Télérama Magazine N°3632 Du 24 Août 2019

(coco) #1
dimanche

62 t On aime un peu... y ... beaucoup u ... passionnément r ... pas du tout I Pas vu mais... faut voir


tnt


y 20.5 5 Arte Film

Invictus


| Film de Clint Eastwood (USA, 2009) | Scénario : Anthony Peckham
| 130 mn. VM | Avec Morgan Freeman (Nelson Mandela), Matt Damon
(François Pienaar), Tony Kgoroge (Jason Tshabalala).
| GENrE : rASSEMblEUr.
Un dur à cuire tiraillé entre le laisser-aller et l’acharnement à
vaincre, c’est le profil type dans le ciné ma de Clint Eastwood.
L’adversaire sportif, pourquoi pas...? Eastwood avait abordé ce
thème sur un plan intimiste (la boxe, Million Dollar Baby). Il le fait
cette fois à l’échelle d’un pays : l’Afrique du Sud, en 1995, lors de
la Coupe du monde de rugby. Mandela vient d’être élu. L’apar-
theid est enterré. Pas dans les faits. Mandela compte sur une vic-
toire de l’équipe nationale pour réconcilier tout le monde. Mais
les Springboks, médiocres, n’ont jamais été soutenus par les
Noirs... C’est une des forces du film : montrer que les grands
gestes peuvent s’appuyer sur un brin de naïveté ou de folie. Une
sorte de mystique du sport et de la politique se fait jour et ces han-
dicaps rendent la victoire d’autant plus retentissante.
Eastwood, cinéaste rassembleur, filme la ferveur collective,
nous fait revivre cette aventure humaine, orchestrant l’émotion
dans un formidable crescendo. — Jacques Morice
rediffusions : 27/8 à 13.35, 5/9 à 13.35.

y 23.5 5 Arte Documentaire

L’Etat contre Mandela et les autres


y 21.00 C8 Film

Un secret


| Film de Claude Miller (France, 2007) | Scénario : C. Miller, Philippe Grimbert
| 120 mn | Avec Mathieu Amalric (François), Cécile de France (Tania),
Patrick bruel (Maxime), ludivine Sagnier (Hannah), Julie Depardieu (louise).
| GENrE : TrAGéDiE HiSToriqUE.
Dans les années 1950, parce qu’il déçoit ses parents, François
s’invente un frère. Son double inversé : musclé, audacieux. Il ne
sait pas qu’il a existé. Un demi-frère, disparu pendant la guerre...
Avec un vrai sens du romanesque, Claude Miller filme la lente
montée du nazisme dans cette France des premiers congés payés,
où même les juifs s’aveuglent sur leur sort. Lente montée du dé-
sir entre deux êtres qui n’ont pas le droit de s’aimer. Montée de
l’autodestruction chez Hannah (Ludivine Sagnier), dont le visage
s’asphyxie de scène en scène. Le cinéaste réussit à saisir le mo-
ment où le destin transforme le mélo en tragédie. A l’image de la
musique de Zbigniew Preisner, tout le film semble s’extraire dou-
cement de l’ombre. Claude Miller est un vrai doux, mais un faux
tendre. Ses films dissimulent une insolence secrète — on la trouve
dans un épilogue inattendu et féroce. Et de la dérision, tout em-
mêlée de tendresse, dans la scène superbe où le père, survivant
de tant de morts, s’effondre, à cause de celle d’un chien. Les voies
de nos chagrins sont impénétrables. — Pierre Murat

Fin du Summer of Freedom, avec Nelson Mandela. Ce documentaire inédit sur son procès en 1963 est précédé du film de Clint Estwood Invictus.

| Documentaire de Nicolas Champeaux
et Gilles Porte (France 2018) | 115 mn. inédit.
Le 26  novembre  1963 s’ouvre en Afrique
du Sud le procès de Nelson Mandela et de
huit autres dirigeants de l’ANC (Congrès
national africain). Les militants antidiscri-
mination comparaissent pour actes de sa-
botage, destruction de biens et « violation
de la loi interdisant le communisme ». Per-
suadés qu’ils vont être condamnés à mort,
les prévenus vont utiliser leurs interroga-
toires comme des tribunes pour faire
connaître leur lutte au monde entier. Et
retourner l’acte d’accusation à leur profit
pour faire le procès de l’apartheid. S’il
n’existe aucune image (ou presque) de ces
audiences historiques, les deux cent
cinquante-six heures de débats ont été
intégralement enregistrées. Un véritable

trésor à partir duquel Nicolas Champeaux
et Gilles Porte ont construit un documen-
taire remarquable d’intelligence et d’émo-
tion. Cela tient, d’abord, à la texture so-
nore de ces archives, dont la profondeur,
le léger souffle renforcent la gravité et la
puissance oratoire des voix. Pour com-
penser l’absence d’images, les réalisa-
teurs utilisent des séquences d’animation
très réussies — elles représentent plus
d’un tiers du film. Loin d’être un gadget,
les croquis de l’illustrateur Oerd Van
Cuijlenborg augmentent le pouvoir d’évo-
cation du son par un mélange subtil de
dessins figuratifs et d’abstraction : le
terrible procureur Percy Yutar apparaît
alors comme une créature fantastique,
et le noir et blanc très contrasté symbolise
la nuit de l’apartheid.

Le film a aussi le grand mérite de mettre
dans la lumière les « autres », ces adjoints
de Nelson Mandela restés dans l’ombre du
grand leader après le verdict. Andrew
Mlangeni, le Noir, Ahmed Kathrada, l’In-
dien, et Denis Goldberg, le Blanc, sont les
hérauts mais aussi l’incarnation de la na-
tion arc-en-ciel égalitaire et humaniste,
cet idéal pour lequel ils étaient prêts à
mourir. Des neuf prévenus du procès, ils
étaient, au moment du tournage, les seuls
survivants. On les voit, casque sur les
oreilles, entendre pour la première fois
leurs déclarations pendant les audiences,
plus de cinquante ans après. Et se retrou-
ver plongés dans la douleur, mais aussi la
fierté, de ce passé lointain, avec les larmes
aux yeux. — Samuel Douhaire
rediffusion : 5/9 à 2.55.

Télérama 3632 21 / 08 / 19
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