Martine Aubry
et sa désormais
ex-directrice de
cabinet, Violette
Spillebout,
en 2011.PHOTO
F. CRUSIAUX. REA
P
as folle, la guêpe. Connaissant son point
faible, l’écologie, Martine Aubry s’em-
ploie depuis un an à reverdir son action.
Lille a été ainsi candidate au label européen
«capitale verte», sans succès. Mais ces efforts
n’effacent pas un dossier symbolique, le pro-
gramme de construction de 2400 logements
et d’une piscine sur la friche SNCF de Saint-
Sauveur, à côté du centre-ville. Face au béton-
nage d’un des derniers grands espaces libres
de la ville, qui manque autant de parcs et d’ar-
bres que de logements, la résistance s’est orga-
nisée. Associations et collectifs demandent
l’abandon du projet et la transformation de
Saint-Sauveur en poumon vert.
Bataille.Ils ont des arguments: ils craignent
un accroissement de la circulation dans le sec-
teur, avec les nouveaux habitants et le trafic
généré par la piscine, alors que Lille souffre de
plus en plus de la pollution de l’air. Déjà qua-
tre pics depuis le début de l’année, avec mise
en place de la circulation différenciée.«Saint-
Sauveur a un effet îlot de fraîcheur. De plus, la
piscine est prévue au-dessus d’un champ cap-
tant[pour remplir une nappe phréatique, ndlr]
alors que Lille est en arrêté sécheresse»,
s’alarme Bénédicte Vidaillet, coprésidente de
l’association Parc Saint-Sauveur.
Les opposants mènent la bataille sur le plan
juridique (recours devant le tribunal adminis-
tratif) et sur le terrain, en organisant l’occupa-
tion, plutôt paisible, de la friche, pour empê-
cher les travaux. Provocation potache, un
grand doigt d’honneur en bois a été dressé
dans l’alignement du beffroi de la mairie. Car
qu’importe que le projet soit porté par la mé-
tropole européenne et non par la ville directe-
ment, Martine Aubry est tenue responsable
sur le sujet.«On en a marre de se faire traiter
de bobos»,lâche Bénédicte Vidaillet. La maire
de Lille avait expliqué que si on voulait vivre
au milieu de la nature, il fallait partir à la cam-
pagne. Les Verts, qui font partie de la majorité
municipale, ont montré leur exaspération sur
le dossier. Opportunément, Violette Spille-
bout, la prétendante LREM aux municipales,
a choisi un slogan de circonstance pour sa
campagne :«Faire respirer Lille.»
Candidat lui aussi, Marc-Philippe Daubresse
(LR) ronchonne. Il avait dégainé avant la can-
didate macroniste un programme très vert.
L’ex-ministre du Logement de Jacques Chirac
y fait sa révolution écologique: rénovation des
passoires thermiques plutôt que de nouveaux
projets immobiliers, création de parcs, réfé-
rendum sur Saint-Sauveur... Bénédicte Vi-
daillet s’en réjouit : «La position de
M. Daubresse est très significative.»
Nature.Violette Spillebout le reconnaît, la
friche sera l’un des marqueurs de la campa-
gne:«C’est l’illustration d’un problème de mé-
thode, d’une administration municipale qui n’a
pas été capable de bouger sur le fond, face au
besoin exprimé de nature en ville.»Daubresse
renchérit:«Martine Aubry reste sur un point
de vue du XXesiècle, avec toujours plus de loge-
ments. Je pense qu’elle fait fausse route.»
St.M.
La friche Saint-Sauveur, terrain d’enjeux
Poumon vert ou futurs
logements, l’ancienne gare
est au cœur des programmes
des candidats aux municipales.
Libération Lundi12 Août 2019 http://www.liberation.fr ffacebook.com/liberation t@libe u 11