16 |économie & entreprise JEUDI 10 OCTOBRE 2019
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Déjà congestionnée, la gare du Nord va
voir son trafic bondir de 700 000
voyageurs par jour actuellement à
quelque 900 000 dans les dix ans à
venir. Pour absorber ces flux, un
terminal de départ est créé, les espaces
d’accueil et de circulation doublés, de
30 000 à 60 000 m^2. La grande
majorité des passagers, les usagers des
transports du quotidien et ceux
arrivant du métro et du RER, devraient
voir leurs trajets facilités, assurent les
architectes de l’agence Valode &
Pistre. Pour les trains grandes lignes, le
projet sépare les flux de départs et
d’arrivées, réservant le hall historique
aux passagers débarquant à Paris et
contraignant les voyageurs en partance
à emprunter des passerelles dans le
terminal côté est, avant de redescendre
sur les quais. Les critiques dénoncent un
trajet inutilement compliqué et des
ajouts dénaturant le hall historique.
Surtout, pour la Ville de Paris, le projet
alloue une place trop modeste à la
station de vélos et à la gare des bus.
A la place de la lumineuse double halle
construite en 2001 pour accueillir le pôle
d’échange des trains de banlieue, le
projet prévoit d’édifier un bâtiment de
300 mètres de long, 50 mètres de large et
jusqu’à cinq étages de haut. De quoi
accueillir boutiques, bureaux, restau-
rants, équipements de loisir et de culture
le long d’une rue intérieure étirée
comme un passage parisien sous une
haute verrière. Sans oublier un « parc
urbain » de 11 000 m^2 sur les toits. Du
« bourrage de parcelle » dans un quartier
déjà trop dense, estime la Ville de Paris.
Mais ces mètres carrés supplémentaires
sont essentiels à l’équilibre du projet
actuel : c’est l’opération immobilière qui
permet à la SNCF de ne pas débourser
un centime pour la rénovation et l’agran-
dissement de la gare, et même de
percevoir, pendant quarante-six ans,
une redevance de la part des exploitants
de ces espaces non ferroviaires. Au
détriment des voyageurs et de l’ambition
d’une grande gare multimodale? C’est
tout l’enjeu du débat.
ne chirurgie à 600 millions
d’euros pour transformer la
gare du Nord, la première
d’Europe en nombre de voyageurs, en
efficace plate-forme de mobilité, en
rutilante porte d’entrée dans Paris et
en locomotive urbaine du quartier. Ce
qui devait être une des réalisations
majeures en vue des Jeux olympiques de
2024, pour le plus grand profit des
utilisateurs, mais aussi de la SNCF et de
Ceetrus, filiale immobilière d’Auchan,
associés dans cette opération, a tourné à
la polémique politique et à la contro-
verse entre architectes. La Ville de Paris
s’oppose à ce projet soutenu par l’Etat.
(^2) Des commerces quadruplés
Jeudi 10 octobre, la Commission
nationale d’aménagement commercial
doit se prononcer sur le projet, qui
prévoit aussi de porter les surfaces de
magasins de moins de 5 000 m^2 à plus
de 18 000 m^2. Un véritable « centre
commercial », dénoncent un collectif
d’architectes et la Ville de Paris. Les
plans détaillés livrent une réalité plus
complexe. Si les commerces prolifèrent,
c’est de manière éclatée. De la restaura-
tion et des souvenirs sur la plate-forme
de l’Eurostar ; des commerces de
proximité, des sandwichs, des produits
pratiques en sous-sol, où circulent les
RER ; des commerces de gare classiques –
Relay, etc. – au niveau des grandes lignes.
Une offre commerciale qui répond
d’abord à une attente des usagers, justifie
la SNCF. S’y ajouteraient 8 300 m^2
d’enseignes non liées à la gare, l’équiva-
lent d’un petit centre commercial, réparti
sur quatre étages du nouveau bâtiment
projeté sur le côté Est de la gare, et dont le
rez-de-chaussée doit servir de nouveau
terminal de départ. Des boutiques « com-
plémentaires » à l’offre du quartier,
assurent les promoteurs.
(^1) Des circulations modifiées
(^3) Une densification assumée
U
Textes : Grégoire Allix. Infographie : Mathilde Costil, Audrey Lagadec
Sources : Valode et Pistre, StatioNord, Gares et connexions
Rue de Maubeuge
Rue
du Faubourg-
Saint-Denis
Rue
du
Fau
bou
rg-S
aint-
Den
is
Un projet immobilier au-dessus d’une partie de la gare
La hauteur du nouveau
bâtiment n’excédera pas
la hauteur du hall du bâtiment
historique
Structure en bois
Parc urbain de 1,1 hectare
Ecostation bus
Transilien
Salle d’échange RER
Quais RER
Départs grandes lignes
En comparaison, surfaces commerciales
Répartition des surfaces commerciales
Zone RER
Niveaux 0 et 1
Niveaux 2 à 5
(hors espace ferroviaire)
8 300 m^2
5 000 m^2
Niveaux 0 et 1
(grandes lignes)
5 200 m^2
Aujourd’hui
Détail
de la coupe
18 800 m^2
Le projet
Zone RER (souterrain)
3 000 m^2
3 000 m^2
Zone
Eurostar
200 m^2
Zone
Eurostar
2 500 m^2
2 000 m^2
Gare du Nord
18 800 m^2 prévu
pour environ 700 000
voyageurs par jour
Saint-Lazare
13 000 m^2
pour environ 300 000
voyageurs par jour
Montparnasse
19 000 m^2 prévu
pour environ 150 000
voyageurs par jour
A
A B
B
5 000
Une augmentation des flux de passagers
Gare conçue au XIXe siècle
pour accueillir 500 000
passagers par jour
En 2019 :
700 000 passagers
Prévisions pour 2030 :
900 000 passagers
Une reconfiguration des entrées/sorties de gare
M RER
Station
de vélo
Station
de taxi
Station
de taxi
Nouveau hall
(10 000 m^2 )
Nouvelles
passerelles d’accès
aux trains
Doublement des escalators
et des ascenseurs
Ecostation
bus
ARRIVÉES
grandes lignes
(RDC bas)
DÉPARTS
grandes lignes (RDC haut)
vers le nord de la France,
la Belgique, l’Allemagne
et les Pays-Bas
DÉPARTS
terminal Eurostar
existant
HALL D’ÉCHANGE
(vers la gare souterraine)
et départs régionaux
DÉPARTS
extension du terminal
Eurostar
Gare du Nord, les plans de la discorde
Le projet de rénovation oppose la Ville de Paris et la SNCF. Jeudi, la Commission nationale
d’aménagement commercial doit se prononcer sur la multiplication des boutiques