2019-08-17_Le_Temps

(Tina Sui) #1

PROPOS RECUEILLIS PAR RACHEL RICHTERICH
t @RRichterich


Le creux de l’été, Remo Lütolf n’a pas
dû le connaître souvent. Ex-directeur
de la filiale helvétique du groupe d’élec-
trotechnique ABB et président de l’en-
treprise d’armement Ruag, à 63 ans, il
est un habitué des restructurations qui
touchent cycliquement l’industrie. Et
ce n’est pas en prenant la présidence
de Meyer Burger il y a 100 jours qu’il
allait profiter de la torpeur estivale.
L’équipementier photovoltaïque ber-
nois, qui se démène depuis des années
avec sa rentabilité, s’est enfoncé dans
le rouge au premier semestre. Sous la
pression des actionnaires, Remo Lütolf
a dévoilé cette semaine les contours
d’une nouvelle stratégie, dont il livre
des détails.


Meyer Burger est à la pointe du photovol-
taïque, tandis que la demande en énergie
solaire explose, à un rythme de plus de 100
GW par an. Pourtant la société creuse ses
pertes, sans jamais avoir pu rétribuer ses
actionnaires. Pourquoi? Remo Lütolf:
Nous
subissons de front les conséquences de
la politique de subventionnement de
l’énergie solaire par Pékin. Sur les prix,
d’une part, puisque la production de
panneaux photovoltaïques se concentre
aujourd’hui à 90% en Chine, où les entre-
prises sont davantage orientées sur les
volumes que sur les marges. D’autre
part, sur la propriété intellectuelle,
puisque des machines que nous avons


livrées à certaines entreprises chinoises
ont été copiées. Ces contrefaçons ven-
dues à moindre coût ont fait plonger nos
commandes.

Le groupe a-t-il fait preuve de trop de
naïveté dans sa conquête du marché
chinois? C’était un marché très attractif
ces cinq à dix dernières
années, nous aurions eu tort
de nous en priver. Mais au vu
des talents de faussaire de cer-
taines entreprises chinoises,
nous devons changer notre approche.
C’est l’un des points sur lesquels nous
axons notre analyse visant à modeler
une nouvelle stratégie pour le groupe.

Comment évaluez-vous ce risque dans le
cadre de votre partenariat avec REC, filiale

du groupe norvégien Elkem, lui-même en
mains du conglomérat chinois Chem-
China? REC est un partenaire avec
lequel nous travaillons déjà. C’est par
ailleurs une entreprise fondée et domi-
ciliée en Norvège. L’opérationnel, soit
là où seront livrés nos équipements, se
trouve à Singapour. Ces deux pays
offrent de bonnes conditions-cadres,
où le respect de la propriété intellec-
tuelle peut être garanti.

L’étape suivante semble être une vente
de la société, l’option est toujours à
l’étude? Pour l’heure, nous nous concen-
trons sur l’accord conclu cette semaine
avec REC et qui fonctionne selon un
modèle d’affaires inédit: nous mettons
à la disposition de ce fabricant de pan-
neaux solaires des équipements per-
mettant de produire à large échelle des
cellules de dernière génération utili-
sant l’hétérojonction (HJT) combinée
aux connexions intelligentes
SmartWire; REC s’engage de son côté
à partager ses bénéfices avec Meyer
Burger, selon une répartition qui doit
encore être définie. Nous ne nous
contentons ainsi plus seulement de
vendre des équipements, mais nous
pouvons faire du revenu plus loin sur
la chaîne de valeur.

La production de panneaux
solaires se concentre en Asie. En
misant sur une montée en gamme
dans l’hétérojonction, Meyer
Burger cherche-t-il à restaurer
une industrie solaire en Europe? C’est
envisageable: nos machines permettent
de fabriquer des panneaux de dernière
génération, avec une meilleure effi-
cience que le standard actuel (22%
contre 20%), qui pourront être vendus
plus cher. Et ce, grâce à des processus

largement automatisés, abaissant les
coûts de main-d’œuvre. De quoi renta-
biliser l’investissement initial.

