Télérama Magazine N°3630 Du 10 Août 2019

(Nancy Kaufman) #1

198


tnt câble | satellite


t 20.50 Canal+ Cinéma Film

Les Bonnes Intentions


| Film de Gilles Legrand (France, 2018)
| 100 mn. Inédit | Avec Agnès Jaoui, Alban
Ivanov, Tim Seyfi, Eric Veillard, Chantal Yam.
| GEnrE : honorAbLE.
Aider les autres est une drogue dure,
comme le démontre, avec un certain sens
du cabotinage, Agnès Jaoui dans ce numé-
ro de bourgeoise tellement surinvestie
dans l’humanitaire qu’elle en oublie de
prendre soin de sa famille. Prof d’alphabé-
tisation dans un centre social, Isabelle hait
Noël (« une infâme partouze capitaliste »),
pique les vêtements préférés de ses en-

y 21.5 5 Mezzo Concert

Kyle Eastwood


| Enregistré le 5 août 2016 au festival Jazz
in Marciac | réalisation : Jean-Marc birraux
| 60 mn. rediffusion.
Etre le « fils de » n’a pas empêché Kyle
Eastwood d’imposer sa propre voix.
Point de caméra pour le Californien de
48 ans, mais une contrebasse assez élas-
tique et surtout virtuose, capable de
s’aventurer dans la chaleur d’un néo-
hard bop racé comme dans un jazz groo-
vy. C’est cette facette hard bop assumée
qui fit de vraies étincelles lors d’une des
dernières éditions du festival Jazz in Mar-
ciac, au cœur de l’été 2016.
Aux commandes d’un rutilant quintet
presque exclusivement britannique, avec
le saxophoniste Brandon Allen, le trom-
pettiste Quentin Collins, le pianiste An-
drew McCormack et le batteur Chris Hig-
ginbottom, le fils aîné de Clint livre une
partition qui ravit aussi bien les puristes
(relecture vivace du Boogie Stop Shuffle de
Charles Mingus) que le grand public (le
thème du film Cinéma Paradiso).
L’esprit de l’âge d’or du label Blue
Note n’est pas loin, tout au long d’un
riche concert qui agite notamment les
fantômes de Horace Silver ou de Lee Mor-
gan. Histoire de rendre l’affaire encore
plus festive, Kyle Eastwood a convié le
saxophoniste italien Stefano Di Battista à
cette orgie cuivrée au cours de laquelle il
ne tire jamais la couverture à lui. Enfin,
c’est une belle parenthèse hors du temps
que ce duo avec Andrew McCormack, où
le maître de cérémonie interprète à la
basse électrique cinq cordes un thème
qu’il composa pour un film de son père,
Lettres d’Iwo Jima. — Marc Zisman

y 22.30 Canal+ Cinéma Film

Amin


| Film de Philippe Faucon (France, 2018) | Scénario : P. Faucon, Yasmina nini-Faucon et Mustapha
Kharmoudi | 85 mn. Inédit | Avec Moustapha Mbengue (Amin Sow), Emmanuelle Devos (Gabrielle),
Fantine harduin (Célia), Loubna Abidar (la serveuse), ouidad Elma (Selima), Marème n’Diaye (Aïcha).
| GEnrE : LE DérACIné ET LA DIVorCéE.
Sujet dur, film doux : l’exil de ceux qui viennent trimer en France pour soutenir leur
entourage resté au pays. Algériens, Marocains, Maliens ou Sénégalais, comme le héros
discret de cette chronique tout en finesse d’une existence morcelée. Amin, c’est lui,
employé sur un continent, père et mari sur un autre. Philippe Faucon décrit ces deux
vies avec la même humanité, en explore les manques et les rigueurs sans céder au mélo
ou aux démonstrations faciles. D’un côté, il y a les chantiers, les contrats toujours aux
marges de la légalité, le foyer de travailleurs où toutes les nations se croisent et se ré-
chauffent. De l’autre, il y a les yeux de trois enfants remplis d’adoration envers ce père
intermittent, qui revient si rarement. Il y a aussi sa femme, qui n’en peut plus de l’at-
tendre, d’être seule, et qui voudrait le rejoindre.
Comme toujours, Philippe Faucon approche ses personnages avec un respect atten-
tif, leur donne une remarquable densité. Moustapha Mbengue prête son charisme, sa
dignité altière, mais aussi sa tendresse, à un Amin soudain tenté par un chemin de tra-
verse : une liaison imprévue avec la Française Gabrielle (Emmanuelle Devos, sensible
et juste), chez qui il effectue des travaux. Entre l’exilé et la divorcée, entre leurs deux
solitudes si différentes, un autre espace s’ouvre enfin, un temps à l’abri des contraintes
et des fatalités. Après Fatima, Philippe Faucon ajoute un nouveau visage inoubliable à
sa fresque de l’immigration et du déracinement. — Cécile Mury

IstIqlal FIlms-

arte

France

cInema

| ODU/D

alle

Fils de... et fils chéri de sa contrebasse.

fants pour les donner aux réfugiés. Pour
aider ses élèves à décro cher un boulot,
elle leur fait passer le permis de conduire,
avec l’aide d’un moniteur d’auto-école
branquignol (Alban Ivanov).
Le film explore, avec plus ou moins de
bonheur, ces bonnes intentions qui créent
une forme d’aveuglement. A vouloir dé-
noncer les préjugés racistes, cette satire
sociale se prend parfois les pieds dedans.
Et les scènes et les dialogues incisifs, parfois
hilarants, alternent avec des séquences
pataudes. — Hélène Marzolf

La divorcée
et l’immigré :


deux solitudes
un moment à l’abri
des contraintes
et des fatalités.


Télérama 3630-3631 07 / 08 / 19
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