Afrique Magazine N°395-396 – Août-Septembre 2019

(Marcin) #1
AGAZINE I 395-396 AOÛT-SEPTEMBRE 2019

ON EN PARLE


LIVRES


LA LIBERTÉ D’ÊTRE
DU FOND DE SA GEÔLE,
le Turc Ahmet Altan nous
livre 19 textes exemplaires.
« Je ne suis ni où je suis,
ni où je ne suis pas.
Vous pouvez m’enfermer
où vous voulez. Sur les
ailes de mon imagination
infinie, je parcourrai le
monde entier », écrit-il.
Depuis son arrestation,
lors de la tentative de putsch
du 15 juillet 2016, où des
milliers de personnes sont
descendues dans les rues,
à Istanbul et à Ankara, le
journaliste et écrivain vit en
prison. Le 5 juillet dernier,
la Cour suprême turque
a cassé sa condamnation
à perpétuité, mais rejeté
sa demande de remise en
liberté. L’affaire vient d’être
renvoyée devant la 26e Haute
cour pénale d’Istanbul. En
attendant le verdict, ce livre
de résistance et de résilience
est une déclaration. Entre
observations, réflexions,
sensations, puissance des
mots, force de l’imaginaire.
Un actede liberté.■C.F.

?,

ABDOURAHMAN A. WABERI


La force de l’exil


Son dernier roman explore les LIEUX
DE L’ENFANCE. Et de la singularité.

« DIS PAPA, pourquoi tu danses quand tu marches? » La question est innocente,
grave. Il ne peut pas se dérober. Il lui faut raconter ce qui est arrivé à sa jambe.
Expliquer à sa petite fille, sur le chemin de l’école maternelle, à Paris, pourquoi
il boite. Réveiller les souvenirs, retourner à Djibouti, au quartier du Château d’eau,
au pays de l’enfance, ce pays de lumière et de poussière, où la maladie, les fièvres
d’abord, puis cette jambe qui ne voulait plus tenir, l’ont rendu différent, singulier.
Dix ans après Passage des larmes, récit poétique sur l’exil, le fanatisme et la
géopolitique de la Corne de l’Afrique, Abdourahman A. Waberi raconte ici ce
moment qui a tout bouleversé dans son existence, le combat qu’il a engagé ensuite
et qui a fait de lui un homme qui sait le prix des mots, du silence, de la liberté.
Un homme qui danse toujours.
Né en 1965, dans un milieu modeste en Côte française des Somalis (l’actuelle
République de Djibouti, alors colonie française), celui qui deviendra poète,
romancier, journaliste s’expatrie à l’âge de 20 ans pour faire ses études en France.
Dès ses premiers romans, il évoque les déchirements de sa terre d’origine. Des
livres nourris des douleurs de l’exil et de la mémoire confisquée, qui lui vaudront
d’être proscrit de son pays. Après une première trilogie (Le Pays sans ombre, Cahier
nomade, Balbala) dédiée à Djibouti et publiée dans les années 1990, Moisson de
crânes (2000) constate les dégâts du génocide des Tutsis au Rwanda, tandis que
Transit (2003) se déroule dans l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle... Son œuvre,
traduite dans une douzaine de langues, est sous-tendue par son regard incisif.
Doux et sévère à la fois, Waberi le révolté se dit nomade de tempérament.
Il partage sa vie entre Paris et Washington, où il enseigne les littératures
françaises et francophones ainsi que la création littéraire à l’université George
Washington. Aujourd’hui, son engagement s’est élargi. Au-delà du destin
de son pays, il épouse le souffle du monde. ■ C.F.

MICHAEL SETZFANDT - DR (2)

AHMET ALTAN,
Je ne reverrai plus
le monde, Actes Sud,
224 pages, 18,50 €.

AFRIQUEMA

ABDOURAHMANA.
WABERI,Pourquoi tu
dansesquandtu marches?
JC Lattès, 250 pages,
19 €.

L’auteur
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aujourd’hui
savieentre
Pariset
Washington.
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