Les Inrockuptibles N°1239 Du 28 Août 2019

(Romina) #1
des journées entières dans Paris sans que personne ne me
reconnaisse. Un jour, il y a très longtemps, j’avais rendez-vous
avec Robert De Niro dans un bar d’hôtel. On a attendu vraiment
très longtemps, peut-être une heure, avant de s’apercevoir que
l’on était tous les deux dans le bar mais que l’on ne s’était pas
reconnus (rires)!

On vous a vue cette année au théâtre en Mary Stuart
dirigée par Bob Wilson et au cinéma dans Frankie
d’Ira Sachs, et on a l’impression que ce sont deux pôles
opposés de ce que l’on peut obtenir de vous. D’un côté,
une pure marionnette, hyperperformante et technique,
qui peut tout faire. Et de l’autre, au contraire, l’accès
tout en underplaying à une intériorité, à une personne.
C’est vrai, et pourtant c’est plus complexe. Le théâtre avec
Bob Wilson est une chose vraiment particulière, qui excède
le théâtre, s’aventure du côté de la danse ou des arts plastiques.
Le texte est énorme et, en même temps, ce qu’il en fait tient
davantage de la sculpture sonore. On ne parle jamais du
sens d’une phrase. Jamais. Il peut couper des pages entières sans
même savoir ce qu’il coupe, car il est surtout attentif à la

des femmes de ménage. Ce qu’elle raconte se rapporte le plus
souvent à sa vie. Son écriture est très libre, très free style,
et vraiment d’une très grande force. Avant, j’ai lu un autre très
bon livre, The Executor de Jesse Kellerman. Quand je ne lis pas,
j’écoute beaucoup la radio, souvent sur mon téléphone, en
me déplaçant, même à l’étranger. Je suis très assidue à certaines
émissions, comme Les Pieds sur terre sur France Culture, qui
propose des portraits vraiment passionnants. Ça amuse
énormément mes amis, mais je connais les grilles d’émissions
de Radio France par cœur (rires).

Vous nagez à Saint-Jean-de-Luz? Frankie s’ouvre sur
une scène de natation dans une piscine. Vous nagez aussi
dans Villa Amalia (Benoît Jacquot), dans Valley of Love
(Guillaume Nicloux)... On vous a souvent filmée
à la plage aussi, de La Dentellière (Claude Goretta)
à In Another Country (Hong Sang-soo). Etes-vous une
grande nageuse?
Non, vraiment pas (rires). Mon fils aîné nage beaucoup.
Parfois, je l’accompagne. Aujourd’hui, en effet, j’ai nagé près
de quarante minutes. Pour moi, c’est beaucoup. J’aime bien aller
à la plage. J’aime observer les gens. Il y a toute une petite
sociologie de la plage. L’autre jour, je me disais : “Mais c’est venu
quand, dans l’histoire de l’humanité, que les gens aient envie de se
coucher les uns à côté des autres sur du sable et de ne rien faire
étendus au soleil ?” C’est quand même un plaisir très curieux!
J’aime bien le brouhaha particulier de la plage, il ne m’agresse
pas, alors que je suis assez sensible au bruit. J’arrive très bien
à lire sur une plage par exemple, quand je n’observe pas les gens.

Et vous ne vous sentez pas observée? Les gens vous
reconnaissent-ils?
On me reconnaît assez peu. J’ai cette chance. Je peux passer

“La question n’est pas
de savoir ce que l’on est apte
ou pas à faire, mais plutôt
d’évaluer si le metteur en scène
sera capable ou pas de vous
le faire faire”

A.M.L.F.


Jupiter Films

Les Valseuses
de Bertrand Blier
(1974) Gaumont

Violette Nozière de
Claude Chabrol (1978)

La Dentellière
de Claude Goretta
(1977)

Sauve qui
peut
(la vie) de
Jean-Luc
Godard
(1980)

Au fil d’un parcours exceptionnel
au cœur du cinéma le plus créatif de
son temps, la permanence d’un visage
tout en intériorité et en force

Les Inrockuptibles 28.08.2019 10

Rentrée cinéma
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