LeSoir - 2019-08-14

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Le SoirMercredi 14 et jeudi 15 août 2019

monde 11

BENJAMIN QUÉNELLE

CORRESPONDANT À MOSCOU

E

vacuation préventive d’un vil-

lage, taux de radioactivité supé-

rieurs à la moyenne, informa-

tions données au compte-gouttes...

Cinq jours après l’explosion à caractère

nucléaire dans une base militaire russe

d’essais de missiles située dans le Grand

Nord, c’est le plus grand flou à Moscou.

Les autorités sont soupçonnées d’entre-

tenir le secret tant sur « le nouvel arme-

ment » à l’origine de l’explosion que sur

les possibles risques nucléaires.

Le taux de radioactivité

entre 4 et 16 fois plus élevé

Aucune alerte rouge n’a été déclarée

par les observateurs internationaux.

Mais Rosguidromet, l’agence russe de

météorologie, a finalement confirmé

hier que le taux de radioactivité le jour

de l’explosion, jeudi 8 août, a dépassé

entre quatre et 16 fois le taux habituel.

Les données ont été enregistrées par six

capteurs sur huit d’un système de sur-

veillance automatisée des radiations

dans la région. Le communiqué de Ros-

guidromet a précisé qu’un des capteurs

a notamment relevé un taux de radio-

activité de 1,78 microsievert par heure,

bien au-dessus de la limite réglemen-

taire de 0,6 et de la radioactivité natu-

relle moyenne de 0,11 dans cet endroit.

Cette hausse a été temporaire et les

taux auraient vite retrouvé un niveau

normal. Même à 1,78 microsievert par

heure, la radioactivité est restée loin

des seuils de danger. L’Organisation

mondiale de la santé (OMS) estime, par

exemple, que les risques de cancer

peuvent augmenter à partir de 50.

microsieverts reçus et l’Institut de ra-

dioprotection et de sûreté nucléaire

(IRSN) français recommande une mise

à l’abri des populations à partir de

10.000 microsieverts.

Évacuation du village de Nionoksa

Alors que les taux enregistrés ne pré-

senteraient donc pas un risque réel

pour la santé, il a fallu toutefois cinq

jours aux autorités pour les publier. Au

départ, elles ont même assuré qu’il « n’y

a pas eu de contamination radioac-

tive ». Une autre information a semé la

confusion. Des sites russes ont révélé

hier que le village de Nionoksa, près de

la base de l’explosion, doit ce mercredi

être évacué pendant deux heures : tôt le

matin, les quelques dizaines d’habi-

tants sont invitées à se réfugier dans la

forêt. Aucune explication n’a été don-

née pour cette mesure préventive. Par

ailleurs, les médecins ayant soigné les

victimes de l’explosion, envoyées à

Moscou pour passer des examens, ont

dû signer un accord de confidentialité

interdisant de divulguer toute informa-

tion.

Depuis cinq jours, les autorités entre-

tiennent ainsi le mystère sur cette ex-

plosion qui se serait produite sur une

« plateforme maritime » près de la base

et aurait jeté plusieurs employés à la

mer. Initialement, elles ont affirmé que

deux personnes étaient décédées. C’est

en fait cinq experts de l’agence nu-

cléaire Rosatom qui sont morts dans

cette explosion. L’armée avait aupara-

vant annoncé le décès de deux « spécia-

listes », sans que l’on sache s’ils sont in-

clus dans le bilan de cinq morts de

l’agence nucléaire. Au moins trois

autres personnes ont été blessées, vic-

times de brûlures, selon Rosatom.

Le mystère plane aussi sur le « nouvel

armement » à l’origine de l’explosion.

Les autorités ont simplement précisé

que les « héros » tués dans l’accident

fournissaient de l’ingénierie et un sou-

tien technique pour « la source d’éner-

gie isotopique » du moteur d’un missile

en train d’être mis au point. Une ver-

sion différente de ce qui avait été dit au

départ : l’accident s’était produit au

cours de l’essai d’un « moteur-fusée à

ergols liquides », sans mention d’un ac-

cident impliquant du combustible nu-

cléaire.

Ni le Kremlin ni le ministère de la

Défense n’ont depuis donné d’autres

précisions sur le « nouvel armement »

en cause. Les experts russes et étran-

gers considèrent qu’il s’agit vraisembla-

blement d’un missile de croisière à pro-

pulsion nucléaire dont la Russie

cherche à se doter, le 9M730, surnom-

mé « Bourevestnik » (Oiseau de tem-

pête) révélé par la Défense russe en fé-

vrier mais toujours au stade d’études et

d’essais.

