Première N°499 – Septembre 2019

(Nancy Kaufman) #1
3 QUESTIONS À...

BRUNO

barde

Arrivé au festival en 1995, son directeur
raconte la métamorphose de la manifestation
et les défis auxquels elle doit faire face.
u PAR THIERRY CHEZE

Dans ce festival qui l’avait bannie depuis
sa création, vous avez choisi d’instaurer
une compétition à Deauville en 1995. Quelle
en est la raison?
Quand Lionel Chouchan m’appelle en 1994 pour
m’occuper de la presse de Deauville, son festival
est moribond. Quand il me demande mon avis, je
lui réponds... que Deauville est foutu. Que l’avenir
passe par le cinéma indépendant, peu ou pas re-
présenté. Là, il décide de m’engager. Je lance donc
cette compétition de films indépendants. Le public
répond tout de suite présent et, au fil des années,
elle ne cesse de grandir. Par la suite, j’ai créé une
section documentaire, Les docs de l’Oncle Sam, et
Deauville Saisons, réunissant des séries, qui
accueille en 2019 un marathon Game of Thrones. 


Si vous ne deviez garder qu’une image de vos
vingt-cinq ans de festival, quelle serait-elle?
Ce soir de 1995 où Clint Eastwood a demandé à
revenir discrètement à la fin de la projection de Sur
la route de Madison pour entendre les réactions...
et les spectateurs, bouleversés, qui l’aperçoivent
soudain dans le noir et tournent comme un seul
homme leur visage vers lui.


En quoi l’organisation de ce festival a-t-elle
le plus changé en vingt-cinq ans ?
On vit une époque où les gens finissent par culpa-
biliser de faire la fête, ce qui est contraire à
l’esprit d’un festival. Ensuite, le marketing a pris le
pas sur l’artistique  : les studios ont des impératifs
économiques tels qu’ils ne respectent plus les festi-
v a l s. M ê m e s i u n c i n é a s t e s o u h a i t e p r é s e n t e r s o n f i l m
ici, il en sera empêché par une stratégie offrant l’ex-
clusivité à Toronto qui, à mes yeux, est un m ar c h é d é -
potoir. Pour moi, seul Cannes a la légitimité d’exiger
l’exclusivité. Les autres devraient comprendre que
pour protéger le cinéma, il faut faire circuler les films
afin que les gens puissent les voir partout, même
s’ils ne sont pas les premiers. Cette obsession de
l’exclusivité est absurde et néfaste. u


Pour le détail des sélections de l’édition 2019 :
http://www.festival-deauville.com


P ORTf OLIO

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