Courrier International - 22.08.2019

(lu) #1

Courrier international — no 1503 du 22 au 28 août 2019 7 jours. 9


constituer la plus grande menace
pour les civils afghans, alors que les
États-Unis et les talibans négocient
un accord pour mettre un terme à
dix-huit ans de combats”, prévient
Time Magazine.


Opération


chaos


Royaume-uni — Des documents
confidentiels anticipant les effets
sur le Royaume-Uni d’un Brexit
sans accord ont
été publiés par
The Sunday
Times le 18 août.
Les autorités
s’attendent entre
autres à une hausse
du prix de la nour-
riture et à un réta-
blissement de la
frontière physique
entre l’Irlande et
l’Irlande du Nord.
“Ces documents
détaillent les conséquences les plus
plausibles et non les scénarios catas-
t rophes”, précise le journal domi-
nical. Cette fuite complique la
tâche du Premier ministre Boris
Johnson, dont l’objectif est de “faire
planer la menace réaliste d’un Brexit
sans accord afin de convaincre l’UE
de rouvrir les négociations”, rappelle
The Daily Telegraph.


Esclavage :


400 ans après


État s - u n i s
— Sombre une
pour le N e w
York Times
Magazine à
l’occasion des
400 ans de
l’arrivée des premiers esclaves
africains en Amérique. Sur sa
couverture, où ne figure qu’une
ligne d’horizon à perte de vue,
on peut lire : “En août 1619, un
navire est apparu à l’horizon ici,
près de Point Comfort, un port de
la colonie britannique de Virginie.
Ce navire transportait plus de
20 Africains asservis qui furent
vendus aux colons. Aucune facette
de ce pays, qui était alors dans sa
genèse, ne peut être dissociée des
siècles d’esclavage qui ont suivi.
Quatre cents ans après ce moment
fatidique, il est temps de raconter
notre histoire telle qu’elle s’est véri-
tablement déroulée.”


ou les machines spéciales. Et l’émergence
économique de la Chine s’est révélée par-
ticulièrement avantageuse pour elles : les
constructeurs allemands offrent ce dont
ce pays a besoin, un pays qui est en train
de devenir une nation industrielle et dont
une grande partie de la population voit
sa prospérité augmenter et veut aussi
rouler en Volkswagen, BMW et
Mercedes. Deuxièmement, l’Al-
lemagne a mis en œuvre sous
Gerhard Schröder des réformes
importantes qui ont permis à
beaucoup de gens de trouver du
travail. Troisièmement, les gouverne-
ments d’Angela Merkel ont réagi intelli-
gemment à la crise financière et contribué
ainsi à la reprise rapide de l’économie,
à la baisse de l’endettement, et même

—Frankfurter Allgemeine
Zeitung Francfort

L


’État allemand doit-il à nouveau
s’endetter? Le gouvernement fédé-
ral doit-il mettre au point un plan
pour relancer l’économie? Les voix qui
appellent à renoncer à la politique des
années passées se font de plus en
plus fortes – car le conflit entre
Pékin et Washington a des effets
de plus en plus importants sur
l’économie mondiale, en particu-
lier sur les pays exportateurs. On
est bien au-delà de la question des droits
de douane ou de celle des ventes de soja,
et il n’y a pas d’accord en vue susceptible
de ramener rapidement le calme.
Bien entendu, la classe politique ne fait
pas la sourde oreille à la situation écono-
mique, d’autant que des élections régionales
importantes doivent avoir lieu prochai-
nement. Les organisations patronales et
les syndicats demandent un soutien, ce
qui est compréhensible, mais la chance-
lière devrait camper sur ses positions, et à
raison : il n’est actuellement pas nécessaire
de lancer un vaste programme d’aide.
L’économie allemande, la plus grande
d’Europe, n’est pas dans une crise
telle qu’il faille recourir à l’ar-
gent du contribuable (en
grande quantité) pour en
venir à bout.
Pour s’en convaincre,
on peut se pencher sur son
évolution sur le long terme :
le PIB allemand a considérable-
ment augmenté au cours des vingt
dernières années, puisqu’il est passé de
2 milliards à près de 3,5 milliards d’euros,
soit un accroissement de 70 %. Dans le
même temps, le chômage n’a cessé de dimi-
nuer, et le nombre d’actifs d’augmenter –
ils sont actuellement 45 millions, selon les
statistiques. Il n’y a jamais eu autant de
gens qui ont du travail en Allemagne. Il
ne faut pas oublier ni occulter tout cela.
On peut en dire autant des raisons
de cette évolution que le monde entier
jalouse. Premièrement, les entreprises alle-
mandes, petites et grandes, convainquent,
que ce soit dans l’automobile, l’ingénierie

