Batailles et Blindés Hors Série N°40 – Août-Septembre 2019

(Barré) #1
 Plus les Américains talonnent les Allemands, plus ces derniers oublient de faire sauter
les ponts qu'ils laissent derrière eux. Un mitrailleur ici pose pour le photographe sur
un pont alors que les hommes en arrière-plan ne semblent pas très menacés...
 Eisenhower est un des architectes de la victoire alliée. Planificateur méticuleux,
c'est lui qui a la lourde charge de gérer les relations entre Américains et Britanniques,
dont plusieurs caractères ombrageux tels Montgomery ou Patton...

VERS LE CŒUR DU REICH!
Du côté allié, la Third Army du fougueux (mais contro-
versé) général George S. Patton semble impossible à
arrêter. Au début du mois de septembre 1944, sa for-
mation a déjà atteint la Lorraine en formant un véritable
fer de lance ; au sud progressent à grande vitesse les
troupes franco-américaines ayant débarqué en Provence
lors de l’opération « Dragoon » du mois d’août 1944.
Comme ces deux unités n’ont pas encore effectué
leur jonction, Hitler y voit l’occasion de réaliser une
grande bataille d’encerclement en mobilisant de nom-
breux Panzer en Lorraine : frapper la Third Army sur son
flanc revient au très ambitieux General der Panzertruppe
Hasso von Manteuffel et sa 5. Panzerarmee. En pointe
du dispositif de Patton se trouvent les XII et XX Corps
américains, dont certaines divisions n’ont pas encore
totalement récupéré des dégâts subis depuis leur arrivée
en Normandie : les 90th et la 35th Infantry Division
manquent de personnels, tandis que la 4th Armored
Division, elle, a vu ses troupes subir de lourdes attaques
durant les mois de juillet et d’août. Ce n’est pas tant le
besoin de renforts qui inquiète Patton au début du mois
de septembre mais la baisse drastique des approvision-
nements en carburant pour ses éléments motorisés.
La progression rapide des troupes alliées en France met
à rude épreuve le cinquième principe cher à Sun Tzu,
la logistique : le ravitaillement en carburant ne suit tout
simplement pas assez rapidement!
Le 29 août 1944, le général Eisenhower fait parvenir
à ses subordonnés une lettre où il décrit la marche
à suivre : « L’armée allemande à l’Ouest a subi une
défaite significative durant la campagne de la Seine et de
la Loire, défaite infligée par les forces alliées combinées.
L’ennemi est en train d’être anéanti à l’Est, au Sud et au
Nord ; des dissensions internes naissent chez lui et les
premiers signaux de son effondrement apparaissent...
Nous devons, à l’Ouest, exploiter cette opportunité en
agissant rapidement et radicalement, tout en acceptant
le risque de pourchasser les forces allemandes. J’ai l’in-
tention de terminer la destruction des forces allemandes
à l’Ouest, puis de foncer directement vers le cœur de
l’ennemi [3]. » Par le cœur de l’ennemi, Eisenhower
entend bien sûr l’Allemagne, mais plus particulièrement
la Ruhr, cette énorme région industrielle sur laquelle la
puissance matérielle allemande repose. Quatre axes
d’attaque sont alors possibles, tous choisis en fonction
de la facilité géographique offerte. Le premier passe
à travers les plaines de Flandre, le second sur un axe
allant de Maubeuge à Liège, le troisième à travers les
Ardennes et le dernier via Metz pour passer à Sarrebruck
puis Francfort. C’est le second itinéraire, soutenu par le
quatrième, qui est choisi par Eisenhower : les deux voies
ont été, de tous temps, des lieux de passage privilégiés
par les armées opérant d’un côté et de l’autre du Rhin.
De plus, passer par Metz donne aussi l’occasion aux
Alliés de saisir la zone industrielle de la Sarre ; si elle
est d’une importance moindre que la Ruhr, la région
sarroise reste capable de fournir beaucoup de matériaux
à l’industrie allemande.
Sauf que le 2 septembre, Eisenhower ordonne à Patton
d’arrêter sa progression au-delà de la Meuse afin de
conserver le plus de carburant possible pour la poussée
vers le nord ; la Third Army n’aura ensuite plus qu’à
atteindre d’être ravitaillée en carburant pour se porter
à l’est et dépasser le Westwall.

[1] Cité dans D’Este (C.), Patton : A Genius for War, HarperCollins, New York, 1995

[2] Plus connu en France sous le nom de ligne Siegfried.

[3] Cole (H.), The Lorraine Campaign, p.33, Whitman Publishing, 2012.

INTRODUCTION


Vu sur https://www.french−bookys.com

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