Rock et Folk N°625 – Septembre 2019

(Darren Dugan) #1
SEPTEMBRE 2019 R&F 095

“Stand!”(1969)
Un des grands albums de Sly,
“Stand!” contient quatre chansons
classées dans les hit-parades,
les funky “Stand!” et “Sing A
Simple Song”, “Everyday People”,
plus pop, et “I Want To Take
You Higher” dont la folie
rythmique fit se lever Woodstock.
Deux autres morceaux de funk
psychédélique, usant de fuzz et de
distorsion, sont des compositions
mémorables : “Don’t Call Me
Nigger, Whitey” dont le refrain,
seules paroles intelligibles, reflète
les positions antiracistes de Sly,
(“Don’t call me Nigger, Whitey/
Don’t call me Whitey, Nigger”)et le
long instrumental “Sex Machine”.


“There’s A Riot Goin’ On”
(1971)
Malgré une gestation chaotique ,
“There’s A Riot Goin’ On”, une
réponse au “What’s Going On”
de Marvin Gaye, se place d’emblée
à la première place des charts.
Sly compose, produit et arrange
un album dans lequel il réalise des
passages entiers seul, utilisant
de plus en plus de machines et
d’overdubs. Il fait aussi appel à
des collaborateurs extérieurs tels
que Billy Preston, Bobby Womack 
et Ike Turner. L’album est le
reflet des bouleversements sociaux
et idéologiques à la fin d’une
décennie et de la perte des illusions.

“Small Talk”(1974)
Paru l’année précédente, “Fresh”
est un excellent disque retrouvant
une veine moins sombre que
“There’s A Riot Goin’ On”. “Small
Talk” s’inscrit dans cette optique, à
l’image de la pochette, une photo de
Sly avec femme et enfant. Dernier
album collectif d’une Family
Stone renouvelée avec Pat Rizzo
(deuxième saxo), Rusty Allen (basse),
Bill Lordan (batteur de Robin
Trower) et Sid Page (violoniste des
Hot Licks de Dan Hicks), “Small
Talk” offre un mélange de funk,
pop et soul lumineux et dansant à
la façon du Philadelphia Sound,
up tempo (“Loose Booty”), ou
ballades (“Wishful Thinkin’ ”,
le doo-wop de “This Is Love”).

Par ailleurs, il devient DJ pour la radio
KSOL, programmant aussi bien de la
soul que du rock britannique. Outre
trois nouveaux 45 tours pour son
compte, Sly dirige des sessions pour
les Beau Brummels, groupe pop et folk
rock à succès d’Autumn (“Introducing
The Beau Brummels”, 1965, et
“Volume 2”, 1965), les Mojo Men
et les Vejtables, Bobby Freeman pour
qui il écrit le hit rock’n’roll “C’Mon And
Swim”, les Chosen Few, garage rock,
et le Great Society de Grace Slick,
future chanteuse de Jefferson Airplane,
avec la première version du succès
“Somebody To Love” en 1966 sur
Northbeach Records (voir la compilation
“Born To Be Burned”, 1996). En 1966,
il est arrangeur pour Billy Preston.
Batteuse, compositrice et chanteuse
des Mojo Men et des Vejtables, Jan
Errico est la cousine de Greg Errico,
futur batteur de Sly & The Family Stone.
Sylvester Stewart prend le pseudo de
Sly Stone quand il forme les Stoners
avec la trompettiste Cynthia Robinson.
En novembre 1966, avec Cynthia et
les apports de son frère Freddie à la
guitare, de Greg Errico à la batterie,
de Larry Graham à la basse et de son
ami Jerry Martini au saxophone, Sly
transforme les Stoners en Sly & The
Family Stone, s’adjoignant également
un très jeune trio gospel aux chœurs,
The Heavenly Tones rebaptisés Little
Sister, formé par sa sœur Vaetta/ Vet,
Mary McCreary, future madame

Leon Russell et Elva Mouton. Ces
expériences de musicien, de chanteur,
de producteur et d’arrangeur vont
apporter à Sly une maîtrise du travail
en studio et un éclectisme musical peu
commun. Avec son groupe multiracial,
il crée un style qui lui est propre, au-
delà des classifications, en incorporant
à la soul et au funk des éléments rock,
pop, psychédéliques et gospel, le tout
agrémenté de commentaires sociaux,
humanistes et de références sexuelles.
Sly prône l’égalité des droits et la paix,
à l’image du texte de “Everyday
People”. Enregistré en juin 1967, le
premier album, “A Whole New Thing”,
comme les suivants, entièrement
écrit, produit et arrangé par Sly, sort
en octobre. L’accueil est mitigé et les
ventes médiocres malgré de bons titres
entre soul (“Underdog”) et pop (“If
This Room Could Talk”). En revanche,
diffusée en novembre 1967, la chanson
“Dance To The Music”, un des
premiers exemples de psychedelic
soul, devient un succès international.
Sly en propose même une version
française, sous l’appellation The French
Fries, “Danse A La Musique”/ “Small
Fries”. En 1968, peu avant les sessions
de l’album, Rose Stewart/ Stone (chant
et claviers) rejoint la Family Stone.
Porté par le single éponyme, “Dance
To The Music” est bien accueilli.
A l’inverse, deux mois plus tard, “Life”
est commercialement une nouvelle
déception. Heureusement, à la fin de

