Sud Ouest Sud-Gironde - 2019-08-23

(Romina) #1

SUD OUESTVendredi 23 août 2019


La belle carte postale. Des ruelles
minuscules, faites de sable et de
roses trémières. Des maisonnettes
en bois serrées les unes contre les
autres, pas une identique à une au-
tre. Le village L’Herbe, planté en
plein milieu de la presqu’île de
Lège-Cap-Ferret, en bordure de Bas-
sin, est un bijou typique. Une perle
touristique. Piétinée, envahie, pho-
tographiée, instagrammée durant
les deux mois de la saison estivale,
au grand dam des autochtones.
Voilà Michel et Josy. Elle est née
ici et revient plusieurs fois par an s’y
reposer. Se reposer, il faut vite le
dire : « Ah non, du repos on n’en a
pas beaucoup! Surtout le soir, c’est
la folie, les gens sortent des restau-
rants et crient leur joie. Parlent fort,
chantent et traînent derrière nos
fenêtres. Aucun respect. On
n’existe pas. » Son mari rouspète
encore plus : « La mode du vélo
c’est très bien, je n’ai rien contre,
mais la semaine dernière, un type
passe à vélo en tirant son enfant
dans une carriole, avec la musique
au taquet. À l’heure de la sieste.
Comme j’étais pas content, il m’a

copieusement insulté. Le non-res-
pect de la vie privée des habitants
est permanent. Les gens prennent
possession des lieux, sans tenir
compte de ceux qui y vivent. »

Un véritable musée à ciel ouvert
Jean-Pierre et Cathy ont dressé une
table pour le repas de midi, entre
deux cabanes. Ils sont nés ici. Tan-
dis que le repas finit de mijoter, ils
prennent une pause. « Les touris-
tes toute la journée qui sillonnent
les ruelles, passent le nez par les fe-
nêtres, commentent. Rien ne nous
échappe. L’Herbe est devenu un
musée à ciel ouvert. C’est bien
pour le tourisme ; pour nous voilà
deux mois bien compliqués » in-
siste Jean-Pierre.
L’engouement a débuté il y a
une bonne quinzaine d’années au-
jourd’hui, bien avant le fameux ef-
fet « Les Petits Mouchoirs », ce film
tourné par Guillaume Canet sur la
presqu’île [sorti en 2010, NDLR]. Le
long-métrage a certes popularisé
le site, mais l’attraction existe de-
puis longtemps déjà.

« Il y a de plus en plus de monde,
c’est sûr, reprend Cathy. Dans le
courant de l’année, on n’a pas trop
de problèmes de cohabitation.
Mais l’été, il faut rester stoïque. Les
gens nous prennent pour des in-
digènes, des sauvageons, ils nous
croient pauvres, s’étonnent que
nous ayons l’eau courante et l’élec-
tricité. Nous regardent comme des
bêtes curieuses. Et ne respectent
pas notre intimité. »

Des conseils aux visiteurs
Ainsi peut-on lire sur certaines ha-
bitations des conseils aux visiteurs
du genre « S’il vous plaît ne ré-
veillez pas le chien quand il dort »,
« Évitez de piétiner nos planta-
tions », « Un peu moins de bruit,
nous faisons la sieste »...
«Je pense, conclut Cathy, qu’ils
oublient que non, ce village n’est
pas un musée, mais un lieu de vie,
avec des gens dedans qui man-
gent, dorment, discutent et, aus-
si... qui travaillent et qui ont be-
soin de repos. »
Isabelle Castéra

C’est le village le plus visité de la presqu’île de Lège-Cap-Ferret. Et des gens vivent dedans


« L’été, on est des indigènes »


MA VIE L’ÉTÉ DANS MA VILLE MUSÉE


Le charmant village de l’Herbe, muséifié mais toujours habité. ARCHIVES LAURENT THEILLET

nc e est d’Or


même été classé second Jardin préféré des Français il y a cinq ans. PHOTOS L. V.

Jacques Lubet fait lui-même la visite de son petit coin de
paradis, entre espèces rares et sculptures contemporaines

Bel enchaînement de musiques de l’Est à la guinguette : Bubliczki, ensemble montant de
la folk-world polonaise ce soir ; puis l’Haïdouti Orkestar turque et gipsy (photo), qui tourne avec
Ibrahim Maalouf et invite demain le Kurde Rusan Filiztek. 21 h 30, 8 euros/soir. PHOTO LEVILLAIN/KOVALSKY

Chez Alriq, y a du monde aux Balkans


BORDEAUX


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