Le Monde - 06.09.2019

(vip2019) #1
0123
VENDREDI 6 SEPTEMBRE 2019 économie & entreprise| 13

La baisse du coût des batteries,


clé du succès des voitures vertes


D’ici cinq ans, les prix d’une automobile électrique seront très proches


de ceux d’un classique modèle thermique, selon le cabinet AlixPartners


U


ne question existen­
tielle agite l’industrie
automobile euro­
péenne depuis des
mois : le gigantesque – et vital –
pari électrique des constructeurs
peut­il être gagné? Une étude du
cabinet de conseil AlixPartners,
dévoilée mercredi 4 septembre,
pourrait bien apporter un début
de réponse réconfortante aux
décideurs du secteur qui se sont
tous lancés à corps perdu dans
des investissements pharao­
niques afin d’électrifier massi­
vement leurs ventes de voitures
d’ici à 2030.
Ainsi, selon les experts d’Alix­
Partners, le coût de la production
des batteries devrait baisser de
35 % en moyenne ces cinq pro­

chaines années pour finir par at­
teindre la barre cruciale des
100 dollars (91 euros) le kilowat­
theure (kWh) avant 2024, contre
environ 140 dollars par kWh
aujourd’hui. Sur une période plus
longue, la chute est vertigineuse.
En 2010, le prix pour produire
1 kWh de batterie atteignait en­
core les 1 000 dollars.
L’étape est d’importance. A
100 dollars, le coût pour le cons­
tructeur d’un système de batteries
pour véhicules électriques avoi­
sine le coût global (recherche + dé­
veloppement + fabrication) d’un
groupe motopropulseur thermi­
que, affirme l’étude du cabinet
américain. Autrement dit, la voi­
ture verte ne sera bientôt pas plus
chère à fabriquer que la classique
auto et son moteur à explosion.
Pour mesurer en quoi une telle
prévision est susceptible de chan­
ger la donne, il faut revenir sur le
contexte de long terme dans le­
quel se débat le secteur automo­
bile. Les quatre dernières années
ont été marquées par les suites du
scandale Volkswagen des mo­
teurs diesel truqués et la prise de
conscience autour du réchauffe­
ment climatique. Cette situation a
conduit à des transformations de
l’environnement réglementaire.
En Chine, les autorités locales et
gouvernementales encouragent
la production et l’achat de véhicu­
les électriques. Dans l’Union
européenne, des objectifs de ré­
duction des émissions de CO 2 im­
posée à l’industrie automobile
pour 2020, 2025 et 2030 (assortie
de fortes amendes en cas de dé­
passement), contraignent les
constructeurs à augmenter consi­
dérablement leurs ventes de voi­
tures électriques. Ces derniers,
pour électrifier la production, ont
donc entrepris un effort sans pré­
cédent, qu’AlixPartner évalue à
200 milliards de dollars d’inves­
tissement entre 2019 et 2024.

En théorie, une poussée de cette
ampleur doit conduire à une
hausse des ventes de véhicules re­
chargeables à batteries. La part de
marché des voitures électriques
en Europe est susceptible, selon le
cabinet AlixPartners, d’atteindre
15 %­20 % en 2025 puis 30 %­40 %
en 2030 contre 2 %­3 %
aujourd’hui. Mais il va falloir que
l’offre rencontre la demande des
consommateurs. Et dans cette
équation, le prix du véhicule joue
un rôle essentiel. Aujourd’hui,
une voiture électrique coûte plus
cher qu’une voiture thermique,
hors aides gouvernementales,
d’abord à cause du coût de la bat­
terie, qui représente un bon tiers
du coût global.