Le porte-parole du Kremlin Dmitri

Peskov a refusé de confirmer qu’il s’agit

du « Bourevestnik ». Mais il assure que

la compétence atteinte par la Russie en

matière de missiles à propulsion nu-

cléaire « dépasse significativement le

niveau atteint par d’autres pays et est

assez unique ». Une manière de ré-

pondre au président américain Donald

Trump qui, dans un tweet, a affirmé

hier savoir « beaucoup sur l’explosion

d’un missile défectueux en Russie » et

prévenu que les États-Unis ont « une

technologie similaire, mais plus avan-

cée ». Une étrange guerre des missiles

dans les mots.

Moscou entretient le mystère

sur l’accident nucléaire

RUSSIE

Au moins cinq

personnes sont mortes

lors d’un essai de

missile dans le Grand

Nord. Mais les autorités

ne donnent aucun

détail sur ce « nouvel

armement ». Et les

informations se

contredisent sur la

contamination

radioactive.

Les habitants du village

de Nionoska, près

de la base militaire

où l’explosion a eu lieu,

devraient être évacués

pour deux heures et

sont invités

à se réfugier dans la

forêt. © AFP

ITALIE

Le Sénat repousse toute

décision sur le sort

du gouvernement

Le Sénat italien a repoussé au 20 août toute décision
sur le sort du gouvernement de Giuseppe Conte, qui
viendra s’exprimer ce jour-là devant les parlementaires,
mais ne pourra pas être renversé par un vote de cen-
sure. Les sénateurs ont en effet rejeté ce mardi soir une
proposition du ministre de l’Intérieur Matteo Salvini, le
chef de la Ligue (extrême droite), visant à signer la fin
du gouvernement qu’il a formé il y a 14 mois avec le
Mouvement 5 Etoiles (M5S, anti-système).
De son côté, l’ancien Premier ministre Matteo Renzi a
mis en garde contre un risque de plonger dans la réces-
sion en cas d’élections à l’automne. Il a appelé à former
un « gouvernement institutionnel ». « Si on vote (dès fin
octobre), je ne sais pas si le PD (Parti démocrate, centre
gauche) prendra 25 %, mais ce qui est sûr, c’est que la
TVA va monter à 25 %. Ce sera une catastrophe pour le
pays », a estimé M. Renzi dans une conférence de
presse au Sénat.
Avec une hausse de la TVA à 25 % (contre 22 % actuel-
lement), « il est certain que l’Italie tombera en réces-
sion. Surtout avec les tensions commerciales USA-Chine
et ce qui se passe pour la locomotive économique
allemande », a-t-il estimé, évoquant « une urgence
nationale ». Il faut absolument « bloquer la hausse
prévue de la TVA », a-t-il argué. Il faut des mesures
budgétaires permettant de faire entrer dans les caisses
de l’Etat les plus de 20 milliards d’euros.
L’Italie doit présenter son budget pour 2020 fin sep-
tembre, avant d’entamer des discussions avec Bruxelles.
AFP

Au Sénat, l’ancien Premier ministre Matteo Renzi

a rappelé les risques pour l’économie italienne

d’élections anticipées. © AFP

Le Kremlin, confronté

depuis un mois au plus

fort mouvement de

contestation du pou-

voir de ces dernières

années, a défendu la

fermeté de la police,

accusée de violences.

Certaines manifesta-

tions, non autorisées,

se sont soldées par des

centaines d’arresta-

tions. La plupart des

figures de l’opposition,

dont Alexeï Navalny,

ont été condamnées à

de courts séjours en

prison et une enquête

pour « troubles mas-

sifs » a été diligentée,

ouvrant la voie à des

peines de plusieurs

années de prison.

Réagissant pour la

première fois à ce

mouvement, son

porte-parole Dmitri

Peskov s’est dit « pas

d’accord avec ceux qui

qualifient ce qui se

passe de crise poli-

tique ». AFP

Moscou valide la

répression des

manifestation

HONG KONG

Deuxième journée de chaos à l’aéroport

L’aéroport de Hong Kong a connu ce mardi une deuxième journée de chaos avec la suspension ou

l’annulation de centaines de vols du fait des manifestations pro-démocratie, le gouvernement local

les accusant de précipiter la ville sur une voie « sans retour ».

Tandis que des dizaines de milliers de passagers étaient pénalisés par cette nouvelle action coup-

de-poing des contestataires, la Chine a accentué la menace d’une intervention, au travers de vidéos

diffusées par ses médias officiels montrant des forces se massant à la frontière de la région semi-

autonome. AFP

Après plusieurs semaines de manifestations, la Chine menace de plus en plus

d’une intervention. ©EPA

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