Afrique Magazine N°395-396 – Août-Septembre 2019

(Marcin) #1
108 AFRIQUE MAGAZINE I 395-396 – AOÛT-SEPTEMBRE 2019

BUSINESS


AM : La Côte d’Ivoire s’est
engagée à reconstituer le couvert
forestier à hauteur de 20 %
du territoire national.
Alain-Richard Donwahi : Pour
permettre d’atteindre notre objectif
au cours des trente prochaines années,
l’État a mis en place un cadre légal
et institutionnel novateur adapté
aux nouvelles exigences de gestion
durable des forêts. Cette gestion est
désormais envisagée dans une approche
multi-acteurs, holistique et réaliste.
Les efforts devront être fournis par
l’ensemble des acteurs que sont l’État,
les collectivités territoriales, le secteur
privé, la société civile, les populations
et les partenaires techniques et
financiers. Dans cette perspective, une
attention particulière sera accordée à
l’investissement privé et au partenariat
public-privé. La mise en œuvre de
politiques ambitieuses de reforestation
nécessite la mobilisation d’importants


moyens, qui ne sont pas toujours
disponibles au niveau du seul État.
Comment préserver les intérêts
des agriculteurs, y compris ceux
qui sont illégalement installés dans
les forêts classées dégradées?
Cette politique de préservation,
de réhabilitation et d’extension des
forêts, adoptée par le gouvernement
en mai 2018, s’inscrit dans une vision
globale. Elle intègre les stratégies
de développement des autres secteurs
d’activité et prend en compte les
activités agricoles dans les zones
classées fortement dégradées. C’est
ce que nous appelons les « agroforêts ».
Dans ces périmètres, les
communautés pourront pratiquer
une agriculture intensive, en utilisant
moins de surface, mais avec une
meilleure productivité. À cela s’ajoutera
une obligation de planter des arbres
à l’intérieur de ces plantations, avec
un minimum d’une trentaine par

hectare. Ainsi, nous répondons à un
double objectif. Préserver la production
des agriculteurs et retrouver le couvert
forestier. Et aller vers une activité
plus productive qui permettra à
ces populations de tirer un revenu,
sans pour autant détruire la forêt.
Ce sont les concessions agroforestières
d’aménagement durable (CAFAD).
Comment vont fonctionner
ces agroforêts?
Ce concept vise, d’une part,
à concilier la foresterie et l’agriculture
et, d’autre part, à protéger et à étendre
le patrimoine forestier résiduel.
Cette mise en commun renforcera
la maîtrise de la déforestation et
contribuera à encadrer les cultures.
Notre projet prévoit une
catégorisation des forêts classées selon
le taux de couverture, afin de mettre
en œuvre une gestion différentielle
selon les cas. Celles dont le taux de
dégradation de la couverture est

Interview


Alain-Richard Donwahi
MINISTRE IVOIRIEN DES EAUX ET FORÊTS

« L’État a mis en place un cadre


légal et institutionnel novateur »


Au fil des années, la forêt ivoirienne a perdu près de 80 % de sa superficie.
Un désastre écologique. La cause principale : l’agriculture légale et illégale.
Le ministre ivoirien des Eaux et Forêts avance une stratégie ambitieuse,
qui vise à la fois la protection du couvert et des terres cultivables.

propos recueillis par Ouakaltio Ouattara
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