Les Echos - 19.08.2019

(avery) #1
duction en Chine. Mercedes,
Volkswagen comme BMW y pro-
duisent surtout des SUV dans le
cadre de coentreprises avec des
groupes chinois et se lancent dans
l’électrique. BMW prévoit, par
exemple, de construire la version
électrique de sa Mini avec le chinois
Great Wall, quand Mercedes veut
assembler à Guangzhou à compter
de 2 022 l a Smart électrique avec son
actionnaire chinois Geely.
« Les constructeurs allemands
seront capables de compenser leurs
pertes, car leurs appareils de produc-
tion sont flexibles et ils partageront
les pertes avec leurs partenaires chi-
nois », nuance Ferdinand Duden-
höffer, qui estime que les améri-
cains GM ou Tesla seront
davantage menacés sur fond de
conflit commercial entre la Chine et
les Etats-Unis.. — P. H. (à Francfort)

véhicules vendus, un nouveau
niveau record. Enfin, le constructeur
bavarois BMW, qui écoule un peu
moins de 30 % de ses ventes dans
l’empire du Milieu, a, quant à lui,
réussi à gonfler les livraisons de ses
trois marques (BMW, Mini et Rolls-
Royce) au cours des six premiers
mois de l’année (+16,8 % sur un an),
avec 350.600 véhicules livrés.

Situation tendue à venir
Le plus dur reste à venir, prévient
Ferdinand Dudenhöffer, directeur
de l’institut de recherche CAR à
l’université de Duisbourg : « La
situation sera plus difficile à partir d e
2020, le ralentissement de l ’économie
chinoise va rattraper aussi les riches
clients et les marques premium vont
en souffrir », estime-t-il. L’expert
s’attend à ce que les constructeurs
réduisent en conséquence leur pro-

environ 40 % de ses véhicules. Le
groupe aux douze marques (Audi,
Skoda, Seat, Porsche...) explique
ainsi le recul de 3,1 % de ses livrai-
sons mondiales de véhicules passa-
gers au premier semestre, à
5,24 millions d’unités, par le ralen-
tissement du marché chinois. Ses
livraisons y ont reculé de 3,9 % entre
janvier et juin sur un an, ce qui
représente près de 8 0.000 véhicules
en moins.

Tendance à la hausse
Mercedes, pour qui la Chine repré-
sente 30 % des ventes, a également
enregistré un léger recul de ses
livraisons au premier semestre
(–1 %) sur ce marché, mais la marque
à l’étoile a renversé la tendance en
juillet avec un bond de 13 %. Ce qui lui
permet d’afficher sur sept mois une
croissance de 2,9 % avec 404.

Les voitures allemandes et le piège du ralentissement chinois


Partis tôt à l’assaut du gigantesque
marché chinois, les constructeurs
allemands y ont écoulé avec grand
succès leurs berlines – pour le plus
grand plaisir de leurs actionnaires.
Mais le marasme actuel du marché
automobile chinois risque fort de se
transformer en un immense casse-
tête pour Volkswagen, BMW ou
Mercedes (filiale de Daimler).
Pour ces trois constructeurs, la
Chine constitue de loin leur pre-
mier débouché. Volkswagen y vend


La Chine est devenue
ces dernières années
le premier débouché
des constructeurs automo-
biles allemands. Le ralentis-
sement de cet immense
marché est problématique
pour les fleurons de
l’industrie allemande.