l’année, “Everyday People” atteint la
première place des charts américains,
l’album “Stand!” rentrant dans le
top 10 en 1969, bien aidé par la
performance électrisante et triomphale
de Sly & The Family Stone au festival
de Woodstock en août 1969 avec un
medley regroupant “Dance To The
Music”, “Music Lover” et “I Want To
Take You Higher”. Cependant, des
problèmes surgissent et s’amplifient
rapidement au sein du groupe,
notamment entre Sly, Freddie et
Larry Graham, le bassiste, dont le jeu
innovant en slap occupe une place
primordiale dans la puissance
rythmique du groupe. Surtout,
la cocaïne et le PCP détruisent la
cohésion d’un ensemble dépendant
d’un leader au comportement de plus
en plus erratique, imprévisible et
paranoïaque. Se méfiant dorénavant
de tout le monde, Sly embauche des
gardes du corps liés à la mafia pour se
protéger de son entourage et garantir
ses deals de dopes. Enfin, les Black
Panthers lui demandent de se séparer
de Errico et Martini pour les remplacer
par des Noirs. Ce qu’il ne fera pas.
Gregg Errico part toutefois en 1971,
mais parce qu’il ne supporte plus
l’ambiance délétère qui entoure les
premières séances du nouvel album.
En deux ans, Sly n’a réussi qu’à sortir
un seul single, “Thank You (Falettinme
Be Mice Elf Agin)”, mais un numéro 1.
Après la sortie d’un “Greatest Hits”,
troisième chanson en tête des charts,
“Family Affair” annonce enfin l’arrivée
de “There’s A Riot Goin’ On” en
novembre 1971. Malgré les qualités
de “Flesh”, qui voit le départ de Larry
Graham après une violente altercation,
et de “Small Talk”, les ventes ne
suivent plus. Les concerts sont
fréquemment annulés ou bâclés.
En janvier 1975, la séparation du
groupe est effective. Sly entame
alors une carrière solo. Les albums
ultérieurs attribués à Sly & The Family
Stone sont en réalité des disques en
solo avec des participations éparses
des anciens membres de la Family
comme Vet, Freddie, Cynthia ou Jerry
Martini. Peu à peu, les productions
de Sly s’espacent, ne sont plus à la
hauteur de son aura et sombrent,
comme lui, dans l’anonymat. Dans
les années 80, il continue à travailler
dans ses studios mais pour des
résultats modestes, quelques singles
et collaborations, un album, des
remixes. Après une nouvelle arrestation
pour possession de cocaïne, vivant
en partie reclus, il ne sort que pour
quelques brèves apparitions sur scène
et sur disque dans les années 1990 et
2000, notamment au côté de George
Clinton. Après l’album “I’m Back! Family
& Friends” en 2011, Sly Stone participe
à un concert de Funkadelic en 2014.❏

DISCOGRAPHIE


“A Whole New Thing” (1967)
“Dance To The Music” (1968)
“Life” (1968)
“Stand!” (1969)
“There’s A Riot Goin’ On” (1971)
“Flesh” (1973)
“Small Talk” (1974)
“High On You” (1975),
premier album solo.
“Heard Ya Missed Me, Well
I’m Back”(1976)
“Back On The
Right Track” (1979)
“Ten Years Too Soon” (1979),
des remixes disco de ses hits.
“Ain’t But The One Way” (1982)
un projet avec George Clinton, enregistré
en 1974 et 1981.
“I’m Back! Family & Friends”
(2011), reprises d’anciens succès avec
Jeff Beck, Ray Manzarek, Johnny Winter,
Bootsy Collins, auxquels se rajoutent trois
nouvelles compositions.

Compilations
(sélection)
“Greatest Hits” (1970)
“The Best Of Sly
& The Family Stone” (1992)
“The Woodstock
Experience” (2009),
le concert du festival plus “Stand!”.
“Listen To The Voices :
Sly Stone In The Studio
1965-1970” (2010)
“Higher” (2013),
coffret 4 CD de 1964 à 1977.
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