Provence - 2019-08-14

(Jacob Rumans) #1

C


inq euros lescinqkilos ?Moi j’em-
barq ue.Onest sixàlamaison et
on n’hésite pas. En plus, ici, c’est
autre chose!", lance Germaine en po-
sant son plateaudenectarinesdans
un chariot ou s’empilentdéjà une pas-
tèque, six melons, des tomates, des au-
bergines, des poivrons et duraisin.Le
tout pour un peu plus d’une trentaine
d’euros. "C’est moinscher qu’en
grande surface ou d’ailleurs je ne mets
jamaislespieds.Mafemmecuisine
beaucoup et ici c’est de qualité. Et au
moins je sais ce que je mange", renché-
ritGérard.Une appréciation maintes
fois entendue sous le grandchapiteau
blanc de la halle de producteurs
"Terres de Provence" quichaquelun-
di, mercredi et vendredi jusqu’au
25 octobre,réunitsur la zone commer-
ciale de Plan-de-Campagne, entre Aix
et Marseille,jusqu’à 38 agriculteurs
provençaux. Un lieu accessibleàpartir

de 17 h, qui très vite se mue en un effer-
vescentmarché coloré. "On ne le répé-
tera jamais assez, mais c’est un marché
de vente directe, du producteur au par-
ticulier. Ilaété créé pour mieux faire
connaître nosproduits locaux et de sai-
son", insiste André Boulard. Qui, ayant
quitté sa casquettedemembre de la
Chambre d’agriculture des
Bouches-du-Rhône, propose melons
charentais,poivrons et pommes de
terre cultivéssur l’exploitationfami-
liale de Noves. Au fond de laHalle, Mi-
chèleColladoconfirme. "Je viens de-
puis le début.Les vergers Passereau
sontàEntressensetl ahalle permet de

resserrerles liens entre producteurs et
consommateurs. Ils voientdes visages,
ilsposent des questions sur lespra-
tiques, la saison. Ils ne parlent pas que
du prix et ça c’est encourageant pour
nous autresagriculteurs".
"Venirà’Terres de Provence’ permet
de faire connaître nos tomates an-
ciennesde plein champ.Cette année
nous n’avonsmêmepas cultivé sous
tunnel", explique Alexandre Troupel.
Une pratique qu’il entend étendre à
l’instantoul’exploitation de Château-
neuf-les-Martigues va être portée de 2
à7hect ares. "C’est encore meilleur
commecela et noussommesenconver-
sion bio".
CatherineetLionel Reynaud,àla
tête du domaine des Trois Cyprès qui
partage ses 20 hectaresentre Noves et
Eyragues, sont des habitués de la Halle
où ils vendent actuellement une partie
de leur production de raisins de table.

Du cardinal, du muscat, du primat de
Hambourg, de la perle de Scabat et
bientôt un blanc sans pépin. Le succès
est tel qu’enàpeine une heure, four-
gon et étal se sont vidés.Lionel se fait
alors plus disert. "Les personnesqui
viennent icisemontrent curieuses. Et
cela nous obligeàêtre de qualité, elles
nous poussentàoser,même. J’amène
une vieille variété de raisin blanc que je
ne proposerais pas ailleurs.Mais ici il y
aune petite étincelle". Puis de pour-
suivre:"Je viens aussiàlaHalle parce
que la vente directe procure une trésore-
rie qui permetdenepas s’adresser aux
banquesdans une périodeou il estné-

cessairededisposerdesaisonnierset
d’une certaine fluidité".
Àquelques mètresdelui, Benoit Ma-
losse, venudeBarbentane où ilare-
joint l’exploitation familiale ilya
quatre ans, propose des poires Guyot
et sespremières prunes
"reine-Claude". Lui aussi trouve avec
le marché de Plan-de-Campagne de
nouvellesressources."Icijepeuxpar
exemple écouler des fruits pour la confi-
ture. Ilyaune demande".
Et puis ilyace qui ne se dit pas d’em-
blée.Àsavoir que pour nombre d’agri-
culteurs, la ventedirecteest une
bouée parce que le mois de juilletaété
difficile. "La caniculeaaccéléré la ma-
turitédesfruitsetpousséàlarécolte.Il
yaeudespicsetfauted’unedemande
suffisante,des produits ont été perdus.
J’aimoi-mêmeétéobligédejeterdes
melons,avoue AndréBoulard.Aujour-
d’huileschosess’améliorentetc’est
tant mieux".

