Planète Cyclisme N°90 – Août-Septembre 2019

(Sean Pound) #1

INSIDE THE RACE – LA BATAILLE DES ALPES


C’est fini pour Thibaut Pinot. Il est 15h environ sur la route de Tignes, à Modane dans la montée
d’Aussois. Thierry Bricaud accompagne son leader dans sa voiture. Le rêve est passé.

Warren Barguil, parti en courageux avec Rigoberto Uran, notamment, et surtout
Vincenzo Nibali depuis Saint-Jean de Maurienne, bien loin de Tignes.

« Egan était notre carte aujourd’hui. » Dave Brailsford, le manager des Ineos, a apprécié le panache de son
coureur colombien, irresistible dans l’Iseran.

« C'était une journée de folie. Je me suis
accroché »racontait le maillot jaune. « J'ai
fait une descente de malade. J'ai juste dé-
branché le cerveau. J'étais à la limite dans
chaque virage. »A l'énergie, Alaphilippe
fut grand. Très grand. Comme toujours.
« Quand je suis rentré sur les mecs qui
m'avaient largué, j'ai pris tout de suite les
commandes. Je voulais leur montrer que
j'étais bien revenu. »Alaphilippe racontait
sa première traversée comme une odyssée
derrière l'ogre Ineos.
La ligne franchie en vainqueur - 20evic-
toire d'étape d'un Colombien - les traits ti-
rés, Quintana invitait les suiveurs à venir
chez lui à Boyaca pour découvrir ses routes
d'entraînements à plus de 2 700 mètres d'al-
titude et participer au Granfondo qui porte
son nom. Le Colombien avait frappé un
grand coup en revenant dans la course au
classement général (7eà 3'54’’). Un miracle
après deux semaines hors sujet. Quintana, 29
ans, avançait une chute pour s'excuser de ses
faux pas. Mais c'est surtout l'ambiance délé-
tère chez Movistar et des stratégies incom-
préhensibles qui avaient fait du Colombien
un coureur hors sujet. Nairo Quintana, an-
noncé depuis des semaines chez Arkea-
Samsic en 2020, gardait le sourire et racon-
tait qu'il avait fait le nid de Landa en partant
ainsi dans le Galibier, alors que Soler et les
Movistar avaient embrayé derrière lui et ra-
mené tous les favoris. Quintana est un onu-
sien du cyclisme. Il agite le drapeau blanc.
Son jeune compatriote Egan Bernal n'a
pas la même politique. Il avait grignoté des
secondes comme un écureuil. Une ving-
taine sur les autres favoris pour gagner trois
places au général. Il était désormais 2eder-
rière Alaphilippe à 1'30’’ du maillot jaune.

Egan Bernal
prend le pouvoir

Une chaleur étouffante enveloppe Saint-
Jean-de-Maurienne le 26 juillet au matin.
Tignes est encore loin. A 2 113 mètres d'al-
titude. Alaphilippe est escorté par quatre
policiers pour signer au podium de départ.
La foule est oppressante autour du maillot
jaune. Les coureurs ont l'œil noir. On ne
parle pas ou très peu dans les paddocks.
Thibaut Pinot monte sur les rouleaux pour
s'échauffer à l'abri des regards. On devine un
bandage sur sa cuisse gauche. La Groupama-
FDJ ne communique pas. Rien. Chez Team
Ineos, on se prépare à une grande bagarre.
Il faut être en jaune à Tignes. Ne pas atten-
dre le dernier rush vers Val Thorens le jour
suivant. « Trop risqué »annonce Portal.
Dès le km 0, les coureurs sont en prise
vers la côte de Saint-André. On traverse

42-49 Bataille des Alpes OK R.qxp_maquette 29/07/2019 21:32 Page46

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