Les Echos - 18.10.2019

(Grace) #1

Les Echos Vendredi 18 et samedi 19 octobre 2019 FINANCE & MARCHES// 33


création de l’établissement.
Alors qu’il affichait environ
80 demandes d’ouverture par
mois, sa banque en a reçu pas
moins de 400 pour le seul mois
d’août, dont l’immense majo-
rité en provenance de Hong-
kongais.

Un signal inquiétant
Cette situation a poussé cer-
tains dirigeants d’établisse-
ments à informer la cheffe de
l’exécutif local, C arrie Lam, d ’un
risque réel de fuite des capitaux
privés. Un signal inquiétant
pour la première place finan-
cière asiatique, où la montée
des tensions a déjà fait flancher
le PIB de 0,4 % au deuxième tri-
mestre 2019.
L’exode des capitaux n’a tou-
tefois rien de dramatique pour
le moment, remarque le quoti-
dien britannique. Peu de cash
semble avoir quitté les caisses
du territoire, les résidents se
contentant de se renseigner et
d’ouvrir des comptes pour
s’offrir une sécurité si la crise
politique devait s’éterniser.
Tout en refusant catégori-
quement d’accéder aux reven-
dications politiques des mani-
festants, Carrie Lam a annoncé
mercredi une série de mesures
économiques pour d ésamorcer
la crise. Parmi elles, la construc-
tion de 10.000 appartements,
l’assouplissement en matière
de prêt pour les primo-accé-
dants, ainsi que de nouvelles
subventions accordées aux
familles à faible revenu. Sur le
terrain politique, en revanche,
elle n’a rien lâché.n

Lucas Mediavilla
@Lucas_Medv

Alors que la crise sociale s’éter-
nise à Hong Kong, le territoire
semi-autonome fait face à
l’inquiétude grandissante de
ses résidents les plus fortunés.
Depuis plusieurs semaines, des
milliers d’entre eux ouvrent des
comptes bancaires dans diffé-
rents centres financiers de la
région, dans la perspective de
pouvoir y transférer leurs capi-
taux si la situation s’aggravait
encore à Hong Kong. Les ban-
ques européennes UBS, HSBC,
Pictet et Credit Suisse, implan-
tées s ur le territoire, voient a insi
actuellement grimper en flèche
le nombre d’ouvertures de
comptes, selon le « Financial
Times ». Même son de cloche
dans la cité-Etat de Singapour,
où le responsable d’une banque
note qu’il y a eu plus d’ouvertu-
res émanant de résidents hong-
kongais au cours des trois der-
niers mois que depuis la

BANQUE


Les ouvertures de
comptes bancaires
à Singapour et dans
la région asiatique
grimpent en flèche.

La cheffe de l’exécu-
tif de Hong Kong,
Carrie Lam, a
promis des mesures
sociales pour
désamorcer la crise.

Hong Kong : la fuite de


capitaux des résidents


fortunés menace


Retrouvez-nous sur :
ey.com/fr /eoy |youtube .com/c/EYFranceOfficiel |#EOYFR

©2019EY&Associés-Tousdroit sréservés.1902BMC167-36.

LelauréatduPrixdel’Entrepreneurdel’Année2019est:


ChristianROULLEAU,Samsic


LelauréatduPrixdelaStart-Updel’Année2019est:


ThomasREBAUD,Meero


En partenariatavec : Avec lesoutie nde:

