Les Echos - 19.08.2019

(avery) #1

10 // SÉRIES D'ÉTÉ Lundi 19 août 2019 Les Echos


LE MONDEDANSVOTREASSIETTE


SÉRIED’ÉTÉ

La tomate : un concentré de mondialisation


A


lors qu’un quart seulement des
Français trouvent que les tomates
ont b on goût*, que diraient-ils si on
leur servait de la tomate d’industrie? « Elle
est à la tomate fraîche ce qu’une pomme est à
une poire
, explique Jean-Baptiste Malet,
auteur du livre “ L’Empire de l’or rouge”, c’est
un autre fruit, une autre géopolitique, un
autre business. »
Homogène, facile à mani-
puler et à transporter car sa peau est plus


formation, le californien Morning Star, est
depuis longtemps imité par tous ses
concurrents, Chinois en tête. Il est vrai
que les Etats-Unis – le pays de Heinz et de
son fameux ketchup – est le premier pro-
ducteur mondial de tomates d’industrie
devant l’Italie et la Chine, devenue quant à
elle le premier exportateur mondial de
concentré de tomate, souvent bourré
d’additifs et exporté en Afrique.

« Les producteurs de tomates recherchent
les rendements, la stabilité, la précocité et
l’adaptation aux conditions, notamment
au changement climatique » , expli-
quait Mathilde Causse, chercheuse à l’Inra,
lors de la conférence mondiale de la tomate
à Avignon début mai.
Mais cette standardisation à tout prix
soulève des critiques. D’autant que le
séquençage du génome de la tomate, réa-

épaisse que celle de la tomate fraîche, la
tomate d’industrie sert de matériau de base
aux multinationales, q ui la transforment en
un concentré facile à stocker et à exporter
sous forme de barils d’or rouge. C’est elle qui
entre dans l a fabrication industrielle de c en-
taines de sauces et spécialités culinaires,
comme la pizza, à travers le monde. Un
marché de près de 10 milliards de dollars...
Le premier groupe mondial de trans-

IN FOGRAPHIE// En cinquante ans, la tomate « d’industrie », qui représente un quart du marché mondial, a été calibrée pour l’exporta-


tion. Son concentré est à la base de milliers de préparations. Mais ce modèle de production standardisé pourrait être remis en question.


lisé en 2012, a mis en évidence une forte
réduction de la diversité des variétés culti-
vées. Du coup, les sélectionneurs doivent
recourir aux variétés sauvages, telles
que les tomates cerises, pour corriger


  • un peu – les travers de cette production
    devenue, pour certains, le symbole des déri-
    ves de la mondialisation.


* Selon l’association de consommateurs CLCV.

par Joséphine Bichareil, Jean-Marie Colomb, Jules Grandin, Dominique Müller
Demain : Riz de marée sur l’Afrique

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