Télérama Magazine N°3630 Du 10 Août 2019

(Nancy Kaufman) #1
83

samedi 10


y 21.05 Canal+ Série

Témoin indésirable


d‘après Agatha Christie


| Minisérie de Sarah Phelps (saison 1, 1 et 2/4, GB/USA, 2018) | 2 × 50 mn. VM. Rediffusion
| Avec Bill Nighy (Leo Argyll), Anna Chancellor (Rachel Argyll), Matthew Goode (Philip Durrant).
Au milieu des années 1950, une riche héritière, Rachel Argyll, est assassinée chez elle en
présence de son mari, de ses cinq enfants adoptifs, de son gendre et de sa domestique.
Les preuves accablent Jack, le fils mal-aimé, qui clame son innocence. Emprisonné, il
est tué par un codétenu. Un an et demi plus tard, un homme corrobore l’alibi de Jack.
Soit ce témoin ment, soit le tueur court toujours au sein de la famille...
Après l’adaptation réussie de Dix Petits Nègres, la scénariste Sarah Phelps poursuit
avec brio son travail de relecture des œuvres d’Agatha Christie : une écriture moderne
associée à une mise en scène fastueuse. Le résultat est un conte cruel hitchcockien, aux
allures gothiques et théâtrales, qui fait craquer le vernis d’une famille dysfonctionnelle,
symbole d’un vieux monde exsangue bâti sur des faux-semblants. Paranos et repliés sur
eux (belle métaphore de la menace nucléaire de l’après-guerre), les personnages sont
beaucoup plus torturés que dans l’œuvre originale. Cette réécriture, plus sombre, ain-
si qu’un changement de taille dans la résolution du mystère n’ont pas plu à tout le
monde outre-Manche. Il nous semble pourtant que ce dépoussiérage ludique n’est pas
un manque de respect, mais qu’il renouvelle le plaisir de plonger dans l’univers de la
romancière. — Sébastien Mauge
Rediffusions sur Canal+ Décalé : 11/8 à 9.15 et 20.55.

t 0.35 France 3 Opéra

Werther


| Drame lyrique de Jules Massenet.
Livret d’Edouard Blau, Paul Milliet et Georges
Hartmann, d’après Goethe | Enregistré en février
2017 à l’Opéra-Théâtre de Metz-Métropole
| Mise en scène : Paul-Emile Fourny | 150 mn.
Rediff. | Par l’Orchestre national de Lorraine
et le Chœur d’enfants spécialisé du conservatoire
à rayonnement régional de Metz-Métropole,
dirigés par David Heusel | Avec Sébastien
Guèze (Werther), Mireille Lebel (Charlotte),
Alexandre Duhamel (Albert), Léonie Renaud
(Sophie), Christian Tréguier (le bailli de Wetzlar).
Un amour pur mais impossible, une femme
élevée jusqu’à l’idéal, un jeune homme
trop épris qui veut se faire sauter la cer-
velle : Les Souffrances du jeune Werther, pu-
blié par Goethe en 1774, possède tous les
ingrédients d’un grand opéra. C’est à quoi
Massenet travailla de 1885 à 1887, avec une
ardeur que le public sut récompenser dès
la première, à Vienne, en 1892. Plus d’un
siècle après sa parution, il n’y avait plus à
craindre de vagues de suicides parmi les
jeunes gens hantés par le « mal du siècle » ;
dégradé jusqu’au cliché, le romantisme
n’était déjà plus une esthétique et une phi-
losophie, juste un état d’âme.
Le temps n’a guère arrangé les choses,
engonçant ce malheureux Werther dans
des élans de plus en plus surannés. La mu-
sique contient certes de belles pages, mais
il lui faut le secours d’une mise en scène
audacieuse pour frapper encore les imagi-
nations. Las, celle de Paul-Emile Fourny
peine à faire saillir les tourments du jeune
homme, pourtant interprété avec cœur
par Sébastien Guèze, et tout autant à resti-
tuer les emportements ambigus de Char-
lotte, elle aussi servie par une Mireille
Lebel très impliquée. C’est à un drame
bourgeois que l’on assiste, non à une tragé-
die romantique. — Louis-Julien Nicolaou

y 22.00 LCP-Public Sénat Documentaire

I Love Guéret


| Documentaire de Guillaume Estivie (France, 2017) | 60 mn. Rediffusion.
C’est un documentaire sur la France dite « profonde ». Celle de la
diagonale du vide, des commerces qui ferment et des jeunes qui
s’en vont... Pas de quoi effrayer Guillaume Estivie, qui nous em-
barque en plein cœur de la Creuse, dans la petite commune de
Guéret. Un peu plus de dix mille âmes, une centaine de nais-
sances par an, et un taux de chômage qui frise les 17 %... La carte
postale ne fait pas rêver. Pourtant, en dépit des apparences, la
ville bouge, vit et se réinvente! « J’entends souvent dire que Guéret
est à l’agonie. Pourtant, son cœur bat comme jamais », confie le réa-
lisateur. Ce natif du pays en est intimement convaincu.
Caméra au poing, une tendresse malicieuse dans la voix, il ar-
pente les rues nez au vent, se laisse porter au hasard des ren-
contres. En résulte une belle galerie de portraits, parfois drôlis-
simes —  comme cette mamie Paulette que l’on suit lors d’une
séquence inoubliable dans une galerie branchée —, parfois
émouvants — à l’instar du témoignage de Jean-Pierre, « enfant de
la Creuse » parachuté depuis La Réunion dans les années 1960
pour compenser l’exode rural. Ce road-trip à hauteur d’homme,
bien plus digeste qu’une brochure touristique, attise notre curio-
sité juste ce qu’il faut pour nous donner envie de découvrir les

MaMMoth Screen/lieux par nous-mêmes. Banco! — Pauline Vallée


agatha


chriS


tie LiMited


L’honorable Bill Nighy est un comédien britannique raffiné, et cela se voit au premier coup d’œil.

Télérama 3630-3631 07 / 08 / 19
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