Autonomie augmentée
« Tout semble s’aligner pour aller
vers cette réduction du prix, dé­
taille Georgeric Legros, directeur
au bureau parisien d’AlixPar­
tners. Les innovations en matière
de composants chimiques amélio­
rent la densité énergétique des bat­
teries de 15 % à 50 %, ce qui aug­
mente l’autonomie à poids de bat­
terie égal. Si vous ajoutez les pro­
grès en matière de charge rapide,
qui vont diviser par quatre les
temps de charge, et une certaine
tension baissière sur les prix des
cellules du fait des surcapacités
dans les usines chimiques asiati­
ques, vous avez tous les éléments
d’un cycle baissier. »
« C’est un phénomène que nous
observons et qui bénéficie déjà à

nos clients, confirme Eric Feun­
teun, directeur du programme vé­
hicules électriques de Renault.
Nous vendons la batterie de
52 kWh de la nouvelle Zoé au même
prix que la précédente de 41 kWh. »
Résultat pour l’électrique la plus
vendue en France : une autono­
mie augmentée d’un tiers (à pres­
que 400 kilomètres) pour un véhi­
cule proposé à un tarif équivalent
à celui de la précédente version.
« Ces progrès ne vont pas seule­
ment améliorer le coût du véhi­
cule, ajoute M. Feunteun. En inté­
grant les aides de l’Etat, nous pro­
posons d’ailleurs déjà, en location
de longue durée, un loyer mensuel
égal entre une Clio thermique et
une Zoe électrique – autour de
200 euros. Après 2024­2025, les fu­
tures technologies solides permet­
tront de rendre la batterie – et en
particulier sa vitesse de charge –
moins sensible aux variations de
températures. »
Dans ce rassurant avenir, de­
meure une incertitude qui pour­
rait venir gâcher les prévisions et
remettre à plus tard la baisse du
prix des batteries : les fluctua­
tions des matières premières né­
cessaires à l’électrochimie. La bat­
terie contenant, en effet, des mé­
taux en quantité plus ou moins
importante selon la technologie :
lithium, cobalt, nickel, manga­
nèse, fer, aluminium, etc.
La trajectoire vertueuse vers les
100 dollars du kWh s’entend à des
niveaux de prix du cobalt, du nic­
kel et du lithium équivalents à
ceux d’aujourd’hui. AlixPartners a
simulé une hausse « prévisible » et
raisonnable du cours de ces trois
métaux­clés. Le prix du kWh
s’équilibrerait alors à 110­115 dol­
lars, ce qui reste acceptable. Mais,
en cas de hausse plus forte et bru­
tale des matières premières, toute
la mécanique économique de la
voiture électrique serait grippée.
éric béziat

Le coût de la
production des
batteries devrait
atteindre la barre
des 100 dollars
le kilowattheure

LES  CHIFFRES


19  %
C’est la part des véhicules électri-
ques rechargeables (12 % purs
électriques + 7 % hybrides re-
chargeables) dans les ventes
de voitures neuves en Europe
en 2025, selon le cabinet Alix-
Partners. Ce taux s’élèverait à
13 % (9 + 4) à l’échelle mondiale.

600
C’est, en gigawattheures (GWh),
la prévision de demande mon-
diale en capacité de batterie
en 2025, soit cinq fois plus
qu’en 2019 (125 GWh).

50  %
C’est l’augmentation maximale
prévue de la capacité énergéti-
que des packs de batteries
entre 2019 et 2024. Le minimum
d’augmentation serait de 15 %.

Mediaset gagne une bataille contre Vivendi


Le groupe de télévision privé italien de Silvio Berlusconi a fait voter, contre l’avis
de Vincent Bolloré, un projet de fusion de ses activités italiennes et espagnoles

E


n Italie, Silvio Berlusconi
vient de gagner une man­
che contre son ancien ami
Vincent Bolloré. Son groupe de té­
lévision, Mediaset, a voté, mer­
credi 4 septembre, en faveur d’un
projet de fusion de ses entités
européennes. Présenté comme
un moyen de mieux s’armer
contre Netflix et les autres géants
américains, ce rapprochement
permettra de loger, dans la même
entité, Mediaset (qui comprend
notamment les chaînes privées
italiennes Italia 1, Rete 4 et Ca­
nale 5) et Mediaset España, qui
possède Telecinco. Baptisée « Me­
dia for Europe », la société sera do­
miciliée aux Pays­Bas.
Depuis le départ, Vivendi,
deuxième actionnaire de Media­
set, est farouchement opposé au
projet. Pour le propriétaire de Ca­
nal+, cette fusion n’a d’autre fonc­
tion que de renforcer les pouvoirs
de la famille de Silvio Berlusconi
au sein de Mediaset et n’offre
aucune synergie intéressante.
Grâce à un jeu de droits de vote
multiple des actions nouvelles, Fi­
ninvest, la holding familiale de
l’ex­chef de gouvernement italien,
verrait passer ses droits de vote de
45,9 % à 87 %, fait valoir Vivendi. Et
ce, « sans payer de prime de con­
trôle, ni offrir de sortie aux action­
naires minoritaires », dit un proche

