Afrique Magazine N°395-396 – Août-Septembre 2019

(Marcin) #1
78 AFRIQUE MAGAZINE I 395-396 – AOÛT-SEPTEMBRE 2019

DÉCOUVERTE/Djibouti


Du social, du social


et surtout du... social!


Ismaïl Omar Guelleh a indiqué au nouveau gouvernement la priorité de l’heure :
parvenir à un développement solidaire et inclusif.

 D


jibouti a fait, au cours des vingt
dernières années, d’incontestables
progrès économiques. Au cours
de cette période, le produit intérieur
brut (PIB) a été multiplié par cinq, passant de
100 milliards de francs Djibouti (562 millions
de dollars) à 500 milliards de francs Djibouti
(2,81 milliards de dollars), soit un revenu
par habitant de près de 3 000 dollars – le plus
élevé de la région, géant économique éthiopien
compris. Toutefois, le PIB par habitant ne reflète
pas toute la réalité socio-économique du pays.
Le bouleversement positif de l’écosystème avec les
méga-investissements dans les infrastructures est
réel, mais semble parfois virtuel pour les citoyens.
Comme en témoigne l’indice de développement
humain (IDH) du Programme des Nations Unies
pour le développement (PNUD), Djibouti demeure
dans la catégorie des pays à faible développement,
avec une pauvreté affectant trois habitants
sur quatre et une extrême pauvreté touchant
20 % de la population. Pourquoi un tel écart?
« Ce n’est pas un mal djiboutien mais
africain. » Cette réponse provient de Mohamed
Sikieh Kayad, conseiller financier du président
IOG et plume pour les discours économiques
de ce dernier. Les propos de cet ex-représentant
de l’Afrique de l’Ouest à la Banque mondiale
respirent le pragmatisme : « L’Afrique
subsaharienne connaît depuis plus d’une
décennie une croissance soutenue de 6 à 7 %,
sans arriver à créer de l’emploi ni à enrayer
la pauvreté, car non inclusive. » Selon lui, ce mal
inexplicable frappe exclusivement le continent.
« Avec 1 à 2 % de croissance, l’Europe tourne
autour de 7 à 9 % de chômeurs, l’Amérique

du Nord et ses 3 % de croissance ne déplore
que 5 % de chômeurs, quant à l’Asie, elle baigne
dans le plein-emploi. En Afrique, il y a une
déconnexion entre l’économique et le social,
mais ce n’est pas aux experts de la Banque
mondiale ni à ceux du FMI de nous trouver
la solution. C’est à nous, Africains, de la trouver. »
C’est cette nécessité qui explique en grande
partie le dernier remaniement ministériel.

UNE NOUVELLE FEUILLE DE ROUTE
Le 5 mai 2019, le président IOG s’est entouré
d’une nouvelle équipe gouvernementale pour
un nouveau départ. Quatre jours plus tard,
au cours du premier Conseil des ministres,
il dévoilait la nouvelle feuille de route avec cette
formule : « J’assigne à notre ambition collective
une finalité claire : celle d’un développement
solidaire et inclusif. » En d’autres termes, la
croissance doit produire un impact direct sur
le quotidien des citoyens. La nouvelle philosophie
se résume à du social, du social et... du social.
Quant aux priorités, elles sont déjà identifiées,
mais exigent « des efforts encore plus soutenus
consacrés à l’emploi et à l’employabilité des
jeunes [...], aux politiques publiques en faveur
des femmes et des filles, à la promotion d’un
habitat décent et à l’accès à un logement pour
tous. [Le président] veu[t] que les instruments
novateurs d’inclusion sociale, comme la
couverture maladie universelle (CMU) et
le soutien aux personnes à besoins spéciaux,
soient élargis et renforcés. » Érigé en priorité,
le logement social ne pouvait être pris en charge
par le seul budget national. C’est pourquoi
le chef de l’État a lancé, en octobre 2016,
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