Saveurs - 05.2019

(lily) #1

PORTRAIT DE CHEF Julien Duboué


SAVEURS No 255 - 83


comme commis et monte jusqu’au poste de sous-chef avant
de changer de maison. « Je ne voulais pas faire que des pluches de
salade », commente-t-il. En 2005, il s’envole pour New York chez
Daniel Boulud. Une expérience dont il ne garde pas un très bon sou-
venir : « J’étais trop jeune pour la vie new-yorkaise », analyse-t-il.
Surtout, la soif d’entreprendre le taraude. À 26 ans, il décide
d’ouvrir son premier établissement parisien, A Faria (« à table »
en basque), dans le 15e arrondissement. « On a eu de la chance.
Yves Camdeborde venait y faire ses avant-matchs, en pleine Coupe
du monde de rugby. » Le bouche-à-oreille fonctionne, et la table
d’hôtes à l’entrée du restaurant fait le plein. On y sert des tapas
en apéro. Fort de ce succès, Julien Duboué envisage d’ouvrir un
second établissement autour d’une table à partager « pour faire
manger les gens les uns à côté des autres ». Ce sera Dans les
Landes, en 2011, dans le 5e arrondissement, restaurant devenu
rapidement trop petit. Julien Duboué parie alors sur un désert
gastronomique, le quartier de la Bourse à Paris, et ouvre en 2013
A Noste (« chez nous » en gascon). Dans ce vaste espace, il peut
déployer de longues tables d’hôtes où l’on partage des tapas toutes
plus appétissantes les unes que les autres : chipirons frits au piment
d’Espelette, nems de canard croustillants sauce thaïlandaise, crème
chaude de maïs et foie gras mi-cuit... Les plus pressés peuvent se
rabattre sur A Mia, le comptoir à emporter juste à côté. À l’étage
se niche La Table, où se décline un menu unique, moins canaille,
plus élégant. Julien Duboué s’y amuse une fois par mois, le temps
d’une soirée, à composer autour d’un produit, sans pour autant
être démonstratif. « Je n’ai pas envie de passer mon temps enfermé
dans une cuisine à dresser une assiette pour plaire à un guide,
affirme-t-il. Les codes de la haute gastronomie ne me conviennent
pas. Je veux me faire plaisir en racontant une histoire, pas me
cacher derrière une technique. » L’histoire, il la raconte fort bien,
à Corn’R, comptoir à manger dédié au maïs ou, depuis avril 2018,
chez Boulom, dont on a pu suivre le projet sur les réseaux sociaux.
« L’idée est de cuisiner autour d’un four à pain, comme ma mère
et ma grand-mère qui cuisaient leurs grands plats dans le four du
boulanger », explique Julien Duboué.

Buffet de luxe à partager
Une ancienne brasserie lyonnaise dans le nord de Paris a été méta-
morphosée en une boulangerie de quartier, dont l’arrière-salle,
cachée façon speakeasy, recèle un restaurant convivial organisé
autour d’un généreux buffet. Les beaux produits y sont à l’honneur,
comme la charcuterie d’Éric Ospital, les huîtres de Joël Dupuch, les
viandes de Michel Pouzol, les canards de Barthouil ou la polenta
de Jon Harlouchet. Il confectionne aussi des plats en croûte de
pain. « Avec mon équipe et mon pâtissier Matthieu Dalmais, on
a suivi une formation de trois jours auprès d’un MOF et on s’est
lancés », jubile le jeune chef. Les produits, ce sont aussi les fruits
et légumes que lui envoient ses parents de leur potager landais.
Leur fils leur a fait découvrir de nouvelles variétés, et ils en font

pousser aujourd’hui une quarantaine en bio pour le restaurant.
Cette belle histoire de famille se prolonge avec le lancement en
septembre des Repas d’Alba, une gamme de petits pots conçue
avec Delphine, l’épouse de Julien, et nourrie de leur expérience de
parents d’Alba, 3 ans, et Gaspard, 1 an. Une initiation au goût, avec
des vrais petits plats inspirés des grands comme « mon premier
poulet basquaise ». C’est aussi une équipe de quatre-vingt-dix per-
sonnes que Julien Duboué manage dans la bonne humeur sur tous
ses (nombreux) projets. « On fait des soirées, on se réjouit ensemble
des réussites, du plongeur au sommelier. Je ne travaille pas pour
moi. Chacun apporte sa pierre. » Un esprit sportif hérité du rugby.
Et surtout, comme à table, l’envie d’être ensemble et de partager. v

Boulom, 75018 Paris. Ouvert tous les jours, brunch sam. et dim. : 39 €.
Réservation à partir de 8 pers. Formules buffet : 29 € (déj.) et 39 € (dîner).
A Noste Tapas, 75002 Paris. Ouvert tous les jours.
Réservation à partir de 8 personnes. Carte entre 20 € et 40 €.
A Noste La Table, 75002 Paris. Fermé le dimanche.
Formules : 29 € et 38 € (déj.), 49 € et 60 € (dîner).
A Mia, 75002 Paris. Fermé sam. et dim. Carte entre 15 € et 20 €.
Corn’R, 75001 Paris. Fermé sam. et dim. Formules : 13 € et 16 €.

CABILLAUD EN
CROÛTE DE PAIN,
ÉPINARDS
ET NOISETTES
Recette p. 84

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