MLemagazine du Monde —7septembre 2019
Pour réveiller lesconsciences!»C’estOlivier Rouyer,
63 ans, quis’exprime, ancienfootballeurprofessionnel
(17sélectionsenéquipedeFranceentre1976et1981),
copain historique de Michel Platini, qu’ilanotamment
côtoyé àlagrande époque de l’ASNancy-Lorraine,et
aujourd’huiconsultantsur la chaîneL’Équipe. Savoix
porte, carOlivi er Rouyer auneimplicationparticulière
dans cetteaffaired’intérêt général.Ilest le premier
joueur français, et le seulencore aujourd’hui, àavoir
révélépubliquement sonhomosexualité. C’étaiten
février 2008dansL’Équi pe Magazine.«Quand j’ai fait
moncoming out, aucune personnalitédufootne
m’avaitappel é. Silence radio.Là, c’est un peupareil.
Je me sens isolésur le sujet. J’ai l’impression d’ouvrir
unebrèche pour bannir cescomportements, mais,
pour l’instant,personne nes’yengouffre.»C’estle
16 août, àlasuite dechants homophobesentonnés
dans lestribunes dustade deNancy–contreLeMans,
enLigue2–,làoùilvit,queRouyer s’estsentivraiment
écœuré.«Ças’est pass éàNancy...Mon sentimentde
honteenasansdoute étédécuplé.Çam’a asphyxié.
Et ça aété le ras-le-bol.Jemereproche surtoutd’avoir
toléré tout cela si long temps.»Jusqu’iciles«Oh!hisse!
enc...»hurlés àl’unissonquandle gardiendebut de
l’équipeadverse dégageait le ballonétaient considérés
commelajoyeuse expressiond’unfolklore acceptable :
«Oui,mais, àunmoment,cef olklore, ça suffit.Quand
je jouais, l’insulte“pédé”n’exi stai tpas.Les imbécilesde
l’époque s’en prenaient plutôt auxjoueursdecouleur,
ils lesappel aient “Blanchette”ou“Bamboula”. Et puis
ça s’estarrêté!Donc,c’est possible .Car,là, on en estau
mêmepoint. Lesinsul teshomophobes,onnevoitça
qu’aufoot. Jamais au basket,aurugby...Alors que le
foot estunsport universelqui,donc, se doitd’être
exemplaire. Exemplaire. On aqu’àremplacer “pédé”
par“coquelicot”!C’est plus joli,non?»Avantdefaire
dela poésie, il s’agit,auseindes instances dufoot
français, d’établiruneliste exhaustive determes jugés
homophobeset/ouinjurieux etd’harmoniser le dip-
tyqueinterruptiondesmatchs-sanctions.Le11sep-
tembreauralieuunepremière réuniondestinée à
mettre d’accord toutes lesparties prenantes, lesinsti-
tutions, lesorganismesdelutte contre l’homophobie
et lesassociationsdesupporteurs.«Nous croyons
àlasensibilisation desacteurs. Passer enforce ne
résoudrarienetseracontre-productif. Nous restons
mobilisés surl’objectif final :éradiquerles chants
homophobesdes stades»,précise Nathalie Boyde
la Tour,laprésidente dela LFP.«Discuter, oui. Ma is ça
aaussi seslimites,prévient Olivier Rouyer.On ne peut
pastoujoursêtre dans lecompromis.»Pour autant,
Olivier Rouyer ne négligepas lapédagogie.Ilveut
partirsur lesroutes pourporterlabonneparole,
«sensibiliserles référentssupporteursdechaque club.
Je l’ ai proposéàlaLigue.J’espèreque ça va se mettre
en place. La Li gue alancé desactionsqui vont mettre
un certain tempsàaboutir.Tenez,l’autre jour,Jean-
Michel Roussier,lep résident de Nancy,m’a lancé :
“Tuterends compte?Tuvoudrais que la Ligue enlève
trois points àNancy!” Je me suis renducompte que
lesprésidentsnepensent encore qu’à leurstrois points.
Le reste...»Cela devraitprendre au moinsunboutde
temps, c’estcertain. LaurentTelo4—Rouyer veut
faire perdre
l’homophobie dans
les stades.
Avec l’épuisAnt feuilleton du vrAi-fAuxdépArt de neymAr du
pAris-sG,c’estl’affaire quipourrit le débutdesaisondes
championnatsdeFrancedefootballprofessionnels.
Celledes banderolesetdes chants homophobesdans
lesstades, depuis quela Ligue defootball profession-
nel(LFP),encouragéeparle ministèredes sports,a
décrétélatolérancezéropourlemoindrecomporte-
mentdiscriminatoiredansl’enceinted’unstade.Der-
nierépisode endate :larencontreentreMetzetle
Paris-SGaété interrompue quelquesminutes, ven-
dredi30août, le tempsdefaire remballer auxultras
messinsunebanderolejugéehomophobepar l’arbitre:
«LFP,PSG,laisse-moitechanter,d’aller te faireen...,je
pass erai pasàlaTV, parceque mes mots sontpastrès
gais.»Avantquela commissiondediscipline dela LFP
nesanctionne, peut-être, le club lorraind’unrappelà
l’ordre, d’uneamende,d’unesuspensiondetribuneou
d’un matchjouéàhuisclos–lebarème dessanctions
estencoreflou.«Maiscen’est passuffisant!Ilf autaller
beaucoupplus loin !Ilf autcarrément retirerles trois
points de la victoire àl’équipe dont lessupporteursont
manifesté de tels agissements. Je sais,vul ’impact
sportif et économique quepeut représenterune telle
sanction,que ça peut paraît re extrémiste, certains me
prennent mêmepour un fou, mais je le fais exprès.Ex-joueur
de l’équipe de
Francedefootball,
OlivierRouyer sug-
gèrederetirer les
trois points de la
victoireàchaque
équipe dont les
supporteurs profè-
rent des insultes
homophobes.56ElliottVerdier