Après quatre ans passés à la tête
de BMW et plus vingt-sept ans
au sein du groupe, Harald
Krüger quitte le constructeur
bavarois, qui vient d’entrer
comme ses concurrents dans
une zone de fortes turbulences.
Le casse-tête du Brexit, le ralen-
tissement mondial et le coûteux
lancement de véhicules électri-
ques attendent au tournant le
nouveau patron, Oliver Zipse,
qui a pris officiellement ses fonc-
tions vendredi 16 août. Déjà, les
spéculations vont bon train sur
la capacité de ce dirigeant
« made in BMW » – il y est entré
en 1991 comme stagiaire – à
apporter des idées neuves.
Le Brexit devrait accaparer
les premières réunions de cet
Allemand de cinquante-cinq
ans, qui occupait auparavant le
poste clef de responsable de la
production. Le Royaume-Uni,
où il construit sa Mini et ses
Rolls-Royce, constitue le qua-
trième marché du groupe. A lui
d’évaluer les difficultés logisti-
ques et économiques qu’entraî-
nerait un « no deal ». BMW, qui
prévoit de lancer la production
d’une version électrique de la
Mini cet automne, joue gros.
Ensuite, le capitaine Zipse
devra guider le navire dans la
tempête qui s’annonce. BMW
craint le ralentissement en
Chine, son premier marché,
mais aussi les tensions commer-
ciales avec Washington. Le con-
flit entre les Etats-Unis et la
Chine pénalise déjà l’allemand,
qui produit en Caroline du Sud et
aux Etats-Unis des SUV ensuite
exportés en Chine. A l’inverse de
ses concurrents Audi et Daimler,
le groupe aux 135.000 employés
est toutefois parvenu à doper ses
livraisons au premier semestre
(+0,8 % sur un an), avec 1,25 mil-
lion de véhicules vendus (mar-
ques BMW, Mini et Rolls-Royce).
Au deuxième trimestre, son
bénéfice net a reculé de près de
30 %, à 1,48 milliard d’euros, sous
l’effet de ses investissements
massifs.

Offensive électrique
Oliver Zipse aura la lourde tâche
de mener à bien l’offensive élec-
trique du constructeur. S’il avait
pris de l’avance en lançant son
modèle électrique i3 dès 2013 en
Allemagne, BMW s emble
aujourd’hui plutôt en retard.
« Mercedes a son EQC, Audi son
e-tron, Porsche va lancer son Tay-
can. BMW a au moins un an de
retard », tranche l’expert auto-
mobile Ferdinand Dudenhöffer.
Le groupe, qui veut lancer son
premier SUV 100 % électrique
iX3 en 2020, prévoit de lancer
25 modèles électrifiés (dont plus
de la moitié en version 100 %
électrique) d’ici à 2023. A Oliver
Zipse de trouver la bonne pro-
pulsion. — P. H. (à Francfort)

Les chantiers


du nouveau


patron


de BMW


Oliver Zipse a repris
vendredi 16 août
le volant du construc-
teur bavarois, dirigé
ces dernières années
par Harald Krüger.

miers mois de l’année, les construc-
teurs allemands ont vu leurs
exportations reculer de 14 % sur un
an, avec 2,1 millions de véhicules
exportés, pointe la Fédération auto-
mobile allemande (VDA). Au pre-
mier semestre, les nouvelles imma-
triculations ont r eculé de 3 % sur un
an en Europe, de 2 % aux Etats-
Unis, de 14 % en Chine, premier
marché automobile mondial.
« Cette année sera la pire enregis-
trée depuis plus de vingt ans pour
l’industrie automobile mondiale »,
pronostique Ferdinand Dudenhöf-
fer, directeur de l’institut de recher-
che CAR à l’université de Duisburg,
qui table sur un recul de la produc-
tion allemande à 4,7 millions de
véhicules en 2019, soit son plus bas
niveau depuis vingt et un ans.
Pour Christian Brunkhorst,
expert automobile c hez IG Metall, i l
n’y a pas de crise mais un « retour à
la normale des ventes » après plu-
sieurs années fastes. Crise ou sim-
ple ralentissement, la chasse aux
coûts a démarré dans la branche.
« Les entreprises cherchent actuelle-
ment à protéger leurs rendements, ce
qui fait grimper la pression sur les
salariés », explique l’expert syndi-
cal, en évoquant le non-renouvelle-
ment de CDD ou la réduction du tra-
vail intérimaire. « Il y aura des
répercussions sur l’emploi », a pré-
venu début août Volkmar Denner,
le patron de Bosch, premier équipe-
mentier automobile mondial.

