1944
LORRAINE
L'OCCASION MANQUÉE
DE
PATTON
La Luftwaffe fait elle aussi pâle figure : seuls
110 chasseurs-bombardiers du Jagdkorps II
couvrent la région de Nancy-Metz. Saignée à
blanc par cinq années de combat, la Luftwaffe
ne dispose en 1944 plus du vivier de pilotes
entraînés mais de beaucoup de « bleus »
qui vont se montrer peu efficaces face
à leurs homologues américains.
Afin de combler leur déficit en troupes et
en matériels, les Allemands vont s’appuyer
sur la topographie de la Lorraine, en créant
notamment la « Metz-Thionville Stellung »,
une ligne de défense le long du fleuve épo-
nyme. Les deux villes qui s’y trouvent ont
été fortifiées depuis le XVIIe siècle par les
différents propriétaires ; Metz [4] par exemple
dispose de deux ceintures fortifiées, la pre-
mière datant d’avant la guerre de 1870 et
la seconde datant de l’annexion allemande
jusqu’en 1918. À ces ouvrages modernisés
s’ajoutent trois autres groupes fortifiés plus
au nord, autour de Thionville, tous construits
par l’occupant allemand à partir de la fin du
XIXe siècle : la Feste Illingen (Illange), la Feste
Obergentringen (Guentrange, sur le massif au
nord de Thionville) et la Feste Königsmachern
(Kœnigsmacker). Ces trois ouvrages armés
de quatre pièces de 100 mm (sauf pour le
second, armé de huit pièces de 105 mm) sont
placées stratégiquement et peuvent battre
efficacement les abords de la Moselle [5],
empêchant un hypothétique assaillant venu
de l’ouest de la franchir sans dégât. La ville de
Nancy, elle, bénéficie d’une topographie idéale
lui conférant une défense naturelle ; enfin, plus
au sud se trouve la trouée de Charmes, une
voie d’accès vers l’Alsace qui officie comme
« goulet d’étranglement » et où les Français
ont vaincu les Allemands dans les premiers
mois de la Grande Guerre. Le reste de la région
vers l’Allemagne est composée de grandes
plaines agricoles, parfaites pour les grandes
manœuvres et les duels de blindés. Enfin,
de nombreux cours d’eau et autres zones
humides rendent plus difficile la progression
dans l’est et le sud-est de la région.
LA VEILLÉE D’ARME
Le 7 septembre, von Rundstedt rédige son
premier rapport sur la situation à l’Ouest, et
le tableau n’est pas différent de celui peint
par Model quelques jours auparavant. Aix-
la-Chapelle (Aachen) est la plus exposée
selon lui, et les renforts qui y sont envoyés
ne sont pas suffisants. Mais Hitler ne bouge
pas d’un iota et ordonne toujours le lance-
ment de l’attaque du 12 septembre. Face à
Patton se trouvent la 1. Armee du General
der Infanterie Kurt von der Chevallerie (bientôt
remplacé par le General der Panzertruppen
Otto von Knobelsdorff) ainsi que la 19. Armee
du General der Infanterie Friedrich Wiese
(autour de Langres), et plus au sud, entre les
Vosges et la Suisse, c’est le Generaloberst
Johannes Blaskowitz qui commande un front
très décousu.
Ce dernier est un personnage très particulier
qui dénote dans l’aréopage des généraux du
III. Reich. Né en Prusse, Blaskowitz a fait toute
sa carrière dans l’armée et n’est pas un nazi
convaincu ; pour lui, l’armée se doit d’être
neutre politiquement. Il est un des seuls géné-
raux allemands à se plaindre des crimes de
guerre des SS lors de la campagne de Pologne,
et se fait relever de son commandement par
Hitler. En froid avec l’OKW, Blaskowitz est
alors nommé chef de la 1. Armee, char-
gée de l’occupation en France, jusqu’en
1944 ; son amitié avec von Rundstedt va
lui valoir une protection, mais c’est surtout
Himmler qui va être son plus grand ennemi.
Blaskowitz n’hésite pas à contester un ordre
du Reichsführer-SS le 3 septembre 1944 :
ce dernier lui ordonnait d’établir une ligne de
défense derrière le front dans le secteur de
Nancy à Belfort, que ce Blaskowitz refuse. En
réalité, l’homme est un organisateur hors-pair
et un commandant fiable, ce qui lui vaut le
soutien de von Rundstedt mais une certaine
acrimonie de la part de l’OKW.
Au 1er septembre, entre Thionville et Nancy,
la 1. Armee dispose de l’équivalent de trois
divisions et demi ; la 17. SS-Panzergrenadier-
Division « Götz von Berlichingen » est quant
à elle en réserve à Metz, où elle a rencontré
à l’ouest des reconnaissances américaines.
Cependant, des divisions nouvellement for-
mées, les Volksgrenadier-Divisionen, sont
en route : la 559. Volksgrenadier-Division
se trouve à l’est de Metz, tandis que la
ElmsElms 4848
XXXX
ElmsElms 559 VG559 VG
XXXX 26 VG26 VG
XXXX
553 VG553 VG
XXXX
106106
XX
No 462No 462
XXXX
17 SS17 SS
XXXX
33
XXXX
15 (-)15 (-)
XXXX
XX CorpsXX Corps
XII CorpsXII Corps
XXXXXXXXXX
BB
GG
XXXXXX
LXXXIILXXXII
XLVII PzXLVII Pz
XXXXXX
LXXXLXXX
LXXXIILXXXII
Ligne de front
Avancées américaines
Westwall
ALLEMAGNE
FRANCE
LUX.
Thionville
Longwy
Arnaville Sarreguemines
Pont-à-Mousson
Toul
Briey
METZ
NANCY
Bayon
Charmes
Neufchâteau
SITUATION SUR LA MOSELLE, 6 SEPTEMBRE 1944
[4] Metz est une des villes ayant été les plus
fortifiées au monde au cours de son histoire.
[5] Fleuve impétueux au fort courant, la Moselle est
souvent en crue lors de l’automne et l’hiver. Les ouvrages
fortifiés perturbent encore plus une possible traversée.