Romain Gueugneau
et Raphaël Bloch


La publicité est immédiatement
devenue virale. Il faut dire que
Boursorama avait mis les moyens.
Pour sa dernière campagne, la ban-
que en ligne s’est offert les services
de la superstar Brad Pitt. Dans le
spot, on voit l’acteur hollywoodien
déambuler dans les rues de New
York, faire ses achats, retirer de
l’argent au distributeur ou encore
consulter son application bancaire.
En misant sur l’un des acteurs les
plus « bankables » du moment, la
filiale de Société Générale espère
une chose : gagner en visibilité et
surtout retrouver son image de
pionnière.
Après avoir prospéré sur le
thème de la disruption face aux
banques traditionnelles, les ban-
ques e n ligne, dont l a plupart appar-
tiennent aujourd’hui à des grands
groupes, sont à leur tour menacées
de disruption. Revolut, Orange
Bank et N26, qui séduisent de nou-
veaux clients avec des cartes gratui-
tes et d es f rais limités, leur prennent
des parts de marché. Coincés entre
les banques traditionnelles et ces
nouveaux entrants, les acteurs
comme Boursorama, ING, Fortu-
neo (filiale d’Arkéa) ou Hello bank!
(filiale de BNP Paribas) veulent
montrer qu’ils ont encore leur
place. Et peuvent séduire une
palette plus jeune et plus large de
clients que les actifs urbains âgés de
30 à 45 ans, qui constituent leur
fonds de commerce. Pour éviter de
se faire dépasser, les banques en
ligne multiplient les initiatives


BANQUE


Stars des années 200 0,
Boursorama, ING et
ses concurrents sont
ringardisés par l’arri-
vée des « néobanques »
comme Revolut
ou N26, plébiscitées
par les jeunes.


Elles multiplient les
offres, mais davantage
pour retenir
des clients que
pour en conquérir
de nouveaux.


cureurs suisses. Les grands négo-
ciants se sont démenés ces dernières
années pour changer leur image,
et devenir plus transparents.
Le patron de Gunvor, Torbjörn
Törnqvist, reconnaît que durant la
période sous e nquête, le programme
de « compliance » (conformité) de la
société était « effectivement inadé-
quat ». C’est « regrettable », dit-il,
mais « grâce à des efforts continus »,
Gunvor a aujourd’hui un service de
conformité et de déontologie « de
premier ordre ». Les employés doi-
vent régulièrement suivre des for-
mations « afin de faire respecter ces
principes de déontologie », explique le
dirigeant dans un communi-
qué. Gunvor assure aussi avoir
réduit d’un tiers le nombre d’agents
auxquels il fait appel. Le Ministère
public note que la société genevoise a
pris conscience de la gravité des faits
et souligne « l’amélioration progres-
sive » de l’organisation du trader en
matière de lutte contre la corruption
depuis 2012. L’ONG suisse Public Eye
regrette, pour sa part, que « Torbjörn
Törnqvist, fondateur et actionnaire à
64 % du groupe, et plusieurs hauts
cadres de la société s’en tirent néan-
moins à bon compte », et appelle les
autorités fédérales à réguler « ce sec-
teur à haut risque ».n

Muryel Jacque
@MuryelJacque


Rarement une entreprise n’aura été
si lourdement sanctionnée par les
autorités suisses. Gunvor, un des
plus grands négociants indépen-
dants de pétrole, vient d’être reconnu
coupable pénalement dans une
affaire de corruption, et devra payer
94 millions de francs suisses (soit
environ 85,5 millions d’euros). Cette
condamnation clôt une enquête
ouverte il y a huit ans. « En raison de
graves défaillances dans son organisa-
tion interne, le négociant pétrolier n’a
pas empêché, entre 2008 et 2011, la cor-


MATIÈRES
PREMIÈRES


Pour accéder à des
marchés pétroliers
en Afrique, le négo-
ciant a eu recours
à des intermédiaires
jugés douteux
entre 2008 et 2011.


Gunvor doit verser
94 millions de francs
suisses.


Gunvor condamné par la Suisse


dans une affaire de corruption


ruption d’agents publics de la Républi-
que du Congo et de Côte d’Ivoire, [...]
corruption qui avait pour but l’acces-
sion aux marchés pétroliers desdits
pays », relate le Ministère p ublic de la
Confédération. Il est reproché à Gun-
vor de n’avoir « rien entrepris au
niveau de son organisation », à cette
époque, afin de lutter contre la cor-

ruption : pas de code de conduite,
pas de règles de conformité, pas
d’audit ni de formation internes,
détaillent les autorités. Elles en ont
conclu que le risque de corruption
« était alors accepté par Gunvor ». Du
Brésil aux Etats-Unis, les pratiques
des géants du trading de matières
premières sont dans le viseur des
régulateurs depuis longtemps. Le
recours à des agents est également
sous le feu des critiques. Gunvor en a
utilisé par exemple pour obtenir des
cargaisons de pétrole, selon les pro-

Les pratiques des
géants du trading de
matières premières
sont dans le viseur
des régulateurs
depuis longtemps.

