L’Obs N°2858 Du 15 au 21 Août 2019

(Jacob Rumans) #1

✎ STÉPHANE MANEL L’OBS/N°2858-15/08/2019 3


L’OPINION


Parr ROBERT SCIPION

LES MOTS CROISÉS


Solution du n° 2857


Problème du 8/8/


Horizontalement
I. Point de vue. – II. Il préférait les
poupées aux soldats de plombs.
Vedette du muet. – III. Toujours
premiers. Va nous en faire voir de
toutes les couleurs. – IV. Peut
surveiller ou peut se faire prendre.
A la vie dure, dans un sens. – V.
Italienne qui a été donnée à un fl ic
français. Débutent dans les lettres...
mais en se répétant. – VI. Prend le pas
sur le pas. Triste fi n pour le premier
du IV. Préposition. – VII. Tire la
couverture à elle. – VIII. A une armure
assez modeste. Fait ladite armure.


  • IX. Victimes du devoir. Pronom.

  • X. De droite à gauche : l’est par ceux
    du dessus. Participe passé utilisé
    seulement par Victor Hugo.

  • XI. Remettre à sa place.
    Verticalement



  1. As de pique. – 2. A fait la foire
    en Angleterre. Ne manque pas de
    profondeur mais a des longueurs.





    1. Fait avancer ou refuse de le faire,
      ça dépend par où on le prend. Agit
      sous l’infl uence de la calotte.





    1. Voyelles. Plus souvent en bottes
      ou en bas de laine qu’en bas de soie.





    1. Un mélange avec du gin. Réussit
      dans un canard mais pas au ciné.





    1. Notre-Dame ou, jadis, seulement
      notre dame. Font plutôt une fi n dans
      les lettres... mais en se répétant. – 7.
      Conjuré. Va partiellement se soulever.





    1. « Les Fleurs du mal » devraient
      être son livre de chevet. Une partie de
      règlement. Dans l’air ou par terre... – 9.
      Vague de fond. Symbole. – 10. Défi le
      son chapelet. Un homme à bonne
      fortune. – 11. Français d’élection.




L


a révolte des «  cyclo-
forçats  » de Deliveroo
qui refusent de pédaler
pour moins de 4 euros
la course alerte sur une
nécessaire refondation
de notre modèle social pour accompa-
gner l’essor de ce qu’on appelle désor-
mais l’« économie du “gig” », d’après le
terme anglais qui désigne une prestation
musicale occasionnelle.
La révolution numérique génère d’in-
nombrables plateformes et applications,
qui mettent les professionnels en compé-
tition pour eff ectuer des missions de plus
en plus variées. Rares sont les secteurs qui
échappent à ces off res de travail ponctuel,
à la tâche... et d’autant plus mal rémunéré
que la concurrence entre les candidats est
âpre, et le chômage, élevé. Qu’il s’agisse de
livraison de repas (Deliveroo, Foodora,
Frichti) ou de transport de personnes
(Uber, SnapCar, Chauff eur Privé) ; de
déménagement (123devis-demenage-
ment, Trusk) ou de services domestiques
(Stootie, Frizbiz) ; de travail au clic (Ama-
zon Mechanical Turk, Foule Factory) ; de
traduction (Traduc.com, OneSky, Trans-
late) ou de missions en design, droit, déve-
loppement informatique, marketing...
(Upwork, Freelancer.com, Malt).
Le risque? Que cette « gig economy »


  • importée des Etats-Unis, où elle devrait
    concerner plus de 40% des travailleurs
    en  2020 – provoque une dérégulation
    brutale du marché du travail. Adieu CDI,
    ou même CDD! Le mouvement dessine
    le nouveau «  précariat  » d’une main-
    d’œuvre corvéable à merci et mal proté-
    gée. Sombre réminiscence du « travail à la
    pièce » des couturières du xixe siècle.
    Certes, les contributeurs de cette nou-
    velle économie ne sont pas tous logés à la
    même enseigne. Des talents reconnus
    – « slashers » par choix – s’y créent une
    vie professionnelle sur mesure, riche et
    variée. De nombreux étudiants, retraités


ou salariés y cherchent un simple com-
plément de revenus. D’autres encore sont
autoentrepreneurs à plein temps, ou bien
salariés d’entreprises qui fournissent des
prestations à ces plateformes.
Reste que la masse des travailleurs peu
ou pas qualifi és est menacée d’une vaste
régression sociale. Comment alors
défendre le droit de ceux-là, sans pour
autant entraver l’essor de services inno-
vants, à la fois plébiscités par le public et
susceptibles de fournir de l’activité à une
main-d’œuvre actuellement éloignée du
marché? Il est impératif d’inventer le
«  modèle social  2.0  » de cette nouvelle
forme d’économie. Cela passe par la créa-
tion d’un nouveau syndicalisme, à
l’image du Clap, collectif de livreurs de
repas de Jean-Daniel Zamor (voir p. 7).
C’est aussi l’affaire des pouvoirs
publics, d’autant que le statut d’indé-
pendant cache parfois un travail qui
devrait relever du salariat. Loin de se
contenter d’une simple mise en relation,
certaines plateformes fi xent en eff et le
niveau des tarifs et des commissions,
contrôlent les horaires et la qualité de la
prestation, voire exigent l’exclusivité.
Notre chroniqueur Nicolas Colin plaide
pour un « nouveau contrat social » dans
son livre « Hedge. A Greater Safety Net
for the Entrepreneurial Age ». Dans une
récente tribune, Laurent Berger (CFDT)
et François Hurel (président de l’Union
des Autoentrepreneurs) suggèrent
d’établir un « droit de l’actif » attaché à
la personne.
Eminemment politique, cette question
ne doit laisser personne indiff érent. De
récentes études américaines démontrent
en eff et que la perte d’emploi ou la dégra-
dation de la qualité des jobs ont fait bas-
culer certains Etats américains du côté du
vote Trump. Une «  gig economy  » sau-
vage, sous la coupe des seuls seigneurs du
numérique, ferait planer une véritable
menace sur nos démocraties. D. N.

Par DOMINIQUE NORA

“Gig economy”,


menace sur la


démocratie?


Vu sur https://www.french−bookys.com

Free download pdf