Fruits,légumes :onles adore!


Légume-fruit (pour la botanique elle est un fruit, mais on la
consomme comme un légume), la tomate produite sous serre dans
les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse (sur plus de 800 hectares en
production, 700 sont couverts) ou en plein champ, est une inépui-
sable source d’inspiration.Lademande est telle que de plus en
plus de producteurs réintroduisentdes variétés anciennes dont le
développement va de pair avec la montée en puissance du bio.
Pour autant, en juin et juillet la production s’est heurtéeàune
consommation morose.Les maraîchers espèrentque le mois
d’août,période de pleine production, effacera
ces difficultés. La Provence produit près de
145 000 tonnesàl’année et génère 20%dela
production nationale.

Pêches et nectarines (la différence vient d’unemu-
tation naturelle qui fait que la nectarineaperdu le
duvet de la peau de pêche) sont des fruits de saison par excellence.
"C’est un péché de ne pas manger de pêches en été" proclame
d’ailleurs chaque année un point de vente directe installé au
rond-point de la Fossette, sur la route d’Arles. Seconde région pro-
ductrice après l’Occitanie avec2100 hectares,nos vergers livrent
plus de 31 000 tonnes de fruits, soit 30%delaproduction nationale.
Ànoter que cette année les fruits, malmenés par le climat et la cani-
cule, sont de plus petit calibre. Et les prix de vente sont en hausse.

La récolte2019, pratiquement achevée aujourd’hui,aété chahu-
tée. Les pertesont en effet étéimportantes dans la valléedu
Rhône quiaconnu des épisodes de grêle en juin. La région, qui
compte1800 hectaresde vergers et produitunemoyennean-
nuelle de 23 000 tonnes sur un total français de 147 000 tonnes,
s’en est cependant bien sortie. La productionaété plutôt en
hausse et tardive, mais les fruits ont été plus petits.
Pour les producteurs, les prix ont aussi été orientés
àlabaisse, danstous les cas inférieursàla
moyenne observée entre 2014 et 2018.

Si la région Provence-Alpes-Côte d’Azurestune terre de viticul-
ture, la culture de raisins de table noir et blanc est aussi une spéciali-
té. Notamment dansleVaucluse qui, très loin devant les
Bouches-du-Rhône, avec ses 28 000 tonnes, livreàlui seul plus de
70 %delaproduction française. Le départementamême son cham-
pion avec le muscat du Ventoux qui est une appellation
d’origine contrôlée appréciée. Autant dire que
le Vaucluse est le nº1 français, notrepays
étant le nº4 européen avec une production an-
nuelle moyenne de 50 000 tonnes.

1

re


région productrice pour les lai-
tues et la chicorée, les pommes,
les poires d’été, les cerises, les
courgettes, les figues, le raisin
de table, les olives et le riz.Àce
palmarès, on peut ajouterlala-
vande et le lavandin.

2

e


région productrice pour les
fraises,les pêches et les necta-
rines, les tomates, les auber-
gines et les poivrons.

3

e


région productrice pour les
melons,lesabricots,lesépi-
nards, les artichauts et le raisin
destinéàlaviticulture.

La région livre principalementdes poires d’été, dont la
Guyot. Un fruit plutôt charnu que beaucoup apprécient
avant qu’il atteigne sa pleine maturité et vire du vert au
jaune. Sa production devrait être en baisse cette année, comme en
Occitanie d’ailleurs, en raison des sautes du climat. La floraison et
la formation terminale du fruit ont en effet été perturbées par le
froid du début d’année, puis la grêle et le vent. La poireaégale-
ment souffert de la récente canicule quiafreiné la production.
Quelques producteurs font état de poires "cuites" sur l’arbre. Avec
la Williams, autre star, près de2200 hectares sont en production.
Ce verger livre 27 000 des 30 000 tonnes de Guyot produites en
France et 16 000 des 42 000 tonnes de Williams françaises.

