Vélo Tout Terrain N°247 – Septembre-Octobre 2019

(Sean Pound) #1

(^30) RÉTRO : Retrouvez les vélos et les personnes qui ont fait l’histoire du VTT
Vélo Tout Ter rain : Parlez-nous
de vos débuts en VTT?
Gilles Sanders : J’ai découvert le VTT
au Colorado, et à mon retour en
France, comme j’habitais à 10 km de
Saint Gaudens, je suis passé par hasard
à l’usine et j’ai rencontré Max Com-
mençal. A l’époque, il cherchait à
monter un team et, comme j’avais
déjà fait mes preuves sur route, il m’a
dit qu’il me verrait bien sur un VTT.
Ça s’est fait aussi simplement que
ça! J’ai aussi collaboré avec François
Gachet sur le développement des
produits Sunn. Nous avons
commencé à partager notre temps
entre la conception, les tests des
prototypes et les compétitions. En
gros, 50% de notre temps était consa-
cré aux tests. En parallèle, venant de
la route et ayant suivi de nombreuses
séances d’entraînement, j’ai “motivé”
François en lui expliquant que faire
de la descente nécessitait une condi-
tion physique complète. On a alors
travaillé ensemble sur des plans
d’entraînement. Je me souviens, à
l’époque, on nous prenait pour des
fous!
VTT : Quel regard portez-vous
sur le VTT aujourd’hui?
G.S : Je pense qu’il y a eu un tournant
dans le VTT qui a séparé les pilotes
professionnels du grand public. Je
me souviens que lorsque nous
courions, une fois la compétition
terminée, nous étions disponibles
pour le public, et il nous arrivait régu-
lièrement de manger avec les clients
de la marque! Il n’y avait pas de fron-
tière entre nous et eux. Mais dès que
le team s’est développé, notamment
avec le gros camion et que l’on a
commencé à mettre des banderoles
autour pour en interdire l’accès, c’est
à ce moment-là que le fossé s’est créé.
Encore aujourd’hui, si on prend un
exemple avec Julien Absalon, mettez-
PIONNIER
DU VTT
© Polaroïd : http://lured2stock.deviantart.com/
logique.On nous parlait de mania-
bilité lorsque je roulais chez Sunn,
vantant les mérites des roues
26 pouces par rapport à la route et
avec les 29 pouces, on arrive au même
diamètre! Alors oui, je comprends les
capacités de franchissement accrues,
mais pour un gars qui fait 1,65 m au
garrot, on fait comment? Il n’y a qu’à
voir l’arrivée récente des 27,5” pour,
à mon avis, comprendre que le 29”
n’était pas si adapté que ça.
VTT : Et l’assistance électrique,
vous en pensez quoi?
G.S : Disons que je peux comprendre
l’intérêt pour quelqu’un qui a du mal
le au milieu d’une place, à part
quelques gens, personne ne le recon-
naîtra. Prenez Indurain ou Contador,
tout le monde les connaît. Le VTT
professionnel s’est trop éloigné du
grand public, c’est mon avis.
VTT : Qu’est-ce qui a le plus
changé dans le VTT selon vous?
G.S : Je dirais que les VTT tout-
suspendus ont vraiment changé la
façon de rouler de tous : plus confor-
tables, aptes à passer partout ; c’est
vraiment ce qui a révolutionné le
VTT moderne. Après, plus récem-
ment, j’ai vu arriver les 29 pouces et
j’avoue ne pas encore comprendre la
à rouler par rapport à son âge. Je
peux aussi comprendre l’intérêt en
ville, c’est évident, mais quand un
gars de 35 ans vient acheter un VAE,
là, je bloque. Selon moi, le VTT est un
sport ultra complet, et je parle en
connaissance de cause, alors se faire
aider par un moteur, où est le sport
dans tout ça? Le VTT, c’est difficile,
cela nécessite un entraînement régu-
lier, comme je fais encore aujourd’hui.
Moi, en magasin, j’ai des 29”, mais j’ai
aussi beaucoup de clients qui veulent
encore du 26” ou du 27,5”.
VTT : Un sportif que vous
admirez et pourquoi?
G.S : Personne en particulier. Je dirais
quand même Julien Absalon pour
son palmarès impressionnant, sa
conduite dans le sport en général.
Nicolas Vouilloz, pour les mêmes
raisons, il a marqué son époque.
Après, je pense que quelqu’un qui
retient mon attention, c’est un spor-
tif qui se conduit selon une certaine
éthique en compétition, mais aussi
en dehors. C’est très important de
véhiculer à tout moment une image
correcte du sport qu’il pratique. En
tout cas pour moi. Un peu comme
dans le rugby, il faut savoir mouiller
le maillot et partager des moments
pendant et après la compétition, tout
en restant droit dans ses bottes.
VTT : Le mot de la fin de Gilles
Sanders?
G.S : Je suis heureux que le VTT soit
enfin reconnu comme une vraie
discipline sportive et je constate
que les pratiquants sont aussi
passionnés que les pros. Il y a vingt
ans, on ne savait pas trop où cela
allait nous mener, mais aujourd’hui,
je regarde ça comme une belle aven-
ture à laquelle j’ai participé.!
Gilles Sanders
« Je constate que
les pratiquants
sont aussi
passionnés
que les pros »
Gilles Sanders a été le premier pilote du célèbre team Sunn au début de
l’aventure. Après une belle carrière sur route, il passe au VTT et roule au plus
haut niveau : coupe de France, d’Europe et du monde. Il a arrêté de rouler
en 1995 pour ouvrir en 2011 un magasin à Narbonne.

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