VSD N°2141 – Août 2019

(Brent) #1

Initiée par son père, Claire a
été championne de France
de Twin’ Cup féminine.
M


arc Pachot n’est pas peu
fier de sa trouvaille :
organiser un cham-
pionnat de France des
Twingo, la Twin’ Cup.
Pour la circonstance,
la « grenouille » a reçu un moteur de
Megane K4M 16 soupapes de 122 ch.
Vitesse maxi ? 200 km/h dans les
lignes droites des circuits. À part le
châssis et la carrosserie, il ne reste
pas grand-chose d’origine.
Claire Thiel est la seule femme à courir
le sprint. Une épreuve éprouvante
pour les nerfs, où on laisse beaucoup
de gomme sur la piste et où chaque
dépassement nécessite une prise de
risques calculée. Un frisson qu’adore
cette compétitrice, ancienne gymnaste
de niveau national, venue au sport auto
après une grave blessure. « Je me suis
cassée la malléole, huit mois de béquilles,
la fin du sport de haut niveau et une bonne
déprime... Un jour, mon père, qui courait
en Twin’ Cup, m’a proposé de venir sur
le circuit et m’a mise dans une voiture.
Au premier tour, j’ai adoré et je suis sor-
tie avec la banane jusqu’aux oreilles. Il
m’a fait la surprise de m’inscrire au cham-
pionnat de France féminin de Twin’ Cup.
La première année, j’ai fini deuxième ; la
suivante, j’ai gagné. » Le championnat
féminin s’étant arrêté, Claire court
désormais avec les hommes. « C’est un
univers un peu macho, glisse-t-elle en
riant. Quand ils se rendent compte qu’il
y a des cheveux longs sous le casque du
pilote de la voiture qui les a doublés, ils
n’aiment pas trop. »
Le tour de force de la Twin’ Cup est
de rendre le frisson du sport auto
accessible à toutes les bourses ou
presque. La voiture, si on la monte soi-
même, coûte moins de 5 000 €. Le kit
de transformation ne vaut que 2 500 €.
Après, mieux vaut bien s’y connaître
en mécanique. Participer à l’ensemble
des courses de l’année revient à moins
de 20 000 €. Mais le sponsoring de
copains ou de fournisseurs permettent


“Le championnat masculin est un univers un peu macho. Quand les hommes se rendent compte qu’il y a des cheveux longs sous le casque du pilote de la voiture qui les a doublés, ils n’aiment pas trop”


de couvrir une partie des frais de la
plupart des concurrents.
Sur le circuit de Nogaro, Claire partage
un box avec la Team Lucas de Cédric
Clause et Laurent Dziadus. « On a connu
Claire et son père sur les circuits, on a
décidé de la prendre avec nous quand on
pouvait. » Aux premières qualifications
les deux Twingo de l’écurie terminent
avec un millième de seconde d’écart au
tour ! Des chronos à peine croyables.
Claire finit 7e. Mais la joie est de courte
durée : les commissaires de course
annoncent un départ sous enquête.
Quelques minutes plus tard, la sanction
tombe : Cédric prend 30 secondes de
pénalité pour avoir fait un zigzag afin
de chauffer les pneus avant le départ.

Il râle : « Pour la première course de la
saison, c’est très sévère. Je n’ai jamais eu
ça en vingt ans de compétition ! »
La nuit tombe sur Nogaro. Près des
camions et des camping-cars, des
tablées se forment. C’est l’heure de
l’apéro. Enfin, pas pour tout le monde...
Certains s’affairent encore autour de
leur voiture. Un mécano et un pilote
redressent une aile froissée. À côté, un
autre change un démarreur. Un voisin
est venu lui donner un coup de main :
« Ici, c’est une grande famille. Sur la piste,
on se bat, mais en dehors, on s’entraide.
À la Twin’ Cup, il n’y a pas d’enjeux
financiers, on ne gagne jamais d’argent. »
À la course sprint du dimanche matin,
Cédric savoure enfin sa victoire. Son
coéquipier de la Team Lucas est deu-
xième. De quoi réjouir toute l’équipe
après la sanction de la veille.
Claire Thiel se prépare maintenant
pour le sprint long – 45 minutes de
course où il faut savoir attaquer mais
aussi ménager mécanique et pneuma-

tiques. Elle aussi espère un podium, le
premier dans une épreuve disputée
avec les hommes. Elle s’est classée 5e
aux qualifications et sera donc en bonne
place sur la grille de départ. Après un
début de course réussi et de furieuses
attaques, Claire parvient à grappiller
deux places. Mais au bout de vingt
minutes, c’est la douche froide : une
sortie de piste la contraint à abandon-
ner. Assise sur un bidon d’essence près
de sa voiture, elle rumine son échec :
« J’ai trop chauffé les pneus. Je m’étais
dit : “Il faut que t’arrêtes d’attaquer pour
préserver ta place sur le podium.” Mais
à l’entrée d’un virage, les freins n’ont pas
répondu comme d’habitude, les pneus
étaient trop chauds. Je suis arrivée trop
vite et j’ai mis une roue dans le bac à
gravier. Impossible de ressortir. Je suis
repartie avec un tour de retard... » Le
podium attendra encore un peu. J. D.
twincup-sprint.fr

Dans la discipline, il n’y a pas


d’enjeux financiers, les coureurs


ne gagnent jamais d’argent


66 - N° 2141

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