Par Armel Le BesconD
ans une période de vaches mai-
gres, l'Italie s'est trouvée un nou-
veau héros. Giulio Ciccone, un
jeune des Abruzzes, meilleur
grimpeur du Giro. Mais l'Italien avait gardé
de l'énergie pour son premier Tour. Né dans
la même région que Danilo Di Luca, le
grimpeur de Trek-Segafredo a porté le
maillot jaune pendant deux jours sur la
Grande Boucle. Improbable au départ pour
ce rookie! « Complètement! Jamais je
n'aurais pu imaginer un tel destin sur mon
premier Tour de France. Ce maillot jaune
restera à jamais dans ma mémoire, même
si je rêve de le porter à nouveau un jour. »
L'année 2019 est exceptionnelle pour ce
jeune Italien! Meilleur grimpeur du Tour
d'Italie, vainqueur d'une étape en montagne
à Ponte di Legno, Giulio Ciccone a confirmé
qu'il était une nouvelle star du WorldTour.
Luca Guercilena, le manager de l'équipe
Trek-Segafredo, avait scouté Giulio Ciccone
quand il portait les couleurs d'une équipe
Amateurs, la Colpack il y a 5 ans de cela.
« On l'avait à l'œil, car il brillait toujours
sur les mêmes terrains »confirme Guerci-
lena. « Il ne gagnait pas toutes les courses,
mais il était souvent sur les podiums des
épreuves de montagne. Il était trop tendre
pour le ProTour et on lui a conseillé de
faire quelques saisons en ContinentalPro.
Il a accepté bien entendu, car il avait déjà
un plan de carrière. »
Un premier pas vers sa destinée! Ciccone
signe chez Bardiani-CSF et débute en 2016
dans l'équipe dirigée par les frères Reverberi.
Il n'a pas de mentor, mais complète ses fon-
damentaux avec le directeur sportif Stefano
Zanatta. Evidemment, Luca Guercilena veille“En arrivant chez
Trek-Segafredo,
Vincenzo Nibali sera
un parfait professeur
pour moi.”forme des jeunes italiens à la pelle. « Ciccone
est à part encore. Il garde son agressivité
naturelle, c'est ce qui fait sa force. Il vou-
lait gagner l'étape à la Planche des Belles
Filles sur le Tour de France et avoir le
maillot jaune en même temps. Il est très
ambitieux. Il sait ce qu'il veut. »Julien Ber-
nard, son coéquipier chez Trek-Segafredo,
confirme, car il était dans l'échappée vers la
Planche des Belles Filles avec lui : « Giulio
me disait que la victoire d'étape serait pour
lui et qu'il prendrait aussi le maillot jaune.
C'est pour ça qu'on roulait fort. Giulio a
beaucoup d'ambition. D'ailleurs, dans cette
attitude, il me fait penser à Alberto (Conta-
dor). C'est un tempérament. »Julien Ber-
nard a couru avec le Pistolero au crépuscule
de sa carrière.
Pendant le Tour, le jeune prodige a resigné
pour deux ans chez Trek-Segafredo. Mais
quand on lui demande s'il serait heureux de
courir avec la superstar Vincenzo Nibali l'an
prochain, il répondait avec un large sourire :
« Ah, mais je ne sais pas s'il nous rejoint ou
pas! S'il vient chez nous, ce sera un par-
fait professeur pour moi. »Evidemment,
Nibali sera bien chez Trek-Segafredo en
2020, mais Ciccone a dû attendre le 1eraoût
et la période officielle des nouvelles signa-
tures pour confirmer l'arrivée du requin de
Messine chez Trek-Segafredo.
Julien Bernard a trouvé excitant d'avoir le
maillot jaune dans son équipe. « On s'était
planté sur le contre-la-montre par équipe
et ce maillot jaune a relancé une dyna-
mique dans l'équipe grâce à Giulio. »
Un maillot jaune qui n'a pas fait tourner la
tête de l'heureux élu. « Non! Il avait beau-
coup de recul par rapport à l'événement »
rappelait Julien Bernard au départ à Macon
(le jour où il le rendra à Alaphilippe). « Giu-
lio était au service de Richie Porte. Il n'y
a pas eu de débat là-dessus. Il profitait de
son excellente condition physique pour
réaliser un très bon Tour. »Les fans en Ita-
lie se sont régalés avec Ciccone. Un parfum
de glace porte son nom aujourd'hui dans sa
région des Abruzzes. La Gielata de Chieti.sur cette pépite au tempérament de feu.
« Une pile électrique »comme dit Julien
Bernard, son équipier chez Trek. « C'était
déjà un vrai talent, mais il fallait le canali-
ser. Giulio était un attaquant. Il l'est tou-
jours aujourd'hui. Il déteste rester dans la
roue »note le manager qui fut définitive-
ment séduit par Ciccone quand le jeune Ita-
lien remportait une grande victoire en solo
sur le Tour d'Italie 2016 à Sestola. « C'était
énorme! Il n'avait que 21 ans, mais il avait
réalisé un super numéro. »
Ce jour-là, les tifosi avaient découvert un
grimpeur euphorique qui terminait le bou-
lot d'une journée comme seul le Giro est ca-
pable d'imprimer. « Cette victoire a été
déterminante pour moi »reconnaît au-
jourd'hui Ciccone. « On m'a donné un sur-
nom dans ce Giro. On m'appelait le lézard,
car je grimpais très vite à l'assaut des mon-
tagnes. Un peu comme un lézard qui es-
calade les pierres. »Le maillot jaune lui vaut le
nom d'une glace en ItalieCiccone restera encore deux ans chez les
Reverberi, mais l'hiver dernier, Guercilena
est allé le chercher dans cette couveuse quiA.S.O.lPresse-Sports72-73 Ciccone 90 OK R.qxp_maquette 27/07/2019 11:41 Page73