0123
SAMEDI 21 SEPTEMBRE 2019 planète| 15
(^1) Géographie de l’utilisation des pesticides les plus toxiques
Bayonne
Rouen
Ajaccio
La Rochelle
Brest
Mulhouse
Poitiers
Reims
Limoges
Nantes
Grenoble
Lyon
Metz
Clermont-
Ferrand
Strasbourg
Marseille
Caen
Dijon
Toulouse
Besançon
Saint-
Etienne
Tours
Orléans
Amiens
Paris
Bordeaux
Nice
Troyes
Perpignan
Lille
Rennes
Montpellier
Le Mans
Bastia
Bayonne
Rouen
Ajaccio
La Rochelle
Brest
Mulhouse
Poitiers
Reims
Limoges
Nantes
Grenoble
Lyon
Metz
Clermont-
Ferrand
Strasbourg
Marseille
Caen
Dijon
Toulouse
Besançon
Saint-
Etienne
Tours
Orléans
Amiens
Paris
Bordeaux
Nice
Troyes
Perpignan
Lille
Rennes
Montpellier
Le Mans
Bastia
0 100 km
Grandes zones agricoles
Echec du premier plan de réduction
des pesticides
Les cultures^3
les plus traitées
2
Sources :
BNV-d, Data.eaufrance.fr ; Agreste ; ministère de l’agriculture
et de l’alimentation ; Anses ; France Inter ; Le Monde ;
Atlas de l’anthropocène, F. Gemenne, A. Rankovic, 2019
Infographie Le Monde
Intensité du recours à des pesticides cancérogènes,
mutagènes ou reprotoxiques (CMR), à effets sur l’allaitement,
et toxiques ou très toxiques (T et T+),
en nombre moyen de traitements par hectare (NODU)
de surface agricole utile, en 2017
Plus de 10 traitements
De 5 à 10
De 2 à 5
De 1 à 2
De 0,1 à 1
Presque pas
de traitement
NOTE MÉTHODOLOGIQUE
L’indicateur NODU (nombre de doses unités) a été mis
en place pour suivre le recours aux pesticides. Les doses
de substances actives présentes dans les produits varient
considérablement selon leur efficacité ; cet indicateur
permet de les comparer.
Cette carte a été réalisée à partir des données suivantes :
- les ventes déclarées de substances actives
par les distributeurs. Ces ventes sont enregistrées au code
postal du siège social de l’exploitation, qui n’est pas toujours
le lieu d’utilisation des produits ; les valeurs enregistrées
dans les agglomérations peuvent être surestimées.
Les achats effectués à l’étranger ne sont pas pris en compte.
Enfin, les valeurs ne sont pas représentatives pour les
départements et régions d’outre-mer. - les valeurs des doses unités de référence de chaque
substance active, telles que publiées dans le dernier arrêté
disponible du ministère de l’agriculture du 27 avril 2017.
Cinq substances problématiques pour la santé (sur les 107
classées par l’Anses) n’ont cependant pas pu être intégrées
en raison de l’absence de la donnée dans le dernier arrêté. - les surfaces agricoles utiles qui proviennent du dernier
recensement agricole de 2010.