HSBC prêt à cesser le courtage actions


BANQUE Selon Bloomberg, les activités de courtage d’actions
feraient les frais du plan de restructuration géant de HSBC. Des
équipes basées aux Etats-Unis, en Allemagne, au Royaume-Uni
mais aussi en France seraient menacées. La division actions de
HSBC a réalisé un chiffre d’affaires de 1,2 milliard de dollars l’an
dernier, soit près de quatre fois moins que l’activité taux, changes
et matières premières.

en bref


commerciales. Le néerlandais ING
a lancé la semaine dernière une
offre de compte courant associé à
une carte MasterCard gratuite.
Sans découvert autorisé et sans
frais de compte, elle est plutôt desti-
née aux jeunes, et complète l’offre
existante, plus haut de gamme.

Devenir rentables
Quelques jours plus tôt, c’était For-
tu neo qui sonnait la charge avec le
lancement de Fosfo, une offre sans
frais de tenue de compte, sans con-
dition de revenus, et avec une carte
sans frais sur les paiements à
l’étranger. Les deux marques imi-
tent ainsi Boursorama et sa carte
Ultim, qui a déjà conquis plus de
125.000 clients depuis son lance-
ment fin juin.
Obligées de réagir face à l’offen-
sive des « néo », les banques en
ligne sont aussi contraintes de faire
évoluer l eur modèle p our gagner e n
rentabilité. A quelques rares excep-
tions près (dont Fortuneo), la majo-
rité d es acteurs n e gagne pas
d’argent, comme le rappelait fin
2018 l’ACPR dans un rapport. Mal-
gré les récentes initiatives commer-
ciales, l’heure n’est plus à la seule
conquête, mais à la conversion de la

clientèle existante en clients plus
engagés, donc plus rentables.
C’est la stratégie a doptée p ar I NG,
qui compte environ un million de
clients en France, dont un quart en
« relation principale ». « La trans-
formation de notre portefeuille de
clients nous permet de pérenniser
notre modèle, notamment dans un
environnement de taux bas », indi-
que Frédéric Niel, directeur de la
banque de détail d’ING en France.
L’objectif : réduire la dépendance
aux revenus liés aux dépôts, qui
sont passés de 70 % en 2016 à 40 %
du chiffre d’affaires total en 2019. Le
groupe vient d’élargir sa gamme de
fonds d’assurance-vie, avec des thé-

matiques comme l’immobilier ou
la tech. Typiquement le genre
d’offres que proposent les banques
traditionnelles. Et qui pourrait inci-
ter des clients existants à faire de
ING leur établissement principal.
Même son de cloche du côté de
Boursorama, qui vient de franchir
le cap des 2 millions de clients, et
vise les 3 millions pour 2021. « Le
rythme de conquête reste soutenu et
en plus de l’acquisition nous avons
un objectif d’intensification de la
relation client », explique Aurore
Gaspar, directrice générale
adjointe. La banque mise notam-
ment sur le développement de sa
gamme de produits financiers
(assurance-vie, crédit immobi-
lier...). Mais la transformation ne
sera pas si simple. « Les banques en
ligne doivent réussir à passer du tout
gratuit à des offres payantes, c’est un
vrai défi », explique Julien Maldo-
nato, associé conseil innovation
chez Deloitte. D’autant que les ban-
ques traditionnelles ont elles-mê-
mes engagé leur transformation en
numérisant toujours plus leurs ser-
vices et en offrant plus de flexibilité.
Posant la question de la coexistence
des deux modèles au sein des
grands groupes bancaires.n

Les pionniers de la banque en


ligne tentent de reprendre la main


En misant sur Brad Pitt, l’un des acteurs les plus « bankables » du moment, Boursorama espère
gagner en visibilité et surtout retrouver son image de pionnière. Photo Boursorama Banque

« Les banques
en ligne doivent
réussir à passer
du tout gratuit
à des offres
payantes,
c’est un vrai défi. »
JULIEN MALDONATO
Associé conseil innovation
chez Deloitte
Free download pdf