Télérama Magazine N°3630 Du 10 Août 2019

(Nancy Kaufman) #1
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Guy DELAHA


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| Etats-Unis


(2h45) | Scénario :


Q. Tarantino.


Avec Brad Pitt,


Leonardo DiCaprio,


Margot Robbie,


Al Pacino,


Timothy Olyphant,


Dakota Fanning,


Emile Hirsch.


cette semaine, nous sommes...


charmés Galvanisés


émus


intriGués


épatés


époustouflés


musique, sons de toutes sortes...


tout est éblouissement sous la


plume du Suisse robert walser.


Le post-punk revisité de


the murder capital, quintette


formé à Dublin. rageur et passionné.


portrait de femmes blessées dans le


Leningrad de 1945 : une grande fille


évoque les maîtres du cinéma russe.


A Vichy, le selfie sous tous ses angles.


selfies, égaux/egos, une exploration


du narcissisme contemporain.


A Grignan, ruy blas, le chef-d’œuvre


politique de Victor Hugo, servi par


une mise en scène sobre et élégante.


Le chef-d’œuvre aux quatre oscars de


Bergman, fanny et alexandre, enfin


dans sa version intégrale et inédite.


Jeux de miroirs


Le tempo décontracté de ce neuvième film de


Tarantino n’empêche nullement le trouble. On en vient


à confondre (avec plaisir) le vrai et le faux, dans le jeu


qu’il orchestre autour des citations de films, de séries,


d’affiches et d’acteurs. Parmi les vrais noms, outre


Sharon Tate, on croise aussi Steve McQueen et Bruce


Lee (dans une séquence hilarante), campés par des


acteurs. Côté séries, défilent à la télé des passages


de Mannix et Bonanza. Côté films, Sharon Tate (Margot


Robbie) rentre un moment dans une salle qui projette


un film dans lequel elle a joué, Martin Helm règle ses


comptes (1968), de Phil Karlson, avec Dean Martin. Plus


ludique encore est l’incrustation de Leonardo DiCaprio,


à la place de Steve McQueen, dans une séquence


de La Grande Evasion (1968), de John Sturges, l’un


des douze films favoris de Tarantino. Qui fait par


ailleurs plusieurs allusions à Sergio Corbucci, cinéaste


longtemps dédaigné, aujourd’hui réévalué...


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dissements. Le film tient de la balade


indolente, de la remémoration. Il sé-


duit mais prend aussi le risque de frus-


trer. Rien de spectaculaire ici, sinon le


bain de sang final, catharsis cartoo-


nesque jubilatoire et virtuose dans son


déroulé. Pour le reste, Tarantino a ren-


gainé ses flingues et sa perversion,


pour quelque chose de plus doux. Il


reste lui-même tout en étant un autre.


Doublure, décalque, reprise... le ci-


néaste joue avec ces notions. Y com-


pris dans la musique, où il a fait le


choix de titres fameux (des Rolling


Stones ou des Mamas and the Papas...)


repris par d’autres. Comme s’il ne fal-


lait surtout rien de majeur, de profond,


mais au contraire une forme de survol


mélodieux. Une séquence, géniale-


ment anodine, résume bien cet effleu-


rement. Brad Pitt (léger et puissant à la


fois) doit réparer l’antenne de télévi-


sion de Rick, absent de la maison. Il dé-


barque là-bas, prend quelques outils


dans le garage, arrive sur le toit en


deux, trois mouvements ahurissants


d’agilité. Posté au soleil tout près de


l’antenne bringuebalante, il enlève son


tee-shirt, arborant un torse de marbre


antique, malgré les cicatrices. La ca-


méra s’attarde sur lui, qui surplombe


le monde, regarde tout autour, entend


le rock enjoué au loin qui s’échappe


d’une fenêtre de la chambre de Sharon


Tate. Dans ce moment suspendu passe


la sensation d’une dolce vita hollywoo-


dienne. Tout cela disparaîtra bientôt,


l’innocence sera perdue.


— Jacques Morice


Lire aussi p. 6, 79 et, dans notre précédent


numéro, l’interview de Quentin Tarantino.


Télérama 3630-3631 07 / 08 / 19
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