Cerveau et Psycho N°113 – Septembre 2019

(Ron) #1

expérience avec ses parents, il lui est alors plus
difficile d’en parler par la suite. Voilà pourquoi,
selon lui, il est utile de consulter les sites de cri-
tiques de films pour se faire une idée du type de
contenu proposé par les dessins animés.


LES ENFANTS NE DOIVENT
PAS REGARDER SEULS
Cassibba rappelle qu’en général, pour com-
prendre quel effet a eu un film sur un enfant, il
faut savoir dans quel contexte il a été visionné,
seul ou avec les parents : voir un film aux côtés
d’un adulte qui vous prend dans ses bras ou vous
donne des explications fait toute la différence.
D’ailleurs, souvent, les enfants regardent plu-
sieurs fois le même dessin animé. « Cela n’en
amplifie pas l’effet, assure la psychologue. Au
contraire, pour un enfant, la prévisibilité est


importante : l’idée de pouvoir contrôler les évé-
nements en arrêtant le film, en revenant en
arrière ou en anticipant le cours de l’histoire
diminue l’anxiété qu’il ressent. »

« MAIS CE N’EST QU’UN POISSON! »
Le fait que la plupart des protagonistes des
dessins animés les plus dramatiques soient des
animaux ne change rien à l’affaire. « Quand un
jeune suit l’histoire de Nemo, il voit un enfant et
non un poisson, et c’est exactement ce que
veulent les auteurs du film, explique Colman.
Mes enfants ont aussi été frappés par la mort de
la petite araignée dans Le Petit Monde de
Charlotte, alors qu’ils n’ont aucun scrupule à en
écraser à la maison. » Les premiers spécialistes
de l’enfance conseillaient déjà d’avoir des ani-
maux dans les salles d’attente pour que les

COCO RACONTE LE DEUIL


AUX ENFANTS


D


ans l’histoire du cinéma d’animation pour enfants, aucun film n’a affronté
le thème de la mort aussi directement que Coco, le long-métrage de 2018
qui a remporté deux Oscars. Un petit garçon, Coco, arrive par erreur dans l’au-delà
et demande l’aide de son arrière-grand-père défunt pour rentrer à la maison
et réaliser son rêve : devenir musicien. Mais le vrai thème du film est notre rapport
aux défunts, et le voyage de Coco dans le Pays des morts est avant tout un parcours
pour comprendre ce lien.
Se référant à la tradition latino-américaine, le film décrit une mort en deux temps.
D’abord, celle du corps, qui conduit à une seconde existence sous forme de squelettes
dans une ville des morts où il est encore possible de s’amuser. Les défunts reviennent
aussi dans le monde des vivants, une fois par an, durant le Dia de Muertos (le jour des
Morts). Puis survient la mort finale, ou définitive, quand aucune personne encore vivante
ne se souvient du défunt. Dans le film, le squelette se dissout alors littéralement...
Le souvenir des morts chez les vivants est donc un élément crucial, qui garantit une forme
de survie d’une génération à l’autre ; la famille a pour mission de protéger et de perpétuer
cette mémoire. L’idée n’est pas neuve, mais la raconter aux enfants (et aux grands) dans
un dessin animé splendidement réalisé aide à comprendre le deuil, en lui attribuant une
tâche précise : ce n’est pas pleurer les défunts, mais plutôt en conserver le souvenir.

Coco

© Walt Disney Pictures - Pixar, 2017.
(Capture d’écran)
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