du groupe français. Mediaset
aurait bien offert à Vivendi de cé­
der ses titres, mais à un prix de
2,60 euros par action, bien infé­
rieur aux 3,70 euros dépensés
pour les acquérir.
« C’est un projet dont dépend, à
notre avis, l’avenir du groupe, a
contesté Fedele Confalonieri, le
président de Mediaset, lors de
l’assemblée générale. Nous avons
déjà fait la démonstration que
nous étions prêts à investir massi­
vement dans ProSiebenSat.1 [Me­
diaset est entré, en juin, à hauteur
de 9,9 % dans le groupe de télévi­
sion allemand, présent outre­
Rhin, en Autriche et en Suisse].
Avec eux, comme avec d’autres
opérateurs de premier plan, nous
avons engagé des discussions
pour construire un futur paneuro­

péen. Je ne crois pas qu’on puisse
avoir de doute sur le fait que nous
ayons des objectifs industriels. »
Pour parvenir à ses fins, Media­
set a tout fait pour barrer la route à
Vivendi lors de l’assemblée géné­
rale. Ce dernier dispose de 9,9 % de
droits de vote en direct, et de 20 %
de manière indirecte, à travers Si­
mon Fiduciaria. C’est la justice ita­
lienne qui avait obligé le groupe
hexagonal à geler une partie de
ses droits de vote, dans la mesure
où il est aussi le premier action­
naire de l’opérateur Telecom Italia.

Vers un nouveau recours
Fin août, Mediaset a annoncé à Vi­
vendi qu’il ne pourrait pas voter le
4 septembre. Ce dernier a contesté
cette décision en justice, qui lui a
donné raison. Le groupe a pu exer­
cer ses 9,9 % de droits de vote. Puis
Mediaset a attendu mercredi
4 septembre, à quelques heures de
l’assemblée générale, pour inter­
dire à Simon Fiduciaria de s’expri­
mer lors de la réunion des action­
naires. Un délai si serré que l’entité
n’a pas pu contester cette décision
devant le tribunal.
Or un vote négatif de la société fi­
duciaire aurait fait basculer le pro­
jet de Mediaset, qui nécessitait les
deux tiers des voix. « Cette résolu­
tion a été adoptée grâce à l’interdic­
tion illégale faite à Simon Fiducia­

ria de voter », a dénoncé le groupe
français, qui se prépare à un nou­
veau recours contre Mediaset.
Voici trois ans que M. Bolloré est
prisonnier de Mediaset. Au départ,
le Breton et Silvio Berlusconi
avaient un projet commun, celui
de créer une plate­forme de télévi­
sion payante européenne, fondée
sur le service déjà existant Media­
set Premium. Pour ce faire, il était
prévu un échange de participation
dans leur groupe respectif.
Las, avant même d’avoir posé la
première pierre à ce projet,
l’homme d’affaires breton et le
fondateur de la formation de cen­
tre droit Forza Italia se sont dispu­
tés, et Vincent Bolloré a tenté un
coup de force en montant au capi­
tal du groupe transalpin. Depuis,
les parties sont à couteaux tirées
et s’affrontent dans les tribunaux.
Chez Vivendi, on a quand même
cru trouver un accord avec Silvio
Berlusconi en décembre 2018
pour obtenir une sortie par le
haut. Mais l’ex­premier ministre
italien a fait volte­face en janvier.
Pour lui non plus, tout n’est pas
rose. Le nouveau gouvernement
italien pourrait faire adopter une
loi sur les conflits d’intérêts, ce
qui obligerait l’octogénaire, selon
certains analystes, à se désenga­
ger d’une partie de son empire.
sandrine cassini