ALLEMAGNE


Récession, vous avez


dit récession?


La première économie européenne s’est contractée de 0,1 %
au deuxième trimestre, ouvrant le débat sur la mise en œuvre
de mesures de relance. Ce journal conservateur s’y oppose.

Édito

à la réalisation d’excédents budgétaires
depuis quelques années.
Dans ce contexte, la contraction actuelle
du PIB de l’Allemagne apparaît comme
minime [mais elle pourrait se confirmer au
troisième trimestre selon la Bundesbank].
Il n’y a pas de quoi paniquer. Oui, les com-
mandes baissent dans l’industrie allemande,
et certains groupes connus ont annoncé
des licenciements. Les constructeurs auto-
mobiles dépensent beaucoup d’argent pour
trouver des alternatives rentables au moteur
à combustion et mettre au point des logi-
ciels avancés pour les véhicules de demain.
Il n’y a pas là de quoi s’inquiéter, au
contraire. Ils osent innover et donc prennent
des risques parce que tout changement
n’est naturellement pas planifiable dans
les moindres détails et que la réussite
n’est jamais sûre à cent pour cent. Serait-il
mieux qu’ils s’abstiennent? Les grands
groupes de nouvelles technologies comme
Amazon, Google ou Microsoft renforcent
leurs centres de recherche en Allemagne
et recrutent volontiers des informaticiens
formés dans les universités allemandes.

Prétexte. Si on exige aujourd’hui des
mesures de relance, on doit expliquer
concrètement les problèmes qu’elles sont
censées résoudre. Ce n’est pas en construi-
sant des routes et des ponts qu’on va appor-
ter une solution au fait que le président
américain remet en cause les règles de la
mondialisation et poursuit un nationa-
lisme économique à somme nulle, c’est-à-
dire où l’un ne peut gagner que si l’autre
perd. Si c’est ce qui nous attend à moyen
terme, il appartient à chaque entreprise
de trouver une solution. Ce n’est pas
le rôle de Berlin.
Dans le même temps, il est tout
simplement faux de rendre Donald
Trump responsable de tous les défis
économiques que connaît notre pays.
Le président américain n’est pour rien
dans le fait qu’aucune entreprise de
logiciels allemande de rang mon-
dial n’a été fondée depuis SAP le
1 er avril 1972. Ce n’est pas Trump
qui freine le développement de
l’Internet à haut débit ni celui
de la formation en informatique
à l’école. Ce n’est pas à cause de
lui que l’électricité est plus chère chez nous
que dans les autres pays et que le gouver-
nement agit beaucoup en matière de poli-
tique sociale, mais s’occupe relativement
peu des entreprises.
Ce sont là des domaines où Berlin peut
faire beaucoup pour la réussite économique
de l’Allemagne à long terme. Si des inves-
tissements publics pertinents peuvent
aider, allons-y. Car il est aussi vrai que
les conditions sont vraiment favorables
en ce moment.
—Alexander Armbruster
Publié le 19 août

↓ Dessin de Cajas,
Equateur.

↓ Économie. Dessin de Pavel
Constantin, Roumanie.
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