Premiere - 09.2019

(Jeff_L) #1
PAR DARIO ARGENTO. Coincé dans la vitrine
d’une galerie d’art, un homme assiste à l’agression
d’une jeune femme. Nous sommes en 1969,
dans L’Oiseau au plumage de cristal : le manifeste
du cinéma de Dario Argento.
u PROPOS RECUEILLIS PAR SYLVESTRE PICARD
u ILLUSTRATION GABRIEL DE L AUBIER

L’homme à la caméra
« Avec Vittorio Storaro [son directeur
de la photographie], nous nous
sommes rencontrés à Cinecittà.
C’était son premier film en couleur.
Avant L’Oiseau..., Vittorio n’avait fait
que du noir et blanc, et c’était mon
premier long métrage : nous étions
tous les deux des novices. Je préfère
travailler avec des débutants, comme
ça il n’y a aucune pression. Vittorio
ne pouvait pas m’embêter puisqu’il
devait s’occuper de la couleur...
Donc, nous avons très bien travaillé
ensemble. (Rires.) Après L’Oiseau...,
j’avais commencé à préparer la suite,
Le Chat à neuf queues. Mais il avait
déjà signé avec Bernardo Bertolucci
pour tourner Le Conformiste. On
s’est disputés, et après il est parti aux
États-unis... Nous n’avons plus
tourné ensemble, mais nous nous
sommes réconciliés. »

Les sculptures
« Ce sont des œuvres originales de Romeo Costantini,
qui ont été créées pour le film. Je voulais qu’elles soient
“extraterrestres”, comme si elles surgissaient d’un film
de science-fiction, pour donner à la scène l’aspect
d’un rêve. Car j’avais rêvé cette scène avant de l’écrire.
J’étais en vacances en Tunisie, au bord de la mer, je me suis
endormi au soleil et le rêve est venu : celui de quelqu’un
qui assiste à une scène et qui se trompe sur ce qu’il voit.
L’architecture m’a toujours fasciné : pour Ténèbres, je me
suis inspiré de Giorgio de Chirico, ou des films d’Antonioni,
qui était lui-même architecte... Il faut être un bon architecte.
L’architecture d’un film, c’est fondamental. »

Le studio
« Le film se passe à Turin mais il n’y avait pas de techniciens là-bas, donc nous avons tourné à Rome.
La galerie Ranieri n’existe pas : nous l’avons construite en studio. Nous voulions tout inventer
dès le départ. Nous n’avons même pas cherché un vrai lieu. Tout a été créé pour le film. Le décorateur
suivait mes directives. La couleur, le nombre et le type de sculptures, les portes coulissantes...
Tout en blanc pour qu’on voit mieux le sang. C’était la scène la plus importante, le symbole du film
en quelque sorte. Elle devait être très précise. J’ai suivi la construction pas à pas. J’ai voulu
enfermer le personnage comme un poisson dans un aquarium. Tout se passe devant lui et il est
impuissant, il ne peut qu’observer. »

MA SCÈNE CULTE


18 Septembre 2019

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