Le patron de Nissan


avoue avoir été trop payé


Une enquête interne a établi qu’Hiroto
Saikawa a perçu une rétribution inappropriée

tokyo ­ correspondance

I


l y a un peu de l’arroseur ar­
rosé dans les dernières révéla­
tions sur les rémunérations
des dirigeants de Nissan. Selon
certaines sources citées jeudi
5 septembre par la presse japo­
naise, plusieurs d’entre eux, à
commencer par l’actuel président
et directeur général, Hiroto Sai­
kawa – critique assidu des malver­
sations reprochées à son prédéces­
seur, Carlos Ghosn –, aurait perçu
des dividendes d’actions supé­
rieurs aux montants autorisés.
Le comité d’audit du construc­
teur nippon aurait révélé, mer­
credi 4 septembre, que, selon une
enquête interne, M. Saikawa avait
touché 47 millions de yens
(402 000 euros) en excès en 2013.
L’argent aurait été versé par l’inter­
médiaire du système des droits à la
plus­value des actions (Stock Ap­
preciation Rights, SAR), qui per­
met aux entreprises de payer, en
capital ou en espèces, des bonus à
leurs dirigeants si les performan­
ces sont bonnes.

Promesse de remboursement
Les informations du comité
d’audit confirmeraient les accusa­
tions formulées en juin par l’avo­
cat américain Greg Kelly – l’ex­bras
droit de Carlos Ghosn – mis en
examen pour avoir contribué à
minorer les revenus de M. Ghosn,
dans les rapports remis par Nissan
aux autorités boursières entre
2011 et 2015, puis entre 2015 et
2018, le tout pour 9 milliards de
yens. M. Ghosn et Nissan sont mis
en examen dans cette affaire.
Dans une interview publiée le
10 juin par l’hebdomadaire Bungei
Shunju, M. Kelly expliquait que Hi­
roto Saikawa avait bénéficié,
en 2013, d’une dérogation dans le
versement de dividendes d’ac­
tions. Il les avait touchés avec une
semaine de retard, alors que la va­
leur des titres avait augmenté.
« J’ai reçu une rétribution sous
une forme qui ne correspond pas

aux règles en vigueur. Je pensais
que cela résultait de procédures
correctes », aurait déclaré M. Sai­
kawa, selon des propos rapportés
par l’agence de presse Jiji. Le diri­
geant a promis de restituer les
sommes indûment perçues. La
question devrait être abordée lors
d’un conseil d’administration
prévu courant septembre. « S’il ap­
paraît que M. Saikawa, qui n’a pas
réussi à empêcher les malversa­
tions présumées de M. Ghosn, est
lui aussi reconnu coupable de
fraude, son autorité pourrait être
affectée », estimait le 5 septembre
le quotidien Asahi. Et la question
de son remplacement, lancinante
depuis l’éclatement en novem­
bre 2018 de l’affaire Ghosn, pour­
rait de nouveau se poser.
Reste à savoir comment réagira
le bureau d’enquêtes spéciales du
parquet de Tokyo, chargé des in­
vestigations concernant Carlos
Ghosn, aujourd’hui en liberté sous
caution avec interdiction de voir
son épouse et en attente de son
procès – prévu en mars 2020 –
pour la minoration de ses déclara­
tions de revenus et pour abus de
confiance aggravée.
Le 1er septembre, dans Le Journal
du dimanche, l’avocat français de
M. Ghosn, François Zimeray, s’en
prenait au parquet de Tokyo.
« Tout semble permis au procureur
japonais pour qui l’enjeu est autant
de ne pas perdre la face que de dy­
namiter la tutelle française sur Nis­
san en protégeant ses actuels diri­
geants avec qui a été passé un ac­
cord secret. »
Lundi 2 septembre, Tetsuya Sogi,
fraîchement nommé à la tête du
parquet de Tokyo, a défendu l’en­
quête menée sur M. Ghosn, affir­
mant qu’elle était conduite confor­
mément au droit japonais. Il a éga­
lement dit ne pas comprendre les
accusations de « justice de l’otage »
ciblant le système judiciaire nip­
pon, critiqué pour sa tendance à
garder en détention les suspects,
jusqu’à ce qu’ils avouent.
philippe mesmer

« Je ne crois pas
qu’on puisse
avoir de doute
sur le fait que
nous ayons
des objectifs
industriels »
FEDELE CONFALONIERI
président de Mediaset RECETTES^60
20
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