Nat Images N°57 – Août-Septembre 2019

(やまだぃちぅ) #1

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Les chasseurs des hauts plateaux | Adrien Lesaffre


jours à bon vent. Le loup s’élance à
une vitesse prodigieuse et ressort
vainqueur! Cette fois j’avais couplé
mon multiplicateur x1,4 au téléobjec-
tif afin de gagner en distance. Le
choix d’une vitesse d’obturation éle-
vée (1/2000 s) s’avère nécessaire,
tant les déplacements de l’animal
sont rapides. Le contraste, une fois
de plus, entre les couleurs très lumi-
neuses de la végétation et la robe du
loup me semble intéressant.

Sauvage proximité
Plus tard, alors que je pensais
prendre une photo du paysage, j’en-
trevois un lièvre de Starck complète-
ment immobile calé dans un buisson.
Sa meilleure tactique pour ne pas
être vu! C’est aussi un mets très ap-
précié du loup d’Abyssine.
Après avoir pris quelques photos
de ce dernier, je repars rejoindre
Baptiste. Je le retrouve allongé face
un loup conciliant. Lentement, je me
dirige vers un bon emplacement.
Chaque geste doit être calculé pour
ne pas éveiller son instinct de fuite. Il
ne m’a pas identifié comme menace.
Vu mais pas venté, car je suis par
chance face au vent. Après quelques
minutes, nous comprenons que ce
loup n’est pas du tout effrayé ni
même dérangé par notre présence. Il
viendra renifler nos affaires et mar-
quera même mon trépied! Un mo-

ment incroyable où on se sent si
proche de la vie sauvage mais à la
fois si petit. Et le voilà qui se met en
chasse tout en restant à proximité! Il
passe parfois si près de nous
qu’avec nos encombrants téléobjec-
tifs il devient impossible de réaliser
des clichés. Je troque alors mon télé
contre un zoom 100-400 mm IS
USM II et remplis mes cartes mé-
moire. Une journée mémorable.
Cohabition Homme-Loup
Au cours de nos expéditions à
plus de 3500 m d’altitude, nous au-
rons eu la chance de voir pas loin
d’une quinzaine de loups, parfois
seuls, parfois en bande, scrutant,
chassant ou adossés à une roche
encore chaude.
Nous avons eu le plaisir d’admirer
un animal paisible au milieu des
calmes plateaux aux reflets verts et
argentés. Mais même si l’homme co-
habite avec cette espèce rare, nous
ne pouvons que constater que son
habitat fond comme neige au soleil,
grignoté par l’agro-pastoralisme et
d’autres dangers encore plus dévas-
tateurs, comme la rage et d’autres
infections véhiculées par les chiens
errants. Sans compter l’hybridation.
Les loups d’Éthiopie ne sont plus
que quelques centaines seulement à
déambuler sur les prairies d’altitude.
Adrien Lesaffre
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