Saveurs - 05.2019

(lily) #1

SAVEURS No^255 - 3


ÉDITO


Au moment de boucler ce numéro, j’apprenais la dis-
parition de la cinéaste Agnès Varda. Cette nouvelle m’a
d’autant plus émue que je venais tout juste de revoir
son film Les Glaneurs et la Glaneuse. Un tour de France
intimiste de la cinéaste qui, caméra à la main, capte
des images de gens qui ramassent dans les champs ou
récupèrent sur les trottoirs. C’est le texte d’Emmanuelle
Jary sur La Tente des Glaneurs (page 18) qui m’a donné
envie de revoir ces personnages démunis, filmés avec
beaucoup d’humanité.

Ce souvenir en appelle un autre. Un voyage en voi-
ture entre Marrakech et Essaouira, par le chemin des
écoliers. Pour déjeuner, avec mon compagnon, nous
nous sommes arrêtés dans un restaurant de tajines au
bord de la route. Le plat, fumant et parfumé, a été servi
rapidement avec un pain rond encore chaud. Un délice,
mais trop copieux. On se levait pour partir quand un
jeune garçon, d’une douzaine d’années à peine, s’est
approché de nous. Il semblait affamé. On lui a donné
les légumes qui restaient entre deux morceaux de pain
en pensant qu’il allait se jeter sur cette nourriture. Mais
non. Il a apporté ce sandwich de fortune à un vieil
homme assis contre un mur, puis il est parti après un
dernier regard sur les tables.

J’ai toujours été impressionnée par celles et ceux qui
trouvent des solutions pour aider leurs prochains et qui
les appliquent. C’est ce que fait Jean-Loup Lemaire avec
son association La Tente des Glaneurs : récupérer des
invendus sur les marchés pour les redistribuer à ceux
qui en ont besoin. Agnès Varda disait qu’elle avait ren-
contré pour son documentaire des gens qui glanaient
par nécessité, d’autres par plaisir et d’autres encore par
habitude. Parions qu’en 2019, elle aurait aussi filmé ces
gens qui glanent par altruisme.

Sylvie Gendron
Rédactrice en chef

V. Lhomme

LES CABAS


DE LA DIGNITÉ


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