Nat Images N°57 – Août-Septembre 2019

(やまだぃちぅ) #1

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Nat’Images


Des strigidés aux chiroptères, il n’y
a qu’un pas, semble-t-il. Et le fait que
l’une et l’autre de ces familles soient
principalement nocturnes n’y est pas
étranger. C’est en Lorraine que tout a
commencé, alors que David Auper-
mann assistait l’un de ses amis dans
la recherche et l’observation de l’ef-
fraie des clochers. Se piquant d’un
vif intérêt pour la dame blanche, il
commence à faire du repérage dans
divers endroits jusqu’à partir explorer
un fort datant de la Seconde Guerre
mondiale. Il se retrouve alors nez à
nez avec une horde de chauves-sou-
ris. Après avoir longtemps suivi le pic
noir ainsi que d’autres espèces fami-
lières de nos campagnes, voilà notre
Lorrain pleinement impliqué pour la
cause des mammifères volants. Le
sujet l’intéresse au plus haut point et
comme il ne fait pas les choses à
moitié, il commence à faire du comp-
tage en hiver et assurer un suivi
scientifique. Mais l’activité qu’il ap-
précie le plus et à laquelle il consacre
un temps conséquent, c’est le pié-
geage photo, unique façon de saisir
l’animal en vol de nuit.

Chasser les fantômes
David doit d’abord comprendre
comment photographier les chirop-
tères en vol, car la technique ne s’im-

Ci-contre–
Murin
de Bechstein
J’avais prévu de
photographier des
chauves-souris qui
venaient régulière-
ment boire sur le
point d’eau. La
surface était satu-
rée d’insectes
morts. La chauve-
souris fit deux
passages sans
que je sache
si elle avait bu.
Sony A77, 16-50
mm f/2,8 à 40 mm,
f/6,3, 24 s, 200 ISO
et 5 flashs Metz 50
AF-1, 1/16

provise pas. Il commence par utiliser
une barrière infrarouge simple pour
saisir à la surface de l’eau des mu-
rins de Daubenton, une espèce qui
présente l’avantage de ne pas chan-
ger inopinément de secteur. Deux ou
trois individus tournoyant sur un
“trou d’eau” lui donnent l’occasion
de se faire la main sur l’éclairage :
gérer les contre-jours, mettre en va-
leur l’arrière-plan, etc. Un travail mi-
nutieux dont il consigne les succès
et les échecs dans “un cahier à spi-
rale de 96 pages”. Quand les
chauves-souris ne sont pas au ren-
dez-vous, il procède à des essais à
vide pour essayer de comprendre et
gérer les distances : “Les flashs sont
réglés à une certaine vitesse, une
certaine puissance. En revanche
pour éclairer un arbre, un rocher ou
un autre élément du décor il faut
augmenter la puissance pour ne pas
qu’ils se confondent avec la chauve-
souris et provoquer un effet fantôme.
Toute la difficulté est là.”

Prises dans l’entonnoir
Ayant démarré la photo à l’époque
de l’argentique avec du matériel Mi-
nolta, notre photographe travaille au-
jourd’hui avec des appareils Sony
(Alpha 77 et 77 II) sur lesquels il peut
monter ses nombreux objectifs Mi-
nolta chèrement acquis. Ses flashs

Metz, il est allé les acheter en Alle-
magne, “ce qui permet de les tou-
cher à un tarif plus intéressant”. Deux
sont dédiés à l’éclairage du décor,
trois aux chauves-souris : un à droite,
un à gauche et un en contre-jour.
“Mon montage est relativement large
mais je procède à des essais. Si on a
un grand layon forestier, on va à l’en-
droit qui se resserre le plus. Un gou-
lot d’étranglement est l’endroit idéal.
Pas plus de 2 m - 2,50 m de large,
après ça devient compliqué à mettre
en œuvre. Il m’arrive d’utiliser des
tendeurs pour tirer un peu les
branches et ainsi fermer le passage.”

Des livres au terrain
Pour savoir où trouver ses sujets
et connaître leurs habitudes, David
s’est d’abord plongé dans les livres.
Il a ensuite recoupé ces informations
avec ses observations de terrain. Au
final, il a réalisé toutes ses photos
dans un rayon de 30 km autour de
son domicile, 800 m pour les plus
proches : “J’habite un endroit où il y
a beaucoup de forêt, ça aide. Toutes
les espèces cohabitent en bonne in-
telligence et utilisent les mêmes cor-
ridors de déplacement. Ça relève
aussi du hasard, on ne peut pas par-
ler de régularité avec les chauves-
souris ; en fonction du vent, on trouve
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