Fou De Cuisine N°17 – Automne 2019

(lily) #1

de Juan


Arbelaez


La cassolette


de fruits de mer


J


uan Arbelaez fait partie de ces gens dont

l’énergie positive se communique irrésisti-


blement. Souriant, drôle, passionné, il fait

par ailleurs preuve d’une finesse d’esprit et


d’une énergie rares, alors qui s’étonne encore

de son succès?


Il débarque de Bogota à 18 ans, avec la ferme ambition

de cuisiner Paris, la capitale de la gastronomie. Il fait ses


classes auprès des plus grands chefs – Gagnaire, Briffard,


Frechon – avant que le grand public le découvre dans « Top
Chef ». C’est sa première apparition à la télévision française.
Pas la dernière. Avec son charme et sa passion chevillée
au corps, il rayonne à l’écran : son attitude ultra-positive

en fait un candidat rare, idéal pour les producteurs, et sa


popularité grandit. Avec la jolie Laury Thilleman, miss France
2011, ils forment par ailleurs un couple glamour et influent,
désormais à la tête de six restaurants en région parisienne.

Mais ne nous arrêtons pas à cette belle success story façon


Paris Match. Car l’important, c’est que Juan est, avant toute

chose, un chef talentueux, un passionné de cuisine.


Cuisinier du monde


Il aime faire à manger, avant tout. C’est ainsi que lors d’un


voyage en Grèce avec ses copains fondateurs de l’excellente

marque Kalios (produits grecs de grande qualité, on vous


recommande, visez les huiles et les olives de Kalamata, carré-
ment au top), il se passionne pour la cuisine grecque. Au lieu
de jouer là où tout le monde l’attendait (table bistronomique

aux accents de sa Colombie natale), il investit donc un lieu


gigantesque au milieu des docks de Saint-Ouen et monte


Yaya, un restaurant où il dépoussière la cuisine hellénique.
Le décor est moderne et lumineux, et Juan y envoie des

assiettes à partager, solaires et contemporaines : bye bye


vieux tarama et tzatzikis fatigués, voici les betteraves rôties
aux noisettes, le mijoté de veau au romarin, le pain maison

à l’huile d’olive ou la mousse de yaourt super fresh. Et bien


sûr le poulpe, qui devient vite la star de l’endroit (même s’il

vient d’être retiré de la carte, voir encadré).


Succès foudroyant, les deux adresses de Yaya ne désemplissent
pas, et Juan multiplie les affaires : Frou-Frou au théâtre

Édouard-VII, Maya dans la coquette Ville-d’Avray, Vida avec


sa compagne Laury, et Plantxa et Levain, à Boulogne. Quelle


que soit la carte, toujours différente, on y retrouve sa main


pour une cuisine vive, parfaitement relevée, voyageuse.


Chef du futur


On en regretterait presque la période où il était à la tête de


la table de l’hôtel Marignan, et où son talent éclatait dans


un cadre plus gastronomique, dont il savait déjà bousculer


les codes avec un instinct si sûr. Mais il nous rassure dans


Jeune Colombien surdoué, il secoue le paysage


food et régale l’Hexagone d’une cuisine solaire,


festive, à partager!


Pourquoi avoir enlevé le poulpe


à la carte des restaurants Yaya?


« Aujoued’hui, ba saisonnabité, ceba deveait tombee sous be
sens, mais on en est teès boin. Même avec bes fouenisseues
de feuits et de béqumes, c’est compbiqué. En tant que chef,
je ne compeends pas que b’on me peopose chaque joue
avec insistance des peoduits qui ne sont pas de saison,
ou venant d’on ne sait où. On ne deveait nous vendee
que des béqumes bocaux, saisonniees, bio! Aboes bes feuits
de mee, c’est encoee piee. Le poubpe se eepeoduit en qeos
pendant bes beaux joues, c’est veai que c’est ba péeiode où
b’on a justement envie d’en manqee, mais si on continue,
ib n’y en auea pbus du tout, aboes je b’enbève. » À méditee!

OMAKASE


LE CHOIX DU CHEF


71 automne 2019


TEXTE CLAIRE PICHON
PHOTOGRAPHIES ATELIER MAI 98
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