Courrier International - 29.08.2019

(Brent) #1
Vu d’Iran


  1. 7 JOURS Courrier international — no 1504 du 29 août au 4 septembre 2019


Un favori
sous les verrous
TUNISIE — Outsider de la pré-
sidentielle du 15  septembre,
Nabil Karoui a été interpellé le
23 août en lien avec une plainte
déposée en 2016 pour blanchi-
ment d’argent et évasion fiscale.
Ce magnat de l’audiovisuel de
56 ans a lancé en juin dernier
son parti Qalb Tounes “Cœur
de la Tunisie” et créé la surprise
en annonçant sa candidature. Il
s’est rapidement hissé en tête
des intentions de vote. Si bien
que son arrestation, explique le
site Business News, est critiquée
par certains comme nuisant “à la
réputation de la justice ainsi qu’à
l’image de la Tunisie”, mais saluée
par d’autres comme “un nouveau
coup contre la corruption”.

Faire barrage
à l’extrême droite
ALLEMAGNE
— Le 24 août,
35 000  per-
sonnes ont
m a n i fe s té à
Dresde à l’ap-
pel du collec-
tif #unteilbar
(“#indivi-
sibles”) pour dire non à l’ex-
trême droite, affiche à la une
le quotidien de gauche Neues
Deutschland. Le 1er septembre, la
Saxe élit son nouveau Parlement
régional. Avec 24 % des inten-
tions de vote, le parti d’extrême
droite Alternative pour l’Alle-
magne (AfD) se propulse en
deuxième position, juste der-
rière les chrétiens-démocrates
(CDU), qui chutent à 30 %. Dans
cette région de l’est du pays gou-
vernée par une grande coalition,
les sociaux-démocrates (SPD)
reculent à 7 %.

Deux ans
d’exode
BANGLADESH — Quelque
200 000  Rohingyas se sont
rassemblés le 25 août, dans un
camp de réfugiés d’Ukhia, dans
l’extrême sud-est du Bangladesh,
à l’occasion de ce qu’ils appellent
le “jour du génocide”. Près de
750 000 membres de cette mino-
rité musulmane apatride avaient
fui l’État birman de l’Arakan en

jouer un rôle de médiateur capable de
parler à toutes les parties au Moyen-
Orient, Emmanuel Macron cherchait
depuis 2017 à promouvoir une troisième
voie sur le dossier iranien, susceptible de
permettre aux deux parties de négocier.
Paris insistait sur la nécessité
de respecter le JCPOA tout en
partageant les critiques améri-
caines sur la politique balistique
de l’Iran et sur son ingérence
au Moyen-Orient. La France
optait pour un accord complémentaire
qui viserait à régler ces deux questions
ainsi qu’à pérenniser le JCPOA.
Cette approche avait toutefois fait l’objet
d’une fin de non-recevoir tant de la part
des Iraniens que de celle des Américains.
Le succès de l’initiative française ne doit
cependant pas faire perdre de vue l’essen-
tiel : le plus dur reste largement à faire. La
rencontre Trump-Rohani peut ne jamais
avoir lieu tant en raison du caractère impré-
visible du locataire de la Maison-Blanche

que des faucons des deux camps opposés
à toute forme de négociations.
Hassan Rohani, adepte d’une approche
diplomatique, n’a rien à gagner à s’afficher
aux côtés de son homologue américain,
sauf si cela peut permettre d’alléger les
sanctions américaines, qui pèsent lour-
dement sur l’économie iranienne. Donald
Trump, qui a dit à plusieurs reprises vou-
loir rencontrer un dirigeant iranien, semble
persuadé de pouvoir conclure un deal en
position de force, ce qui impliquerait que
l’Iran s’engage au niveau de l’encadrement
de ses missiles balistiques et renonce à
une grande partie de son influence au
Moyen-Orient. Cela paraît aujourd’hui
totalement irréaliste, tant ces deux dos-
siers sont perçus comme des lignes rouges
par la République islamique.
Un allégement des sanctions est-il pos-
sible sans un geste important de la part des
Iraniens? Ce geste peut-il être le retour de
l’Iran dans le cadre du JCPOA alors même
que cet accord a été largement critiqué
par la Maison-Blanche? Hassan Rohani
peut-il se contenter d’un allégement des
sanctions alors qu’une rencontre avec le
président américain susciterait de vives
critiques de la part du camp des durs et
pourrait être perçue comme un signe de
faiblesse de la part de l’Iran?
Il faudra faire preuve d’une grande créa-
tivité diplomatique pour parvenir à conci-
lier ces deux positions maximalistes. Mais
même si les négociations ne donnent aucun
résultat concret, leur simple existence pour-
rait permettre de calmer, pour un temps,
les tensions liées au bras de fer américano-
iranien dans la région. À moins que toute
cette initiative soit rendue impossible par
une nouvelle escalade irano-israélienne :
à l’instar des durs iraniens, Benyamin
Nétanyahou doit voir d’un très mauvais
œil une possible rencontre Trump-Rohani.
—Anthony Samrani
Publié le 27 août

—L’Orient-Le Jour Beyrouth

E


mmanuel Macron a réussi son coup
de poker diplomatique. Le prési-
dent français a annoncé [le 26 août]
que les discussions du G7 ont créé les
“conditions d’une rencontre entre
Donald Trump et Hassan Rohani”.
Autrement dit : le volontarisme
d’Emmanuel Macron a permis de
ramener Iraniens et Américains
à la table des négociations, et à la
France de se placer comme un médiateur
de la crise. Cette avancée a été rendue pos-
sible par la visite surprise du ministre ira-
nien des Affaires étrangères, Mohammad
Javad Zarif, à Biarritz, invité par le pré-
sident français en coordination avec son
homologue américain. Paris cherche à
convaincre Washington de donner un peu
d’air à Téhéran, en lui permettant de vendre
à nouveau son pétrole à certains pays, en
contrepartie de quoi Téhéran s’engage-
rait à respecter à nouveau les limitations
prévues par l’accord nucléaire (JCPOA).
Donald Trump a confirmé [le 26 août]
qu’une rencontre avec le président
Rohani était possible dans les prochaines
semaines “si les circonstances sont conve-
nables”. Convaincu que la France doit

G


Coup de maître ou


coup d’épée dans l’eau?


À Biarritz, l’éventualité d’une rencontre entre les présidents
américain et iranien a pris forme. Un succès pour
la diplomatie française juge ce quotidien libanais, même si,
maintenant, “le plus dur reste largement à faire”.

↙ Le ministre iranien des Affaires étrangères,
Mohammad Javad Zarif, devant les leaders du G7.
Dessin de Bleibel paru dans The Daily Star, Beyrouth.

● “M. Rohani, les avancées
s’obtiennent par la persévérance
et le travail, pas en rencontrant untel
et untel”, interpelle le quotidien
ultraconversateur Kayhan,
après l’évocation d’une éventuelle
rencontre Trump-Rohani.
“Le coup de fil ‘historique’
entre Obama et Rohani
en septembre 2013 n’avait rien donné.
Ces ‘communications spéciales’
ne servent pas nos intérêts nationaux.
Une rencontre aujourd’hui ne ferait
que renforcer les actions
contre l’Iran”, assure le quotidien,
qui reflète habituellement
la ligne d’Ali Khamenei, guide
religieux et numéro un du régime.

Emmanuel Macron cherche
depuis 2017 à promouvoir
une troisième voie
sur le dossier iranien.

ANALYSE
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