La Provence livre plusieurs variétés, mais la plus répandue et
appréciée est sans conteste le Charentais.Ferme et sucré, coupé
en moitié ou en tranches, il figure sur toutes les tables de l’été. La
demande étant en progression, nombreuxsont ceuxqui ont re-
joint les rangs des producteurs sous serre ou de plein air. Au total,
Vaucluse et Bouches-du-Rhône livrent 46 500 tonnes de ce lé-
gume. Un printemps frais et maussadeaengendré des
retardsdans la production.Les melons de petit ca-
libre ont aussi été bien plus nombreux. La canicule a
ensuite accéléré l’arrivéeàmaturité, obligeantàla
récolte.Des perturbations qui s’estompent en ce
mois d’août ou les prix restent corrects.

La saison de ce fruit dont la Provence est l’un des
principauxterritoires de production avec près
de 2700 hectares de vergers, s’achève. Elle s’est dé-
roulée normalement, malgré les intempéries du
mois de mai qui ont suivi une floraison abondante. Chaque année,
environ6200 tonnes de cerises (toutes variétés confondues) sont
récoltées pour ce que lesagriculteurs nomment"les fruits de
bouche".Àcelas’ajoutent prèsde 5400 tonnes destinéesàl’indus-
trie dont un des fiefs est la ville d’Apt. Chaque année, la France
produit près de 35 000 tonnes de cerises.

PÊCHES/NECTARINES


TOMATES


RAISINS DE TABLE


Il s’agit d’un ensemble composé des aubergines, des courgettes
et des poivrons. Trois légumes phares du maraîchage provençal qui
entrent dans la composition les paniersdesaison et d’unespéciali-
té... la ratatouille. D’où cette appellation. Produits sous serre ou,
dans une moindre mesure, en plein champ, ces légumes sont très
présents sur les étals car de pleine saison. La demande, plutôt miti-
gée durant le moisdejuillet, semble s’être ampli-
fiée en ce début d’août. Plus de 37 000 tonnes de
courgettes,6000 tonnes d’aubergines et 3700
tonnes de poivrons sont produites sur notre sol.

Jaunes, rouges ou vertes, les pommes des vergers pro-
vençaux qui couvrent 10 000 hectares dans les
Bouches-du-Rhône, le Vaucluse et la vallée de la Durance(les
Alpes-de-Haute-Provence bénéficient d’une appellation géogra-
phique)sur un total de 38 000 en France, sont appréciéesets’ex-
portent. La récolte, qui n’a pas encore débuté, ne devrait pas être
exceptionnelle. Le gel en avril et maiaeneffet touché les vergers au
moment de la floraison, surtout dans les vallées alpines où la perte a
été estiméeà15%pour ce qui concerne les Golden. Le ventaaccen-
tué les chutes de fruits et la canicule n’a pas arrangé les choses.

MELONS


CERISES ABRICOTS


LÉGUMESÀRATATOUILLE


LE PALMARÈS


POMMES


L


arégion proven-


çale est un des


vergers de la


France. En té-


moigne la diversité de ses


productions aptesàfigu-


rer sur les trois premières


marches d’un podium.


Pour autant, les fruits et


légumes que plus de


20 000 exploitations


livrentàlaconsomma-


tion, ne sont pas toujours


perçusàleur juste valeur.


Un mal dont souffrent nos


agriculteurs, de plus en


plus tentéspar la vente di-


recte et la rencontre avec


les consommateurs,


eux-mêmesdeplusen


plus curieux et soucieux


des pratiques culturales.


Le succès de l’initiative


"Terres de Provence", lan-


cée ilya9ans, en est une


illustration.


Tomates, aubergines, poivrons:légumes les plus appréciés durantl’été. "Terres de Provence" ouvre jusqu’en octobre./PHOTO GEORGES ROBERT


POIRES


Le panier moyenaété


de 17,5 kg achetés pour


un montant total de 38,15¤.


Par Jean-Luc CROZEL
[email protected]

Le concept de la halle


de producteursaattiré


l’an passé 124 000 clients.


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