LeTemps260919

(Romina) #1

LE TEMPS JEUDI 26 SEPTEMBRE 2019


2 Hyperlien


POURQUOI L’UDC BOUDE


NOTRE CHARTE ÉCOLOGIQUE


SUR LA CENTAINE DE CANDIDATS ROMANDS DE L’UNION DÉMOCRATIQUE DU CENTRE, ILS NE SONT QUE TROIS À S’ÊTRE POSITIONNÉS


C


hers lecteurs, on vous ment un
peu. Contrairement à ce que
le titre de cet article pourrait
laisser penser, nous avons une
idée assez précise de la raison pour
laquelle, parmi les 222 candidats
romands qui, lundi, avaient rem-
pli notre charte écologique, on ne
trouve que trois membres de l’UDC.
Voici deux extraits du programme
de législature de l’Union démocra-
tique du centre: «La protection de
l’environnement n’a pas besoin de
nouvelles lois». Et «Nul besoin d’ob-
jectifs insensés de réduction du CO2».
On peut également citer Albert
Rösti, président du parti, qui parle
de «l’arnaque écolo-socialiste contre
la classe moyenne» et flirte sans trop
de complexes avec le climatoscepti-
cisme. Le conseiller national Roger
Köppel, rédacteur en chef de la
Weltwoche, dénonce lui-même ou via
son journal le «nouvel écolo-terro-
risme», ennemi de la démocratie.

«INTELLECTUELLEMENT FAUX»
Plus proche de nous, il fallait lire,
aussi, la réaction un peu plus nuan-
cée de Céline Amaudruz à la décou-
verte de notre charte: «Je ne l’ai pas
lue et n’ai pas besoin de le faire pour
savoir quoi en penser [...] On nous
incite à nous engager dans un
domaine où la Suisse est déjà
numéro un et où notre petit pays
n’a qu’un faible impact au niveau
mondial», avait répondu la conseil-
lère nationale genevoise.

Parmi les trois UDC qui ont rempli
la charte écologique, il y a Pierre
Hainard, candidat neuchâtelois au
Conseil des Etats. «Je suis d’accord
avec la vision du parti sur la souve-
raineté, la défense nationale ou les
notions de responsabilité indivi-
duelle. En revanche, je ne suis pas
du tout en accord avec son traite-
ment des enjeux écologiques,
assume-t-il. Je me méfie de l’hysté-
rie actuelle, mais ignorer cette
question et son urgence, c’est intel-
lectuellement faux et, politique-
ment, une erreur d’appréciation.»
Le Chaux-de-Fonnier a non seule-
ment répondu à la charte, mais il
affiche un taux d’acceptation de 93%.
Soit 17 oui, 11 «oui +» et 2 non. Ces
derniers concernent les taxes inci-
tatives sur les combustibles et le
carburant. «Je suis contre ces nou-
velles taxes parce qu’elles pénalise-
raient les classes moyennes.» Selon
lui, il vaudrait mieux changer l’affec-
tation de taxes existantes, par
exemple le système de la RPC – la
rétribution à prix coûtant de l’élec-
tricité, qui est financée par une taxe
à la consommation.
Vladimir Novak (Jeunes UDC Vaud)
affiche, lui, une moitié de oui et une
moitié de non. Il est par exemple
opposé au développement des sou-
tiens financiers pour la production
d’énergie renouvelable, principale-
ment photovoltaïque. «D’où pro-
viennent les panneaux solaires et le
métal qui les composent? De Chine...
On sous-estime beaucoup le potentiel

du biogaz. Sachant que la Suisse pro-
duit énormément de déchets, ce
serait une manière plus locale de
produire de l’énergie.»
Dans la ligne de son parti, il prône
le local dans à peu près tous les
domaines, de la mobilité à l’agricul-
ture. Mais il ne veut pas que l’on
fonce tête baissée. «Si l’on veut que
les agriculteurs passent au bio, il faut
une transition, des incitations,
notamment fiscales. On ne peut pas
décréter un strict et court délai d’in-
terdiction pour des gens qui tra-
vaillent d’une certaine manière
depuis des décennies.»
Pourquoi il est l’un des seuls UDC
à avoir pris position sur notre
charte? «L’écologie ne doit pas être
négligée, mais l’immigration et l’ac-

cord-cadre avec l’UE restent nos
principaux combats.»
Selon nos calculs, l’UDC dénombre
une centaine de candidats des cantons
romands aux fédérales du 20
octobre. Avec nos trois répondants,
nous sommes donc encore loin du
compte. Précisons quand même,
chers lecteurs, que nous ne sommes
pas surpris ni vexés. On pourrait
même aller jusqu’à souligner que
l’UDC ne fait pas d’opportunisme élec-
toral avec la question climatique. Mais
il est préférable de les prévenir que
pour faire de la politique aujourd’hui
et demain, il faudra bien finir par
accepter de parler d’écologie. n

