Les Echos - 07.10.2019

(Michael S) #1

Les Echos Lundi 7 octobre 2019 HIGH-TECH & MEDIAS// 25


Marina Alcaraz
@marina_alcaraz


C’est une petite phrase prononcée
par Franck Riester au cours d’une
rencontre avec des journalistes,
vendredi matin ; mais, à coup sûr,
elle devrait alimenter les débats. « Il
faudra peut-être bouger le plafond de
recettes publicitaires imposées à
Radio France », a indiqué le ministre
de la Culture et de la Communica-
tion. Actuellement, Radio France a
l’obligation, écrite dans son contrat
d’objectifs et de moyens (COM), de
ne pas dépasser un plafond de
42 millions d’euros de recettes
publicitaires par an. Mais, ces der-
nières années, les antennes des
radios publiques ont allègrement
dépassé cette limite, comme en 2018
où elles ont totalisé 47,6 millions
(hors numérique). Le groupe public
argue cependant qu’il n’a rien fait de
mal car, depuis que ses recettes ont
augmenté, il retire de ce montant la
publicité générée par les messages
d’intérêt général, ce qui fait tomber
ce chiffre à 41,9 millions...


RADIO


Franck Riester
a indiqué qu’il pourrait
relever le plafond
de publicité autorisée
pour Radio France.


Les radios privées
haussent le ton.


Les b onnes audiences des stations
publiques et l’autorisation, en 2016,
de la publicité de marque, autrefois
interdite sur le service public, expli-
quent ces bons résultats. Mais pour
les radios privées c’est un « scan-
dale ». Selon elles, Radio France
viole bel et bien ses obligations et gri-
gnote ainsi une part de leur gâteau
publicitaire... « Dans l’absolu, moins
de publicité sur le service public serait
un objectif souhaitable », a aussi dit
le ministre vendredi, mais « nous
voulons permettre une dynamique
autour des audiences. [...] Je ne veux
pas priver la radio et la télévision de
ressources publicitaires ».

Un « cadeau »
Franck Riester n’a pas précisé à
quelle hauteur il comptait relever
ce seuil. Compte tenu de ses décla-
rations, il semblerait qu’il ne soit
pas dans une volonté d’accroître à
tout prix les recettes publicitaires
de Radio France. Une chose est
sûre, e n revanche, il n’y a aucun plan
pour augmenter le nombre de spots
publicitaires sur Radio France. Si le
ministre a lâché l’hypothèse du relè-
vement du plafond, c’est avant tout
en réponse à une question qui lui
était posée sur ce plafond qui est lié
au COM, lequel s’achève en 2019.
« Donc l’idée est que pour la suite
Radio France ait un plafond un peu
relevé pour tenir compte de l’impact
positif des bonnes audiences à
volume de publicité inchangé »,
explique un interlocuteur au fait
du dossier. Et donc être « dans les
clous » avec ses obligations.

Il n’empêche, la simple idée que le
seuil soit relevé suffit à agacer les
radios privées. « Le budget de Radio
France (environ 600 millions d’euros
d’argent public et la publicité en plus)
est équivalent au chiffre d’affaires de
l’ensemble des radios privées, alors
que Radio France ne fait qu’un quart
de l’audience totale », constate Régis
Ravanas, le directeur général des
activités audio du groupe M6.
« La révision du plafond serait
un cadeau fait au service public,
au détriment des radios privées »,
s’insurge pour sa part Damien
Bernet, directeur exécutif d’A ltice
Média (RMC, etc.). « Le marché n’est
pas extensible. Or, en ce moment, les
radios privées ont besoin de finance-
ment avec les investissements induits
par le DAB+ [la radio numérique ter-
restre, NDLR] », grince pour sa part
Alain Liberty, président du Syndicat
des radios indépendantes.n

Le plafond de publicité


de Radio France


pourrait être relevé


Plon comme « préparé sous X ». Si
beaucoup ont fantasmé sur le tirage
qui pourrait en être fait, à l’arrivée,
100.000 exemplaires ont été mis en
place pour l’heure. A titre d e compa-
raison, Fayard avait commandé un
premier tirage de 150.000 exem-
plaires du « Devenir », de Michelle
Obama.
Publié le 19 septembre à l’initia-
tive du fils de Françoise Sagan, Denis
Westhoff – qui en a rédigé la préface
–, « Les Quatre Coins du cœur » a
essuyé des critiques exécrables, à la
mesure du tweet assassin de Pierre
Assouline : « On a lu l’inédit de
Sagan : c’est un fond de tiroir. » Et les
accusations d’une réécriture mer-
cantile effectuée par un « ghost wri-
ter » se sont multipliées. Mais le
bilan commercial est loin d’être
catastrophique. « A ce rythme-là, le
roman peut atteindre 30.000 à
35 .000 exemplaires vendus, ce qui est
tout à fait respectable sur le marché
actuel de l’édition, même si c’est en
décalage avec le chiffre du tirage »,
estime un connaisseur du secteur.

Affolement estival
Mais Denis Westhoff digère mal les
attaques. « Rédigé à la fin des années
1980 et au début des années 1990 mais
inachevé, le manuscrit comportait
une soixantaine de “trous” dans le
texte, car l’écriture de ma mère
comme son élocution lorsqu’elle dic-
tait à sa secrétaire pouvaient souvent
être incompréhensibles, indique-t-il
aux “Echos”. J’ai essayé de combler
ces trous, parfois avec un verbe,
d’autres fois avec un adjectif. Mais
contrairement à ce que je lis partout,
je n’ai absolument pas réécrit ou fait
réécrire ce texte. Cela m’a blessé, et
Plon et moi comptons publier le
manuscrit initial, avant correction,
pour que tout le monde puisse consta-
ter qu’il n’y a pas eu d’intervention
extérieure. »n

Véronique Richebois
@VRichebois


En l’espace de quinze jours, ce sont
15.000 exemplaires du roman inédit
« Les Quatre Coins du cœur », de
Françoise Sagan, qui ont été com-
mercialisés. Chez son éditeur Plon
(groupe Editis), qui s’estime très
« satisfait », on précise même
qu’« Amazon vient d’acquérir les
droits du livre pour les Etats-Unis, au
terme d’une enchère incroyable ».
Les ventes réalisées dans les pays
francophones ne sont pas encore
comptabilisées mais devraient
venir grossir le chiffre d’affaires. De
quoi en déduire une morale : « Les
Quatre Coins du cœur » partage un
point commun avec « le charmant
petit monstre » décrit par Mauriac :
un goût furieux pour les montagnes
russes. Dès juin, en effet, le monde
de l’édition avait commencé à s’affo-
ler devant ce roman annoncé chez


ÉDITION


« Les Quatre Coins
du cœur », l’inédit
de Françoise Sagan,
enregistre 15.000 ven-
tes en quinze jours.


Après avoir été accu-
sés d’avoir fait réécrire
le livre, Plon et Denis
Westhoff, le fils de
l’auteure, vont publier
le manuscrit initial.


Succès respectable


pour l’inédit


de Françoise Sagan


100.000


EXEMPLAIRES
du roman ont été mis en place
pour l’heure.


Selon les radios privées, Radio France viole ses obligations et grignote une part de leur gâteau publicitaire.

Xavier Popy/RÉA
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