LeTemps260919

(Romina) #1

RAM ETWAREEA
t @ram


Nestlé, Danone, ExxonMobil, Google,
Barry Callebaut. Les multinationales sont
en première ligne cette semaine pour
défendre leur engagement en faveur du
climat. Elles ont lancé une multitude
d’initiatives à New York en marge de l’As-
semblée générale de l’ONU qui a débuté
lundi par un sommet «Action Climat».
Ce qui ne manque pas d’attirer des cri-
tiques de la part d’organisations non
gouvernementales.
Global Compact a donné le ton. Cette
émanation de l’ONU qui a vu le jour en
2000 et dont l’objectif est de responsabi-
liser ses membres, 9946 au total, en
matière d’environnement et de droits
sociaux a lancé lundi un appel baptisé
«Business Ambition for 1,5°». Objectif:
atteindre zéro émission nette de gaz car-
bonique d’ici à 2050 pour ses membres.


«Un chien guide»
«Le changement climatique est l’un des
plus grands défis de l’humanité; il pré-
sente aussi l’un des plus grands risques
pour nos activités», a déclaré, Mark Sch-
neider, le patron de Nestlé, signataire de
«Business Ambition for 1,5°». «Il y a y
urgence si l’on veut éviter les pires consé-
quences du réchauffement climatique.»
Global Compact, qui, selon ses propres
mots, est «un chien guide plutôt qu’un


chien de garde» et dont le rôle n’est pas
de surveiller ses membres, va mainte-
nant élaborer la feuille de route pour
atteindre l’objectif.
Autre initiative, celle du World Business
Council for Sustainable Development
(WBCSD), basé à Genève et qui regroupe
200 patrons de grandes entreprises. Dix-
neuf d’entre elles actives dans l’agroali-
mentaire, mais aussi dans d’autres sec-
teurs, se sont engagées à protéger la
biodiversité. Parmi les suisses: Nestlé,
Barry Callebaut et Firmenich. La coali-
tion baptisée «One Planet Business for
Biodiversity» précisera ses propositions
pour y parvenir d’ici à juin 2020. «Face
aux impasses alimentaires et agricoles
vers lesquelles nous allons, il est urgent

de travailler avec la nature et pas contre
elle», a déclaré son porte-parole Emma-
nuel Faber, patron de Danone.
Les représentants de l’industrie pétro-
lière et gazière sont aussi présents en
force à New York. L’Oil and Gas Climate
Initiative, qui regroupe les plus grands
groupes de la branche, a annoncé son
intention d’accélérer les actions en vue
d’atteindre les objectifs climatiques,
notamment en matière de capture et de
stockage du carbone et de maîtrise de
l’émission de méthane, un gaz toxique
pour l’environnement.
Des engagements sincères en faveur du
climat ou de simples effets de manche?
La question se pose d’autant plus que de
nombreuses multinationales qui

montrent «patte verte» mènent des
actions controversées sur le terrain. Par
exemple, Credit Suisse, membre de Glo-
bal Compact et du WBCSB, est prise à
partie depuis des années à cause de sa
participation dans des projets de défo-
restation en Asie et en Amérique du Sud.
La deuxième plus grande banque suisse
ne dément pas sa participation dans des
investissements controversés faits dans
le passé. «En collaboration avec d’autres
banques, Credit Suisse développe des
méthodes pour aligner les portefeuilles
de crédits sur l’Accord de Paris, répond
son porte-parole. Depuis 2010, la banque
a participé à 110 transactions dans le
domaine des énergies renouvelables
pour plus de 94 milliards de dollars.»

Activités de lobbying
WBCSD reconnaît aussi que des ques-
tions puissent se poser sur des initia-
tives annoncées à New York. «Il est
possible que dans le passé des actions
aient été menées de façon isolée ou
fragmentée, relève un porte-parole.
Mais à présent, c’est l’urgence clima-
tique qui nous oblige à agir.»
Pascoe Sabido, chercheur chez Cor-
porate Watch, une ONG qui traque les
activités des multinationales, critique
la présence de l’Oil and Gas Climate
Initiative à New York. «Alors que le sec-
teur génère des milliards chaque année,
c’est l’argent de l’Union européenne qui
financera le projet de capture et de
stockage de carbone», dénonce-t-il. Le
chercheur affirme aussi que «l’indus-
trie pétrolière et gazière ne lésine pas
sur les moyens lorsqu’il s’agit de finan-
cer ses activités de lobbying afin d’as-
surer la pérennité de son activité qui
empoisonne la planète». n

Le secteur privé affirme vouloir


s’engager pour le climat. Vraiment?


MULTINATIONALES Global Com-
pact et d’autres organisations patro-
nales entendent jouer un rôle dans la
lutte contre le changement climatique
et ont annoncé plusieurs initiatives
cette semaine à New York. Des effets
d’annonce, critiquent des ONG


CYPRIEN CADDEO
t @Caddeo_Cyprien
La presse alémanique s’est fait
l’écho, ce week-end, d’une lettre,
adressée au Conseil des Etats et datée
du 20 septembre, incitant à mettre
une œuvre une «politique climatique
efficace». La liste des 72 signataires
de CEO4Climate couvre de nombreux
secteurs économiques: Patrik Meli de
MAN Energy Solutions, Christian

Mumenthaler de l’assureur Swiss Re,
Frederic Trombert du chocolatier
Barry Callebaut, ou encore André
Wyss du géant du génie civil Implenia,
mais aussi des cadres d’Ikea Suisse ou
Novartis. Mais on s’interroge: pour-
quoi les Romands sont, à part le Vau-
dois Leclanché et le Genevois SIG, si
peu nombreux?
«C’est beaucoup plus facile pour moi
de parler avec les patrons de Suisse
alémanique, se défend Christian
Zeyer, qui pilote cette initiative. C’est
un groupe indépendant de cadres
alémaniques qui nous ont sollicités
pour les aider à coordonner leurs
efforts. Il est assez difficile de dupli-
quer une idée d’ici en Romandie: il

faut avoir les bons contacts et bien
parler français pour expliquer nos
stratégies. Il y a le Röstigraben...»