SERVAN PECA
t^ @servanpeca

La Une du 19 septembre 2019 de l’hebdomadaire. (DIE WELTWOCHE)


Une idée, une remarque ou une critique? [email protected]


«E


lle m’a tout l’air d’une jeune
fille heureuse, se réjouis-
sant d’un avenir prometteur
et merveilleux. C’est si beau
à voir!» avez-vous tweeté à
propos de Greta Thunberg,
après son discours déchirant au sommet de
l’ONU sur le climat lundi. Quelle pertinence,
quelle finesse... Qu’on vous décerne la palme
du sarcasme! See, Donald? Moi aussi je maî-
trise l’ironie. Ce tweet m’a
évidemment mise hors de
moi – j’en bouillonne encore
comme un geyser islandais.
Parce que c’est trop facile.
D’attaquer en 280 signes –
stériles – une jeune fille qui
porte sur ses épaules un
combat aussi énorme, quitte
à sacrifier son adolescence,
son innocence. Qui a le cou-
rage de donner de la voix
mais sans les costumes-cra-
vates, les dollars et le pouvoir.
Et figurez-vous, M. Trump, qu’il est diffi-
cile de se réjouir d’un «avenir prometteur
et merveilleux» quand on a la vingtaine et
grandi avec la menace du réchauffement
climatique au-dessus de notre tête. Imaginez
une poussière dans l’atmosphère, persis-
tante, de plus en plus suffocante: les sujets
au TJ, les catastrophes naturelles, les déserts
craquelés, les glaciers fondus, les études
toujours plus pessimistes. Ado, j’imaginais
me réveiller un jour et découvrir, au coin de
la rue, une manchette qui annoncerait
quelque chose comme: «Un scientifique a
découvert comment sauver la planète!»

Je n’y crois plus. Les autres millennials non
plus. Selon une récente enquête américaine,
un jeune sur cinq pense que l’humanité est
fichue. Difficile de vivre avec cette angoisse
dans le ventre en permanence, alors on se
mue en êtres de contradiction. Qui lisent un
article sur l’Accord de Paris avant de sortir
siroter un Gin Tonic. Qui rêvent de vacances
aux Philippines et culpabilisent. Action,
paralysie, déni. Greta Thunberg a au moins
le mérite d’être entière.
Evidemment, elle et moi
ne sommes pas les plus à
plaindre, et de loin. L’im-
pact du réchauffement
climatique n’est encore
pour nous qu’une loin-
taine réalité, alors qu’il
frappe des jeunes de
l’autre côté du globe. Mais
son ombre teinte déjà
notre quotidien, nos plans
de vie, de famille. Notre
futur est privé de sérénité, voire de futur
tout court.
Mais vous vous en moquez ouvertement,
dans tous les sens du terme. Alors si je vous
avais vu parader dans les couloirs de l’ONU,
je n’aurais pas pu m’empêcher de vous fusil-
ler du regard moi aussi. Un regard rouge,
terrifiant, comme sur les affiches de l’UDC.
Sans surprise, vous n’avez pas même tourné
la tête. Mais vous le savez
désormais: les millen-
nials vous surveillent.

VIRGINIE NUSSBAUM
t^ @Virginie_Nb

Je n’y crois plus.
Les autres
millennials non
plus

Donald Trump,


les millennials vous regardent


LA VIE À 25 ANS


Vos commentaires sont les bienvenus!
Vos lettres ne doivent pas excéder
1500 signes (espaces compris).

DES VOITURES


VERTES ET PROPRES?


DANIEL SCHÖNI, RENENS

Dans votre édition du 10 septembre, votre quotidien
nous gratifie d’un dossier «Mobilité verte» (...). Si l’on
peut discuter des mérites écologiques de ces véhi-
cules et reconnaître qu’ils sont légèrement (...) moins
polluants sur un cycle de vie complet, de la produc-
tion à la destruction, il est en revanche abusif (...) de
les présenter comme des «véhicules écologiques».

La voiture verte, c’est celle qui est peinte en vert.
La voiture propre, c’est celle qui sort du tunnel de
lavage. (...) Les voitures écologiques polluent aussi:
extraction minière, acheminement des matériaux et
composants par navires au fioul, énergie électrique
issue des hydrocarbures, etc.