L’action Meyer Burger a chuté de 30%
depuis le début de l’année, de 60% depuis
son entrée en bourse il y a 13 ans. Vos
actionnaires s’impatientent, Sentis (plus
de 10% du capital) exige d’entrer au conseil
d’administration. Jusqu’à quand pen-
sez-vous pouvoir compter dessus? Nous
discutons, dans un climat qui s’est tendu
dernièrement. Notre mauvaise perfor-
mance boursière reflète le contexte
difficile dans lequel nous évoluons. Les
surcapacités causées par l’entrée fracas-
sante de la Chine sur le marché, puis le
brusque frein au subventionnement l’an
passé ont conduit à des faillites. Nous
sommes malgré tout parvenus à nous
maintenir. Ce, grâce à notre capacité
d’innovation, obtenue à travers nos col-
laborations avec les milieux scienti-
fiques. Celles-ci nous permettent de
proposer des équipements à la pointe
au niveau mondial dans l’hétérojonc-
tion, tout en travaillant sur les techno-
logies d’après-demain que sont les
pérovskites. Par ailleurs, le modèle d’af-
faires que nous sommes en train de
mettre en place avec REC doit nous per-
mettre de faire du profit plus loin sur la
chaîne de valeur. n

«Meyer Burger a souffert


des contrefaçons chinoises»


SOLAIRE Le président de l’équipe-
mentier photovoltaïque bernois, Remo
Lütolf, revient sur les exercices à pertes,
évoque sa stratégie pour sortir du
marasme et pour, peut-être, restaurer
une production solaire en Europe


Source: Bloomberg

16 août

TAUX DE CHANGE
En francs

1,

1,

1,
1,
0,
0,
23 mai

Euro 1,

Dollar 0,

SMI / CLÔTURE: 9728,
Performance sur 3 mois: +1,40%

23 mai 16 août

8800

9440
9120

STOXX EUROPE 600 / CLÔTURE: 369,
Performance sur 3 mois: -1,11%
393

373

353

333
23 mai 16 août

OBLIGATIONS
Taux à 10 ans

23 mai 16 août

Etats-Unis 1,558%
Europe -0,685%

Suisse -1,

2
1
0







S&P 500 / 18H: 2888,
Performance sur 3 mois: +2,55%

2900

3000

2700
2600

2800

23 mai 16 août

TOPIX (TOKYO) / CLÔTURE: 1485,
Performance sur 3 mois: -3,59%

1300

1500

1700

1900

23 mai 16 août

10 080
9760

Reprise sur un large front
La bourse suisse a démarré la
dernière séance de la semaine
en hausse de 0,32% à 9637,25 points, après
avoir reculé la veille. Les indications
préalables en provenance de Wall Street
étaient contrastées dans le sillage du
conflit commercial avec la Chine. Le Dow
Jones a gagné 0,39% à 25579,39 points,
alors que le Nasdaq s’effritait de 0,09% à
7766,62 points. Le SMI a clôturé en forte
hausse de 1,27% à 9728,39 points et le SPI
de 1,24% à 11 826,61 points. Parmi les poids
lourds défensifs, Roche (+1,58% à 273,
francs) a annoncé jeudi soir avoir reçu des
autorités sanitaires américaines (FDA)
l’autorisation de mise sur le marché pour
son anticancéreux Rozlytrek (Entrectinib)
pour le traitement d’un type de cancer du
poumon. Son homologue Novartis a
engrangé 1,23% à 87,52 francs et le géant
alimentaire Nestlé 1,20% à 107,76 francs.
Les bancaires UBS (+1,73% à 10,14 francs)
et Credit Suisse (+1,75% à 11,05 francs) ont
également gagné du terrain malgré la
réduction de leur objectif de cours par la
Banque royale du Canada (RBC). Julius
Baer s’est apprécié de 2,34% à 37,
francs. Sur le marché élargi, Vifor a gagné
0,46% à 154,
francs malgré sa
dégradation par
Goldman Sachs.
En revanche,
JPMorgan a
relevé son
objectif de cours
sur la valeur.
Pour sa part,
Gurit (+3,85% à
1080 francs) a publié ses résultats
semestriels jeudi soir. Le fabricant de
matières synthétiques a augmenté ses
ventes et son bénéfice, qui ont dépassé les
attentes des analystes. Baader Helvea a
souligné la forte hausse de liquidités et les
bonnes perspectives. n BCGE, SALLE DES
MARCHÉS

PROPOSÉ PAR

CHARTE ÉDITORIALE http://www.letemps.ch/partenariats

BOURSE


0,

0,

0,

0,

Action Meyer Burger, en franc

Source: Bloomberg

0,

31.12.18 16.08.

INVESTISSEURS DEÇUS

INTERVIEW


REMO LÜTOLF
PRÉSIDENT
DE MEYER BURGER

«Le modèle d’affaires


que nous sommes


en train de mettre


en place avec REC


doit nous permettre


de faire du profit


plus loin sur


la chaîne de valeur»
LE TITRE VEDETTE

Source: Bloomberg

474

478

482

486

Swisscom

+2,98%

9h00 17h

SAMEDI 17 AOÛT 2019 LE TEMPS

Economie & Finance 9


PUBLICITÉ

Free download pdf