Absence
de surface
agricole utile
Achats
non communiqués
Commune où le maire
a pris un arrêté de restriction
ou d’interdiction d’utilisation
de pesticides
Objectifs des plans de réduction
50
40
60
70
80
90
30
20
10
0
2008092010 13 201516 2020 22 2025
Ventes de pesticides, en France, en millions de NODU
Insecticides (dont acaricides)
Herbicides
Fongicides
+ 12 %
entre la période
2009-
et celle
de 2014-
− 50 %
d’ici
à 2025
Interdiction
des néonicotinoïdes
et sortie du glyphosate
d’ici à fin 2022
− 25 %
d’ici
à 2020
− 50 %
pour
2015
2008-
plan Ecophyto I
2015-
plan Ecophyto II puis Ecophyto II+
Nombre moyen de traitements
phytosanitaires appliqués par cycle de récolte
* dont traitement des semences
Céréales, cultures et oléoprotéagineux
Viticulture et fruiticulture
Elevage
Polyculture et polyélevage
36,
22,
22,
19
16,
12,
12,
10,
9,
8,
8,
7, 5
7, 5
3,
2,
Chou-fleur
Salade
Blé tendre*
Fraise
Melon
Poireau
Banane
Carotte
Tomate
Abricot
Betterave sucrière
Vigne
Pomme de terre*
Pêche
Pomme
Pesticides Les territoires les plus exposés
« Le Monde » publie la carte inédite de la consommation des pesticides classés par l’Anses
comme étant les plus dangereux pour la santé et l’environnement
L’
émoi a désormais pris une di
mension nationale. Après l’arrêté
du maire de Langouët (IlleetVi
laine) interdisant les épandages de pesti
cides aux abords des habitations, une
cinquantaine d’édiles ont pris des dispo
sitions analogues. Avec, comme princi
pale raison avancée, la crainte d’effets sa
nitaires pour les populations riveraines.
Ces effets sontils réels? Selon l’expertise
collective de l’Institut national de la santé
et de la recherche médicale (Inserm), pu
bliée en 2013 et dont la mise à jour devrait
être rendue publique dans les prochains
mois, l’exposition professionnelle aux
pesticides est associée à un risque légère
ment accru de plusieurs pathologies. L’ex
pertise indiquait une « présomption forte »
d’un lien avec les lymphomes non hodg
kiniens, le cancer de la prostate, le myé
lome multiple et la maladie de Parkinson.
Et une « présomption moyenne » d’un lien
avec les leucémies, Alzheimer, des trou
bles de la cognition et de la reproduction.
Les risques pour les riverains
Les enfants de femmes ayant été expo
sées professionnellement pendant leur
grossesse ont, pour leur part, des risques
accrus de plusieurs maladies graves. L’ex
pertise collective concluait à une « pré
somption forte » d’un lien avec les leucé
mies infantiles, les tumeurs cérébrales,
les malformations congénitales et les
troubles du neurodéveloppement. Dans
la majorité des cas, les augmentations de
risque demeurent faibles, inférieures à
celles de pratiques à risques (alcool, ta
bac...) – qui relèvent de conduites indivi
duelles, et ont le plus souvent été mises
en évidence sur des agriculteurs, tra
vailleurs agricoles, jardiniers, etc.
Et les riverains? Les travaux cherchant
les effets sanitaires des épandages sur
ces populations sont complexes à mettre
en œuvre et demeurent rares. En
avril 2018, le Bulletin épidémiologique
hebdomadaire (BEH), la revue de l’agence
Santé publique France, publiait une
étude sur la base de données géographi
ques, suggérant un risque accru de 13 %
de contracter la maladie de Parkinson
pour les agriculteurs utilisateurs de pes
ticides, et de 10 % pour les habitants des
cantons à forte présence viticole – la viti
culture étant l’une des cultures les plus
consommatrices de pesticides.
Plusieurs travaux récents, aux Etats
Unis, suggèrent de leur côté un risque ac
cru de troubles neurocomportemen
taux chez les enfants dont la mère a
passé sa grossesse à proximité de
champs traités. L’une des dernières en
date, publiée en mars 2018 dans le British
Medical Journal pointe une association
entre les applications de certains pro
duits opérées dans un rayon de 2 kilomè
tres autour du lieu de résidence de la
mère, et un risque accru de 10 % à 40 %
(selon les substances) de troubles du
spectre autistique chez l’enfant. En sep
tembre, dans la revue Proceedings of the
National Academy of Sciences, d’autres
chercheurs sont parvenus à identifier,
par imagerie, des modifications de l’acti
vité cérébrale chez les enfants exposés in
utero à un pesticide organophosphoré
(partiellement interdit en France
en 2016), par le biais des épandages prati
qués autour du lieu de résidence de leur
mère, pendant leur grossesse.
stéphane foucart
infographie : mathilde costil,
eugénie dumas et romain imbach