Elles prennent autant de place que les autres, néces-
sitent autant de bétonnage, (...) et un poids d’une
tonne et demie pour transporter la plupart du temps
une seule personne et ses bagages. Ce n’est pas
un progrès sur le chemin de l’écologie.

Votre quotidien a laissé une place plus sérieuse aux
enjeux écologiques ces derniers temps et souvent
avec des articles forts intéressants (...) On attend
des articles écrits avec esprit critique et confron-
tant les solutions proposées aux réels impératifs
écologiques de notre temps.

Mais le genre de publireportages à la solde des
constructeurs que vous avez publiés dans ce dos-
sier est déplorable et indigne d’une presse de qualité.

LA SEULE CHOSE


QUI EST JUSTE


CAROL SCHELLER-DOYLE, CHÊNE-BOUGERIES

L’été 2016: des gens dans les bateaux après des
voyages de cauchemars, des images dans les
médias et des réactions d’indignation vite évapo-
rées (...) Aujourd’hui, la solidarité n’a plus la côte.
Pire, elle est criminalisée. Le raisonnement de la
juge qui a confirmé la violation de la loi suisse sur
les étrangers de Lisa Bosia Mirra, raconté dans votre
édition du 11 septembre le souligne.

La fermeture de la frontière entre Côme et Chiasso
empêchait des jeunes mineurs non-accompagnés
de continuer leur voyage vers un membre de leur
famille en Suisse, en Allemagne, en Hollande ou
dans un autre pays européen. Lisa Bosia Mirra a
aidé un groupe de jeunes à transgresser la sacro-
sainte frontière.

Elle ne l’a pas respecté, tout comme des passeurs
suisses n’ont pas respecté la ligne entre la France
et Genève pendant la seconde guerre mondiale.
Elle sera peut-être condamnée comme Carl Lutz et
réhabilitée lorsqu’elle sera morte. Mais elle a fait la
seule chose qui est juste. (...)

Un tel conflit est-il vraiment inévitable? La juge
accusait les parties absentes – les « prétendus »
parents des jeunes – d’exploiter leurs enfants. Cela
ne pouvait pas être plus faux. Ces jeunes partent,
soit sans rien dire à leurs parents qui n’auraient
jamais été d’accord, soit contre leur envie, forcés
à partir par des parents qui veulent à tout prix les
arracher des combats.

La motion 18.461 qui sera passée en revue au
Parlement fédéral au printemps 2020 vise à sup-
primer le délit de solidarité contenu dans la loi suisse
sur les étrangers. La loi sous sa forme actuelle est
inadaptée à la réalité qui suscite des actions comme
celle de Lisa Bosia Mirra ou d’Anni Lanz, (cette der-
nière a décidé de faire recours auprès du tribunal
fédéral ce 25 septembre, NDLR) condamnées pour
délit de solidarité. (...)

Mais quoi faire lorsque la loi suisse contredit la loi
internationale et, de surcroît, la loi internationale sur
les droits de l’enfant? La première est là pour proté-
ger le pays. La seconde pour protéger les plus vul-
nérables. Il est difficile d’imaginer la menace posée
par de jeunes gens qui n’ont envie que de poursuivre
une formation et de devenir des membres actifs de
leur société d’accueil.

COURRIER


[email protected]

VISITE DES


LECTEURS


Comme chaque dernier mardi du
mois, une dizaine de lecteurs a pu
assister à notre conférence de rédac-
tion et ainsi découvrir comment sont
débattus et sélectionnés les articles
du «Temps». Les participants ont
également pu visiter la newsroom et
échanger avec un membre de la rédac-
tion en chef et le chef de l’édition web.
Parmi leurs interrogations: la relation
entretenue avec nos correspondants
de presse aux quatre coins du monde,
les risques juridiques liés à la publica-
tion d’un article, le choix des causes
que nous défendons et l’évolution de
notre stratégie digitale.

ÉVÉNEMENT


La relation entretenue entre médias
et photographes de presse sera au
cœur d’une table ronde organisée
avec le festival NO’PHOTO. Comment
a-t-elle évolué? comment l’émergence
de citoyens-reporters modifie-t-elle
le métier? Animé par notre rédacteur
en chef adjoint Xavier Filliez ce débat
donnera la parole à Pascale Méroz,
picture editor («L’Illustré»), Nicolas
Righetti, photographe (Lundi 13),
Nora Teylouni, photographe indépen-
dante, Laurent Gilliéron, photographe
(Keystone ATS) et Anne Wyrsch, rédac-
trice-images («Le Temps»). Rendez-
vous ce 1er octobre à Genève, à 19h
au Palais Eynard. Inscription obligatoire
sur notre site.

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