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(coco) #1
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Racontez-nous la genèse
de ce projet...
denis reichrath | Tout a démarré il y
a 3 ans. Dans ce type de mission, le choix
de l’architecte est déterminant, nous
ne pouvons avancer sans lui car en tant
que spécialiste des arts de la table, nous
devons connaître les directions choi-
sies : le Raffles allait-il s’orienter vers du
contemporain? Ou rester dans un esprit
classique? Nous avons ensuite collaboré
avec Pierre Burgade pour penser et créer
ensemble les arts de la table du buffet du
petit-déjeuner, de l’afternoon tea et pour
l’arrivée des clients en chambre.

Concrètement, quelles sont les
étapes pour créer un nouvel univers
d’art de la table dans un hôtel de
luxe tel que le Raffles Singapore?
Notre méthodologie part d’un ques-
tionnaire très précis de 5 pages environ
que le chef remplit. Dans le cas d’un
buffet de petit-déjeuner, par exemple,
notre objectif est de savoir ce que le chef
a prévu en chaud, en froid, les quantités
envisagées selon le nombre de clients,
la disposition de la salle. Ce document
nous permet d’évaluer les volumes. Je

demande aussi l’implantation des tables
afin de comprendre s’il y aura suffisam-
ment de place pour installer tout ce qui
est souhaité. Il faut savoir que l’offre pe-
tit-déjeuner a beaucoup évolué ces der-
nières années ; quasiment tous les hôtels
de luxe proposent désormais une partie
bien-être avec des céréales, des produits
sans gluten ou sans lactose, ce qui im-
plique une place supplémentaire... À
nous d’accompagner le client pour que
ses souhaits soient réalistes et réalisables.

Travaillez-vous aussi
avec des mood board?
Oui, les mood board nous permettent
de déterminer l’ambiance de la décora-
tion d’intérieur, les couleurs, les maté-
riaux – plutôt laiton, cuir, pierre, rotin
ou marbre – ainsi que l’environnement
texturé.

Êtes-vous souvent
force de proposition?
Oui, car nous aidons les chefs à structu-
rer leurs besoins. Finalement, notre mé-
tier, c’est de remplir une table vide avec
de la vaisselle, des supports, des plats,
différents contenants... C’est un travail

REPORTAGE

RENCONTRE AVEC PIERRE BURGADE,
CHEF EXÉCUTIF DU RAFFLES SINGAPORE

APRÈS UN PASSAGE À L’ÎLE MAURICE ET
EN INDE, PIERRE BURGADE A REJOINT LE
RAFFLES IL Y A 10 ANS. IL REVIENT SUR SA
COLLABORATION AVEC SAFRAN PARIS.


« Le Raffles est assez unique dans l’univers
de la restauration car il propose 6 restau-
rants et 5 bars pour 115 suites seulement. Sa
rénovation était un défi vraiment stimulant.
Dès 2016, avant même la fermeture pour
travaux, je savais déjà l’importance que l’art
de la table allait prendre. De façon concrète,
une fois que les concepts de restauration
ont été définis, j’ai travaillé avec mon équipe
sur des maquettes, des photos... Dès le dé-
part, j’avais en tête la direction que je sou-


haitais prendre et les menus que je voulais
mettre sur pied, il me fallait ensuite adapter
une belle vaisselle aux différentes recettes.
Tout cela requiert beaucoup de temps. Au
final, nous avons combiné des marques de
porcelainiers connues et déjà bien implan-
tées avec de la vaisselle sur mesure, comme
celle de l’afternoon tea. Nous avons opté
pour une ligne à la fois pure et contempo-
raine mettant en scène les orchidées et spé-
cialement créée pour le Raffles. L’afternoon
tea était un enjeu important pour nous : il
nous fallait l’amener à un autre niveau, alors
qu’il était déjà très prisé. Nous voulions
améliorer la qualité, la constance, la mise en
scène, l’art de la table... Mon objectif était

de trouver une vaisselle élégante qui pouvait
plaire à la fois à la clientèle et à la direction
et c’est ainsi que notre collaboration avec
Safran Paris est née. J’ai adoré travailler avec
cette équipe, notamment lors de deux jours
d’ateliers créatifs, où nous avons échangé,
dessiné, pensé les motifs que nous voulions
avoir, choisi les plats, les corbeilles et autres
contenants. S’en sont suivis des échanges
permanents pour ajuster nos choix initiaux.
Notre travail sur les amenities a été aussi très
poussé car au Raffles, nous savons la valeur
ajoutée que ces derniers peuvent représen-
ter. Nous avons cherché l’effet « waouh »
pour que nos clients se disent qu’ils n’avaient
pas encore vu cela ailleurs... »
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