MLemagazine du Monde —7septembre 2019
ilfallait oser11 —Le cancer du pavillon.
parjean-michel normandLa première fois que
“Le Monde”aécrit...
PROCRÉATION MÉDICALEMENTASSIS-
TÉE. En 1985, trois ans après la naissance
d’Amandine,premier bébé-éprouvette
français, le gouvernement de Laurent
Fabius organise uneconsultation surce
qu’on appelle alors plutôt la«fécondation
artificielle». La question est–déjà –de
savoir qui peut en bénéficier.«Laprocréa-
tion médicalement assistéeest-elle une
réponse médicaleàl’infertilitéducouple
(mais danscettehypothèse,ya-t-il une
définition médicale admise partous de
l’infertilitéetqu’est-cequ’uncouple?) ou
la procréation médicalement assistéeest-
elle un moyennouveau de procréation?»,
interrogeEdmond Hervé, secrétaired’État
àlasanté(Le Monde,21-22avril 1985).
L’auteur de l’article,lej ournaliste et méde-
cin Jean-Yves Nau,évoque une position
«toutàfait laxiste»,et sembleregretter
qu’Edmond Hervérejoigne«les thèses
libérales»défendues par le ministredela
justice, Robert Badinter.Lepèredel’aboli-
tion de la peine de mortvenait de plaider
pour«ledroit detout êtrehumain de
donner la vie».La Francenelégiférera
qu’en 1994,réservant l’aide de la science
à«l’homme et[à]la femmeformant le
couple»dont lastérilitéaété«médicale-
ment diagnostiquée».L’accèsàlaPMA
pourtoutes devrait êtreinstaurépar le
projet de loi sur la bioéthique,actuelle-
mentexaminéàl’Assemblée nationale.QUI ADIT?“Je hais cette époque,
je la hais, je hais ce siècle.”
1—YannMoix, en annonçant qu’ilarrê-
taitlapromotion de sonlivre,Orléans?2—MichelSardou, en faisantlapro-
motion de sa nouvelle pièce,N’écoutez
pas, mesdames!,de SachaGuitry?3—Jonathancoe, l’auteur britan-
nique,assurant la promotion de son
nouvelouvrage,Le Cœur de l’An gleterre?:2. RéponseC’est un parpaing de taille respectable que Julien Denormandieaexpédié dans
la mare. Le 29 août, le ministre du logement s’en est pris bille en têteàun
monument national:l’idéal pavillonnaire. Le gouvernement s’apprêteàrevoir
àlabaisse, voireàsupprimer les aides octroyéesàlaconstruction de maisons
individuelles, dont le prêtàtaux zéro, dans la plupart des zones périurbaines.
Priorité, désormais,àlar evitalisation des centres-villes constellés de panneaux
«à vendre»endirigeant les incitations fiscales vers l’achat de logements
anciens.Avec des économies budgétairesàlac lé?Sans doute,mais l’important
est ailleurs.S’en prendre au fantasme du«faire construire»,c’est du lourd.Les
néoruraux, qu’ils aient déserté la centralité urbaine volontairement ou par
contrainte financière, pèsent dans la nouvelle donne politique. Cette France
de classes moyennes inférieuresafourni des bataillons de«gilets jaunes», ne
vote plus pour les partis traditionnels etamême assuré un score loin d’être
ridicule au Parti animaliste lors des européennes.La maison individuelle,tonne
la Fédération française du bâtiment,«c’est ce que veulent les gens»;l’État n’a
pas às’en mêler.Problème:lafuite en avant de l’étalement périurbain est aussi
une plaie écologique.Elle dévore les terres agricoles,bétonneàgrande échelle,
réduit le brassage social et engendre de grosses contraintes en termes de trans-
port.Àl’approche des élections municipales, cette question qui convoqueàla
fois le malaise de la France excentrée, la reconquête écologique des territoires
et la revitalisation du cœur des villes devrait tomberàpic. Sauf que le parpaing
ministériel n’a pas provoqué la moindre vaguelette politique.Alors qu’il méri-
terait vraiment que nos politiques ne baissent pas... pavillon.
72Illustrations Satoshi HashimotopourMLemagazine du Monde