Visibilité et sécurité
Les entreprises romandes ne sont
pas exclues pour autant. Christian
Zeyer promet d’ailleurs d’aller cher-
cher des signatures en Suisse
romande très prochainement.
Il est par ailleurs à la tête de Swiss-
cleantech, un lobby qui entend faire
pression sur les politiques en faveur
du développement durable. Son asso-
ciation est à l’origine d’une campagne
parallèle, Energy4Climate, qui vise à
faire s’engager les candidats aux fédé-
rales sur les questions d’énergie.

Alors que le Conseil des Etats discute
de plusieurs lois en faveur du climat,
CEO4Climate se positionne en faveur
d’un objectif de réduction des émis-
sions domestiques à l’horizon 2030
et d’une neutralité carbone d’ici à
2050, afin de contribuer aux objectifs
fixés par l’Accord de Paris. Les signa-
taires réclament des «condi-
tions-cadres contraignantes» pour
donner aux entreprises visibilité et
sécurité, et permettre de «planifier
sur le long terme»; ainsi qu’une bat-
terie de «mesures nationales effi-
caces» dans le bâtiment, les trans-
ports, l’industrie, l’énergie et
l’agriculture – sans toutefois préciser
lesquelles. n

CLIMAT Coordonné depuis la
Suisse alémanique par le lobby
Swisscleantech, l’appel des patrons
en faveur du climat tarde à
atteindre la Suisse romande

Les Romands quasi absents de l’initiative CEO4Climate


LT

La directive européenne sur le
droit d’auteur, adoptée le 26 mars
dernier, prévoit en son corps que
les plateformes en ligne indem-
nisent les éditeurs de presse dont
elles utilisent les contenus. Afin
d’échapper à cette disposition
Google ne fera plus apparaître les
différents contenus des éditeurs
dans ses résultats sans leur
accord, a annoncé mercredi un
responsable du groupe. Le géant
américain ne les rémunérera
donc pas en vertu des «droits voi-
sins» des droits d’auteur. 
Google a détaillé ces nouvelles
règles pour la France qui entre-
ront en vigueur le mois prochain,
en application d’une loi adoptée
cet été, qui transpose dans le droit
français la directive européenne
sur le droit d’auteur.
En Suisse, certains éditeurs plai-
daient l’année passée pour l’adop-
tion d’un droit voisin analogue à
celui de l’Union européenne. Sans
entente trouvée, le pays pourrait
devenir une cible pour les plate-
formes en ligne, en devenant l’un
des seuls pays en Europe à ne pas
entrer dans ce cadre juridique. 

«Libre choix» des éditeurs
Les éditeurs de presse basés en
Europe devront désormais déci-
der individuellement si, en
France, des extraits de leurs infos
(textes, vidéos...), ou «snippets»,
et autres images miniatures (ou
«thumbnails») continueront d’ap-
paraître à côté des liens renvoyant
vers leurs sites. Et ce, tant dans
les résultats de recherche que
dans Google Actualités.
Pour les éditeurs qui accepte-
ront, ces extraits s’afficheront
sans qu’ils soient rémunérés par
Google. S’ils le refusent, ces
extraits et autres mini-images ne
s’afficheront plus désormais dans
les résultats du moteur de
recherche, qui n’incluront dans
ce cas qu’un titre et un lien vers
les infos des éditeurs concernés.
Mais les actualités de ces médias
continueront bien à être référen-
cées, a assuré Google, même si ces
éditeurs de presse risquent de
voir le trafic vers leurs sites dimi-
nuer, voire chuter. n

MÉDIAS Dès le mois prochain, le
moteur de recherche n’affichera
plus dans ses résultats des extraits
d’articles, des photos et vidéos
des éditeurs de presse européens
en France. Une décision qui n’est
«pas acceptable» pour le ministre
français de la Culture

Google ne rétribuera
pas les éditeurs
en France

EMMANUEL FABER
PATRON DE DANONE

«Face aux impasses
alimentaires
et agricoles
vers lesquelles nous
allons, il est urgent
de travailler
avec la nature
et pas contre elle»

MARK SCHNEIDER
PATRON DE NESTLÉ

«Le changement
climatique est l’un
des plus grands défis
de l’humanité;
il présente aussi
l’un des plus grands
risques pour
nos activités»

Altria et Philip
Morris mettent
fin à leur fusion
Les deux premiers
cigarettiers du
monde, Altria et
Philip Morris
International, ont
renoncé à leur
projet de fusion qui
avait été annoncé
fin août, selon un
communiqué
d’Altria mercredi. La
fusion aurait créé
un géant pesant
plus de
200 milliards de
dollars en bourse,
55 milliards de
chiffre d’affaires et
15 milliards de
bénéfices. AFP

Juul change
de patron
Le leader du
marché américain
de la cigarette
électronique, Juul,
a annoncé mercredi
le remplacement
de son patron,
Kevin Burns, par K.C
Crosthwaite,
responsable chez
Altria de la
diversification vers
la cigarette
électronique, et a
annoncé suspendre
toute publicité ainsi
que son lobbying.
AFP

TABAC


Economie 15


JEUDI 26 SEPTEMBRE 2019 LE TEMPS


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