelé les chiffres qui fâchent :
en 2018, le chiffre d’affaires du
secteur de l’édition française a
baissé de 4,4 % : « Nous sommes
confrontés à une mutation technolo-
gique très complexe et à un monde
qui change », a-t-il constaté.
D’où des prises de position de
plus e n plus p ragmatiques.
« Aujourd’hui, nous éditons des
textes qui sont autant de contenus
et nous devons réfléchir aux moyens
de les diffuser : adaptations par les
plates-formes, podcasts, ventes de
droits aux boîtes de production,
livres audio... » estime un grand
éditeur.n

Au mondial du livre, la plate-forme


veut séduire et rassurer les éditeurs


Véronique Richebois
@VRichebois
— Envoyée spéciale à Francfort
(Allemagne)

L’année dernière, son nom circu-
lait encore à voix basse, sans que
l’on sache exactement s’il serait le
sauveteur d’un secteur fragilisé...
ou celui qui lui porterait le dernier
coup de poignard. Cette année,
Netflix a choisi de sortir de l’ombre
en prenant la parole, mercredi,
pour la première fois, à la 71e édi-
tion de la Foire du livre de Franc-
fort, la plus grande manifestation
mondiale de l’é dition, déclinée
du 16 au 20 octobre.

Le géant américain a pris
la parole pour la première
fois à Francfort, la plus
importante manifestation
mondiale du livre.
Il prévoit d’adapter
plusieurs livres pour
sa plate-forme de SVoD.

« i ». « Nous ne voyons pas les édi-
teurs comme les parents pauvres
mais comme des partenaires. Nous
ne sommes pas en compétition, n ous
essayons tout simplement de don-
ner une nouvelle opportunité aux
livres, de leur redonner vie d’une
autre manière. » Un discours qui
n’est pas sans rappeler celui
des Gafa à l’é gard de plusieurs
autres industries.
C’est un fait : les plates-formes
ont besoin de contenus et les édi-
teurs cherchent de nouvelles voies
pour attirer le grand public vers
les textes littéraires. A cette aune,
Netflix fait figure de candidat pri-
vilégié. C omme l’a rappelé le modé-


  • 4 , 4 %


LA BAISSE
du chiffre d’affaires du secteur
de l’édition française en 2018.

Véronique Le Billon
@VLeBillon
— Bureau de New York


Veillée d’armes sur le marché de la
vidéo par Internet aux Etats-Unis.
Au troisième trimestre, Netflix a
engrangé 520.000 nouveaux abon-
nés à son catalogue de films et de
séries en ligne sur le marché améri-
cain, selon ses résultats publiés
mercredi. C’est beaucoup mieux
qu’au deuxième trimestre, où la
plate-forme de streaming vidéo
avait enregistré une perte nette de
130.000 abonnés, mais c’est moins
bien que prévu – la plate-forme
misait sur 800.000 nouveaux
clients. Sur les neuf premiers mois
de l’année, Netflix, qui compte
désormais 60 millions de clients
aux Etats-Unis, a recruté 2,1 millions
d’abonnés nets supplémentaires,
contre 4,1 millions sur la même
période l’an dernier.


La hausse d es prix pour s’abonner
à ses services a pesé, estime Netflix.
Mais les consommateurs attendent
aussi probablement la concur-
rence : Disney, A pple, WarnerMedia
(HBO Max) et Amazon sont sur le
point de lancer leur service, et par-
fois à des prix beaucoup plus attrac-
tifs. Ils ont aussi commencé à annon-
cer le rapatriement sur leurs plates-
formes de séries phares, comme
« Friends » ou « The Office »,
jusqu’ici diffusées sur Netflix.


Chiffre d’affaires en hausse
« L’arrivée prochaine de services tels
que Disney+, Apple TV+, HBO Max et
Peacock accroît la concurrence, mais
nous sommes tous petits par rapport


AUDIOVISUEL


Pour résister à la


concurrence, Netflix


mise sur les offres


groupées, comme en


France avec Canal+.


A l’origine, les trois maisons
mères évoquaient un financement
de 45 millions d’euros sur trois ans.
Un montant jugé très faible par le
marché face aux milliards qu’inves-
tissent Netflix ou Amazon. Mani-
festement, les trois partenaires de
Salto ont fini par se rendre à l’évi-
dence. « Il est de plus en plus impor-
tant pour les groupes d’investir dans
ce marché, pour accompagner les
nouveaux usages. Cette rallonge
montre qu’ils y croient vraiment,
et qu’il y a un espace face aux Amé-
ricains », indique un bon connais-
seur du sujet.

250 millions dans
les contenus audiovisuels
Cet investissement de 135 millions
sur trois a ns, partagé e n parts égales
entre les trois groupes, permettra
de financer le lancement de la plate-
forme avec tous les coûts que sup-
pose la création d’une société : mar-

keting, location de locaux, licence
pour la technologie développée par
M6, etc., mais aussi les acquisitions
de programmes.
L’effort sur les contenus audiovi-
suels ne se limitera d’ailleurs pas
aux moyens donnés par les action-
naires. La plate-forme prévoit
d’investir au total 250 millions
d’euros, toujours sur trois ans,
financés sur les recettes qu’elle
compte générer d ans l e futur. « Or, i l
y aura beaucoup de programmes ori-
ginaux », insiste la même source
citée plus haut. Pas uniquement des
acquisitions de droits SVoD de pro-
grammes existants, donc.
Surtout, Salto va s’appuyer sur les
catalogues de ses maisons mères,
qui dépensent ensemble environ
3 milliards dans les contenus cha-
que année. Même si l’Autorité de la
concurrence a imposé des limita-
tions sur l’approvisionnement via
ses actionnaires, la plate-forme

espère faire de cet accès privilégié à
la création française sa force face
aux géants du streaming.
Cependant Salto ne joue pas dans
la même catégorie que les géants
américains de la SVoD. C’est proba-
blement pour cette raison que la
plate-forme préfère aujourd’hui se
présenter comme un service de
SVoD de complément, plutôt qu’un
concurrent direct des Netflix, HBO
et consorts.
Piloté par Thomas Follin (un
ancien de M6), Salto prévoit de se
lancer dans l’Hexagone au premier
trimestre 2020. D’ici là, la plate-
forme doit peaufiner ses offres
d’abonnement, l’une autour de
2 euros par mois, l ’autre, e nrichie e n
programmes, à environ 7 euros. Et
faire en sorte que ses programmes
soient suffisamment attrayants
pour gagner son pari d’attirer en
nombre les aficionados de la créa-
tion française.n

Les actionnaires de Salto revoient


leurs ambitions à la hausse


Marina Alcaraz
@marina_alcaraz


Face à l’offensive mondiale des
géants américains Disney, Ama-
zon, Apple ou encore Warner-HBO,
qui débarquent en force dans la
vidéo à la demande par abonne-
ment, Salto, le « petit » français du
secteur, veut parvenir à se faire une
place. Ses trois actionnaires, France
Télévisions, TF1 et M6, qui tra-
vaillent activement au développe-
ment du projet, viennent ainsi de
décider de tripler leurs investisse-
ments à 135 millions d’euros par
rapport aux estimations initiales,
comme l’a révélé « La Lettre A ».


TF1, France Télévisions
et M6, unis derrière la
plate-forme de SVoD Salto,
vont tripler leurs investisse-
ments par rapport
aux ambitions initiales.


« L’arrivée
prochaine
de services tels
que Disney+,
Apple TV+,
HBO Max
et Peacock accroît
la concurrence,
mais nous sommes
tous petits
par rapport
à la télévision
linéaire. »
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