Menaces sur les emplois
Le coup de frein intervient malheu-
reusement au moment où les cons-
tructeurs doivent investir des mil-
liards d’euros pour adapter leurs
usines à la production de véhicules
électriques et pour lancer de nou-
veaux modèles électriques. Ralen-
tissement du marché, virage vers la
voiture électrique, le dirigeant de
Bosch ajoute une troisième diffi-
culté : les menaces qui pèsent sur les
emplois liés au diesel, technologie
tombée en disgrâce depuis le « die-
selgate ». Chez Bosch, 5 0.00 0
emplois en dépendent encore sur
410.000 salariés. L’équipementier ne
remplace déjà plus ses CDD et a
recours aux départs en retraite anti-
cipée. La majorité des constructeurs
ont engagé des plans d’économies, à
l’image de BMW, qui veut économi-
ser 12 milliards d’euros d’ici à 2022.

(


Lire l’éditorial
d’Arnaud Le Gal
Page 11

lLe ralentissement généralisé du marché automobile mondial se fait sentir outre-Rhin.


lUne série d’équipementiers ont revu à la baisse leurs prévisions annuelles et les constructeurs ont lancé


de vastes plans d’économies.


L’automobile allemande se prépare

à la fin des années folles

Pauline Houédé
_@PaulineH
— Correspondante à Francfort


Coup de frein économique en
Europe, ralentissement du marché
automobile chinois, incertitudes
liées aux tensions commerciales ou
encore au Brexit : l’industrie auto-
mobile allemande, qui emploie
plus de 800.000 personnes outre-
Rhin, se prépare à des lendemains
difficiles. « La crise est arrivée jus-
qu’au cœur du bastion automobile
du Bade-Wurtemberg
», écrivait fin
juillet le quotidien « Handelsblatt »,
après la faillite d’Eisenmann, une
entreprise familiale spécialisée
notamment dans les équipements
de peinture pour l’automobile.
Cette société de 3.000 salariés est
implantée dans cette région pros-
père du sud de l’Allemagne, où sont
établis Daimler et Bosch.
Les équipementiers font les frais
du recul de la demande et enchaî-
nent depuis cet été les avertisse-
ments sur résultat. Début août, ZF
Friedrichshafen a par exemple
raboté d’un milliard d’euros ses pré-
visions annuelles. Il table doréna-
vant sur un chiffre d’affaires com-
pris entre 36 et 37 milliards d’euros
et prévoit une marge opérationnelle
d’environ 4,5 %, en recul d’un point
sur l’exercice précédent. Peu aupa-
ravant, le géant Continental avait
aussi revu à la baisse ses prévisions,
tout comme Schaeffler, un équipe-
mentier bavarois de 90.000 salariés.
Les constructeurs automobiles
déchantent aussi : Daimler, la mai-
son mère de Mercedes, a revu à la
baisse à deux reprises en quelques
semaines ses prévisions. Son rival
munichois BMW table pour 2019
sur un « net recul » de son bénéfice
avant impôt. Seul le géant Volkswa-
gen s’en tire plutôt bien avec une
hausse de son chiffre d’affaires et de
son bénéfice semestriel en dépit
d’une baisse de ses livraisons. Le
groupe table toujours sur des livrai-
sons « légèrement supérieures » à
celles de 2018 cette année et une
hausse de près de 5 % de son chiffre
d’affaires.
« L’industrie automobile, qui
tablait en début d’année sur des ven-
tes mondiales stables en 2019, voire
en recul de 1 ou 2 % au pire, parie à
présent sur une baisse d’activité de
5 %
», souligne Jürgen Pieper, ana-
lyste chez Metzler. Sur les sept pre-


AUTOMOBILE


Les chiffres clefs


30 %

PART DES VENTES
de Mercedes pour le marché
chinois. Les livraisons
sur ce marché du construc-
teur ont reculé au premier
semestre.

40 %

PART DES VENTES
de Volkswagen sur le marché
chinois. Les livraisons
sur ce marché ont également
reculé sur le premier
semestre de 3,9 %.

ENTREPRISES


Lundi 19 août 2019 Les Echos

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